La faculté de sentir peut être affaiblie, inhibée, ou entièrement supprimée... est une contradiction. KANT
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«
"La faculté de sentir peut être affaiblie, inhibée, ou entièrement supprimée...
est
une contradiction." KANT.
Introduction
Kant analyse la peur de la mort :
1.
Mais la mort ne relève pas de l'expérience et ne peut être qu'observée « chez les autres
».
2.
Cependant la peur de la mort est naturelle et universelle : elle se présente non comme
peur de mourir, mais comme « pensée d'avoir péri ».
3.
Cette pensée est une illusion, propre à la nature de la pensée.
Elle est une parole qui ne
renvoie à aucune existence.
Développement
1.
La mort est là.
A son propos, Kant rencontre la notion d'expérience.
Toute expérience est conduite par un sujet.
Elle
peut porter sur un objet (l'objet de l'expérience).
C'est la situation générale de l'observation scientifique.
Dans certains
cas l'expérience, conduite par un sujet (vivant), peut très bien porter sur le sujet lui-même (« faire l'expérience en
elle-même ») : le sujet fait l'expérience de sa respiration, ou bien pense sa propre pensée.
Mais dans tous les cas,
expérience d'un objet, ou du sujet, « l'expérience relève de la vie ».
Autrement dit, de même qu'un sujet mort ne peut faire l'expérience d'un objet, il ne peut conduire l'auto-expérience de
lui-même, sur lui-même.
Devenu objet, le sujet mort a perdu son statut de sujet.
Il ne peut plus se livrer à aucune
sorte d'expérience.
La mort est là, comme objet.
D'où l'idée de limite suggérée par Kant : limite de l'expérience, toutes les expériences ne
sont pas possibles, limite de l'objet, dont le sujet reste toujours extérieur, limite de la mort, porte que nul vivant ne
peut franchir.
Dès lors qu'il y a incompatibilité entre mort et expérience, la mort abstraite se présente concrètement seulement
comme la mort que l'on peut « percevoir chez les autres ».
Ce percevoir est un voir (« les convulsions ») et un entendre (« le râle ») qui marquent, de manière ultime, la mort.
Le
mourant déjà ne peut plus parler.
Inutile donc de se poser la question de la douleur (« La mort [...] est elle
douloureuse ? ») puisque c'est quelque chose qui relève de l'auto-expérience.
La démonstration vient d'être faite que
toute expérience relève du vivant.
Donc impossible « d'en juger ».
Certes, que les râles et les convulsions témoignent de la douleur, c'est là une idée commune.
Mais elle ne relève pas
de l'expérience (d'une expérience impossible).
Il faut dès lors suspendre son jugement.
Quitte à faire des suppositions.
D'où l'imaginaire d'une mécanique (« simple réaction mécanique »).
Et quitte à vouloir réintroduire à tout prix du
subjectif, pourquoi ne pas inverser la proposition du sens commun et passer, de manière réconfortante, de la douleur à
la douce impression ? Atténuer la brutalité de la.
mort en un passage graduel et faire de la mort, non un mal, mais au
contraire une libération du mal ? Comme si, grâce à la mort, on accédait enfin à un monde de félicité, nous permettant
pour le moins d'échapper (enfin) aux souffrances (radicalement subjectives) liées à la mort en tant que telles (on n'en
peut rien dire) mais pour le moins à beaucoup des maladies qui l'accompagnent.
2.
La mort est là, présente comme une donnée nécessaire de la nature.
Mais, dit Kant, la peur de la mort, sentiment
humain, est, elle aussi, « naturelle ».
Elle est là (à ce titre) « universelle ».
L'universalité (et la nécessité) des faits naturels s'applique ici à l'aspect culturel de la peur.
Les plus sages n'en sont
pas exceptés.
Kant analyse au plus près cette peur.
D'abord : ce qu'elle n'est pas.
L'homme semble admettre la nécessité et
l'universalité de la mort, comme phénomène naturel.
La peur n'est pas un « frémissement [corporel] d'horreur [imaginaire] » devant « le fait de périr ».
La peur, dit Kant,
est frémissement d'horreur devant la pensée d'avoir péri : d'être mort, mais sur le mode d'une mort partielle,
suffisamment incomplète pour permettre un frisson.
Sur le mode de l'avoir et non de l'être.
A l'impuissance de ne
pouvoir accéder de l'intérieur au fait (mourir), l'homme valorise ce qui relève de sa puissance, la pensée, en la
conjuguant à l'infinitif passé.
Suit l'exemple du candidat au suicide.
Alors que la mort est pour nous tous une nécessité subie, elle est dans le cas du
suicidé une volonté choisie.
Ce qui rend peut-être plus forte encore cette vision d'un corps qui continue à vivre pour
veiller ce même corps qui est mort.
Dédoublement qui relève de la folie.
3.
Une telle pensée n'accroche aucun fait, elle mime la réalité.
Elle est un leurre.
Plus précisément une illusion.
Erreur
particulière dont les effets persistent même lorsque l'on sait que l'objet présumé n'existe pas réellement.
Cette illusion
ne saurait être dans les choses, elle est dans la pensée.
Elle est de la nature de la pensée elle-même.
« Elle n'est pas
à supprimer », dit Kant, puisque, le voudrait-on, on ne peut la supprimer.
Comme s'il était de la « nature de la pensée »
d'être illusoire, lorsque justement elle ne peut se nourrir d'une expérience.
A la première impuissance de l'homme de
pouvoir vivre l'expérience de sa mort.
correspond une seconde impuissance, celle de se sortir de l'illusion qu'on la pense
tout de même..
»
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