La division du travail sépare-t-elle les hommes ?
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«
• Il semble que toute société observe une certaine division du travail, ne serait-ce que sous l'aspect (premier ?)
d'une différenciation entre travail masculin et travail féminin.
Si la société moderne a globalement tendance à
amoindrir cette différenciation, en confiant aux femmes des tâches équivalentes à celles des hommes, cela signifiet-il nécessairement la fin de toutes les inégalités ? Doit-on admettre au contraire que, dans l'économie
contemporaine, les formes également traditionnelles de division du travail continuent à produire des inégalités ?
• Dès ses débuts, la réflexion philosophique sur le travail souligne la nécessité de le diviser, de façon que chaque
travailleur puisse se consacrer exclusivement à qu'il fait le plus aisément.
Ainsi Platon affirme-t-il déjà que c'est la
multiplicatior même des hommes qui appelle, pour ainsi dire naturellement, une
certaine spécialisation, dont le résultat sera une production supérieure qui ne
pourra qu'augmenter les échanges.
Mais s'il considère de la sorte la
production matérielle, on sait par ailleurs qu'il envisage, lorsqu'il établit le
schéma de la Cité parfaite, qu'elle sera elle-même divisée en catégories
étanches.
Il est vrai que les castes supérieures (philosophes-dirigeants et
soldats) ne produiront rien, au sens matériel du terme, mais on peut
considérer que leurs tâches constitueront néanmoins leur travail, dans une
acception plus moderne que celle de l'auteur de La République.
Doit-on en
conclure que la division du travail va nécessairement de pair avec la division
de la société ?
• Le concept philosophique du travail, tel qu'il s'élabore (tardivement) à
travers les réflexions de Rousseau, Hegel et Marx, insiste sur la double
transformation qu'il implique : transformation du milieu naturel de l'être
humain, mais aussi, et simultanément, transformation de l'homme lui-même.
Comme il s'agit, par définition, d'un homme intégré dans une organisation
sociale, il semble que toute modification dans la conception du travail luimême entraîne une modification dans la société humaine.
• C'est bien une telle modification qui est d'ailleurs attendue, par l'économie classique libérale, de la division du
travail : à en croire Adam Smith, cette dernière n'a que des avantages, et doit aboutir à « une abondance
universelle ».
En effet, le travailleur qui se spécialise dans une seule tâche acquiert pour la réaliser davantage
d'habileté ; de plus il la réalise plus rapidement ; comme parallèlement Adam Smith affirme que la division du travail
doit s'accompagner de la mise au point de machines facilitant et abrégeant encore la tâche de chacun, le résultat
de l'organisation ne peut consister qu'en un accroissement considérable de la production individuelle.
A partir de quoi
peuvent se multiplier les échanges, d'où dépend une richesse, à l'époque conçue comme également répartie « parmi
les différentes classes de la société ».
• On doit cependant constater que, historiquement, les choses ne se sont pas déroulées aussi harmonieusement.
Le
travailleur, ou l'« esclave » hégélien, sera décrit par Marx comme soumis à une aliénation généralisée qui, du point
de vue marxiste, est le résultat le plus notable de la division du travail.
Autrement dit, à un travail divisé
correspondent à la fois un homme lui-même divisé (c'est-à-dire incomplet) et une société divisée (c'est-à-dire
traversée par la lutte des classes).
• Si, comme l'affirme le début du Manifeste du Parti communiste, « l'histoire de toute société jusqu'à nos jours n'a
été que l'histoire de la lutte des classes », cette dernière résulte nécessairement de l'organisation sociale du travail,
c'est-à-dire de sa division.
Ce qu'avait « oublié » Adam Smith, c'est que les échanges, par exemple, ne s'effectuent
pas directement d'un travailleur à un autre ; c'est aussi, et plus fondamentalement, que les travailleurs sont
rarement propriétaires de leurs outils de production (cette propriété peut caractériser des artisans indépendants,
mais certainement pas des ouvriers de manufactures, alors que c'est à propos de ces derniers qu'Adam Smith vante
la division du travail) ; c'est encore que dans la société industrielle s'affirme la possibilité d'un travail très particulier,
qui est celui du capital...
Ainsi apparaît-il que la division du travail est étroitement liée à la lutte des classes, et que
la survie de l'une va de pair avec celle de l'autre.
L'ouvrier spécialisé dans la grande industrie
"[Dans la fabrique] la classitication fondamentale devient celle de travailleurs aux machines-outils (y compris
quelques ouvriers chargés de chauffer la chaudière à vapeur) et de manoeuvres, presque tous enfants, subordonnés
aux premiers.
Parmi ces manoeuvres, se rangent plus ou moins tous les feeders (alimenteurs) qui fournissent aux
machines leur matière première.
A côté de ces classes principales prend place un personnel numériquement
insignifiant d'ingénieurs, de mécaniciens, de menuisiers, etc., qui surveillent le mécanisme général et pourvoient aux
réparations nécessaires.
C'est une classe supérieure de travailleurs, les uns formés scientifiquement, les autres
ayant un métier placé en dehors du cercle des ouvriers de fabrique auxquels ils ne sont qu'agrégés.
Cette division.
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