La création artistique est-elle d'origine religieuse ?
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La notion de création, appliquée à l'homme, l'a toujours été dans la perspective d'un rapport de l'homme à Dieu,
rapport positif lorsque, en créant une oeuvre, l'homme avoue qu'il ne fait que manifester, à travers sa propre
finitude, l'infinie puissance du Créateur, rapport négatif lorsque l'homme affirme sa créativité comme dévoilement de
l'insuffisance, de l'imperfection de l'oeuvre divine, c'est-à-dire finalement comme une preuve de l'inexistence de
Dieu.
Aussi la question posée a deux sens, au sens chronologique tout d'abord.
La création artistique est-elle
apparue par nécessité religieuse, en somme si l'art est né pour exprimer le sentiment religieux ou le divin ou est-elle
apparue afin de répondre à d'autres fonctions ? Dans un sens second temps, on peut se demander si la création
artistique, quelque soit l'oeuvre créée serait d'origine mystérieuse ou religieuse ou d'un sentiment proche du divin.
Dans ce cas, il faut se demander quel processus est à l'origine de l'oeuvre d'art ou si elle résulte de l'imagination ou
d'un simple savoir-faire que l'on peut apprendre.
1) le paradoxe du sacré et de l'oeuvre d'art : l'iconoclasme.
La Grèce et l'Egypte antique donne figure à ses dieux, et de parallèlement, la philosophie s'interroge sur cette
représentation, et mesure son accord avec la notion civique du divin et les formes reçus de sa représentation.
Il
s'ouvre avec la philosophie ce qu'on appellera l'iconoclasme.
La postérité de Platon mettra à vif deux exigences
contradictoires : le regard doit se tourner vers le divin et qui lui seul vaut la peine d'être contemplé et que le
représenter est vain et inconcevable.
Mais cette pensée n'aboutira pas à la destruction des images.
La philosophie
fût sans prise sur la cité qui ne cessait de multiplier les images.
La philosophie n'était pas unanime, Aristote pensait
que le travail de l'artiste participait à la dignité divine.
Le stoïcisme ne s'opposait pas à une manifestation plastique
des images.
Le culte impérial romain de même vit des images de l'empereur.
L'ancien testament interdit de son côté
l'image.
Pour le judaïsme, c'est la distance infranchissable avec le divin qui est la raison de cette interdiction, pour
l'islam c'est l'intimité familiale avec Dieu qui rend impossible la confection d'une image digne de son objet.
La
théologie balise les conditions de possibilité de l'image divine.
Avec la conversion de Constantin, se développe
l'image chrétienne en échange avec l'image impériale.
Les arguments iconoclastes s'appuient sur des interdits
bibliques et sur la critique de la philosophie grecque.
Paradoxalement, la meilleure théorie iconoclaste se trouve
constitué à l'époque où l'art grec produisit ses plus belles images divines.
Un autre cycle s'ouvre avec les temps
modernes, où l'iconoclasme cohabita avec les plus belles réalisations de l'histoire de l'art.
C'est avec retard que les
idées iconoclastes sont devenues actives.
Les images furent produites en toute insouciance au Moyen- age et audelà où le concile de Trente a été reçu.
L'image était conçue comme un support d'éducation pour le peuple.
Mais on
voyait une dérive païenne dans cette utilisation de l'image.
Le second cycle iconoclaste commence avec Calvin.
Les
images médiévales ont alors perçues comme le terreau de la superstition.
Hegel récapitulera avec sagacité l'histoire
de l'image divine qu'il place au centre de toute réflexion sur l'histoire de l'art.
Selon lui, la révolution française a figé
l'esthétique française dans le classicisme.
La religion de l'art et le symbolisme auront leur importance.
On recherche
la sacré ailleurs jusqu'aux masques primitifs.
2) La création artistique et le divin.
La beauté selon le philosophe et peintre Carus se définit par l'interpénétration de la Raison et de la nature qui fait
écho à la révélation de Dieu dans le monde.
L'idée de l'essence divine apparaît en même temps que la nature.
Le moi
entrant en contact avec cette infinité ressent la beauté, car il a atteint sa fin ou sa satisfaction esthétique.
Le
beau romantique se définit par le triple accord de Dieu, de l'homme et de la nature.
Il n'y a rien d'autre de beau que
cette présence du divin dans la nature.
Cette idée rejoint celle de Schelling selon laquelle la beauté est le point de
coïncidence du réel et de l'idéal et que l'art est l'expression de l'esprit infini, tel qu'il se révèle dans le fini.
L'infini ne
se donne que dans une intuition, dans une vision immédiate et non médiatisée.
Carus dans la Lettre VIII redira que
ce qui est beau, exprime une essence divine dans un dessin pur de l'essence de la matière.
L'artiste doit apprendre
à parler le langage de la nature, affirmer et aiguiser son regard afin d'y voir le divin.
Le commun des hommes ne voit
pas la poésie des phénomènes atmosphériques et ne consulte le ciel que pour la vie quotidienne.
Cette
manifestation permanente du divin se doit de trouver une nouvelle forme d'expression libre de tous carcans qui
étoufferait cette vision à la fois directe et métaphysique de la nature.
3) L'oeuvre d'art inspire un sentiment divin.
Heidegger pense que l'oeuvre d'art est dévoilement de la vérité de la chose.
L'oeuvre installe un monde, ce n'est pas
elle qui est installée.
L'oeuvre rayonne, elle a une aura.
Ce qui enlève le sacré de l'oeuvre d'art, c'est « l'ici et le
maintenant » de la véritable présence de l'oeuvre d'art.
Il se fait souvent un silence quasi religieux face à une
oeuvre d'art digne de ce nom.
A l'exemple du romantisme qui a voulu rénover le sentiment religieux, la peinture de
Caspar David Friedrich, Le retable de Tetschen, peinture de paysage représentant un Christ sur une montagne
éclairée par le soleil Une oeuvre d'art ne mérite pas un discours mais une prière car la contemplation d'une peinture
élève notre âme vers Dieu.
La contemplation esthétique est une expérience intime d'union avec l'esprit du Créateur.
Cette pensée qu'on pourrait appliquée au Retable exprime ce désir d'union de la nature, de l'art et de la religion en
vue d'une certaine totalité Tout homme devant la nature éprouve un certain sentiment du divin.
4)l'origine des oeuvres d'art : artiste et génie.
On méconnaît parfois la nature du génie, et l'artiste est souvent confondu avec celui qui produit de manière quasi
miraculeuse une oeuvre sans effort et sans rectification.
Certes, le génie est celui qui invente des règles, mais pour
cela il a dû travailler à rectifier sans cesse ses premières intuitions, à retravailler des esquisses, à corriger ses.
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