La constatation de l'existence du mal dans le monde réagit-elle sur vos convictions et sur votre conduite ?
Extrait du document
«
Forme de l'énoncé.
Question à laquelle vous avez à répondre par oui ou par non, donc question avec réponse proposée.
Toutefois, ce
qui est en question, c'est moins le fait que vous réagissez ou non que la forme de votre réaction.
La question est
donc en réalité « ouverte » et pourrait se formuler : « Comment la constatation de l'existence du mal dans le monde
réagit-elle sur vos convictions et sur votre conduite ? ».
Discussion.
Il y a deux éléments à examiner :
1° La constatation de l'existence du mal dans le monde,
2° La réaction sur vos sentiments et sur votre conduite.
1° La constatation de l'existence du mal dans le monde.
a) Il y a des maux qui sont visibles : une ville détruite par un tremblement de terre, des innocents emmenés dans
des camps d'extermination, une famine, un massacre de population, une erreur judiciaire.
Il y en a d'autres qui n'existent que parce que nous les ressentons; c'est le cas de la douleur, physique ou morale,
et de la faute.
Nous ne pouvons constater que d'autres souffrent ou qu'ils sont poursuivis par un remords sinon en
interprétant les signes qu'ils manifestent à la lumière de notre propre expérience.
Néanmoins, on peut dire
qu'éprouver soi-même un remords c'est en un sens constater qu'un mal existe dans le monde.
b) L'expression « constatation de l'existence du mal dans le monde », prise à la lettre, signifie que l'enfant, qui était
jusqu'alors ignorant et innocent, a un jour la révélation du mal ; il apprend à donner un sens à ce mot, il prend
conscience d'une sorte de valeur des choses.
Mais l'emploi du présent d'habitude « réagit-elle » évoque aussi une pluralité de constatations de l'existence d'un mal
: un assassinat, une injustice, une trahison, etc.
L'énoncé du sujet semble plutôt appeler la première de ces deux interprétations, mais toutes deux offrent matière à
réflexion.
Une chose est à remarquer et à souligner, c'est que les hommes ne sont pas toujours d'accord sur ce qui est bien
ou mal; les guerres de religion en sont un exemple frappant, ou l'opposition des partis politiques.
Les Stoïciens sont
célèbres pour avoir enseigné que la souffrance n'est pas un mal; et LEIBNIZ, caricaturé par VOLTAIRE dans Candide,
explique pourquoi le monde créé par Dieu est le meilleur des mondes possibles.
Mais nous devons ici laisser de côté
cette difficulté : nous considérerons comme un mal ce qui est jugé tel par celui dont nous avons à examiner les
réactions et dont les convictions sont modifiées par l'existence du mal qu'il constate.
Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.
La trop fameuse formule : « Tout est pour le mieux dans le meilleur des
mondes possibles» apparaît en substance dans un ouvrage de Leibniz (16461716) qui sut mettre son génie de logicien au service de la religion : La
Théodicée (1710), dont le titre exact est : Essais de théodicée sur la bonté
de Dieu, la liberté de l'homme et l'origine du mal.
La Théodicée est un ouvrage où Leibniz s'efforce de résoudre quelques
problèmes classiques posés à la théologie, et qu'il énonce ainsi :
« Quand il n'y aurait point de concours (le Dieu aux mauvaises actions, on ne
laisserait pas de trouver de la difficulté en ce qu'il les prévoit et qu'il les
permet, les pouvant empêcher par sa toute-puissance.»
Comment peut-on concilier la bonté de Dieu avec l'existence du mal ?
Comment peut-on concilier la liberté humaine avec la toute-puissance divine ?
Le terme même de théodicée signifie « justice de Dieu » (du grec théos qui
signifie « Dieu » et dikè qui signifie « justice »).
Leibniz est le premier à avoir
formé ce néologisme qui devait rester dans la langue philosophique.
Mais les
problèmes qu'il pose sont bien connus et Épicure (341-270 avant J.-C.) en
avait déjà donné une formulation vigoureuse, qui tendait à prouver que notre
conception du divin est parfaitement erronée.
Le but de Leibniz est tout
autre, puisqu'il s'agit de défendre la cause de Dieu.
Voltaire a eu beau jeu dans Candide (1759) de se gausser d'une formule qu'il ne comprend pas et qu'il malmène.
Leibniz n'écrit pas «tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes », mais
« L'on a montré que cet univers doit être effectivement meilleur que tout autre univers possible »
ou encore :
« Il faut dire que Dieu, entre les suites possibles de choses, infinies en nombre, a choisi la meilleure, et que par
conséquent la meilleure est celle-là même qui existe en acte.»
Ce qui varie de la formule voltairienne à la formule vraie de Leibniz est l'idée de pluralité.
Dieu conçoit une infinité de
mondes possibles, et il choisit suivant le principe du meilleur.
Cela ne veut pas dire que Leibniz nie le mal et que
nous vivons «dans le meilleur des mondes », mais que tous les autres mondes possibles, que Dieu a conçus, sans
choisir de les faire exister, seraient pires.
Ce qui, avouons-le, n'est guère réjouissant, Leibniz va jusqu'à écrire :.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- L'existence du mal est-elle un scandale ?
- l'existence du mal remet-elle en cause vos croyances ?
- Avec ou sans Dieu peut-on justifier l'existence du mal, et même comme disent certains le mal absolu"
- L'existence du mal interdit-elle de concevoir un Dieu bon ?
- L'existence du mal contredit-elle la toute-puissance de Dieu ?