La conscience est-elle un état d'esprit ?
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«
Introduction
On définit la conscience comme l'intuition (plus ou moins claire) qu'a l'esprit de ses états et de ses actes.
La conscience est ainsi cette saisie des faits
psychologiques appartenant à un ou plusieurs individus.
Aussi, la conscience se contemple et se forme elle-même différemment selon l'époque, selon
l'appartenance du sujet à tel groupe social, selon les normes instituées etc.
Il en ressort qu'on ne trouvera pas le même état d'esprit d'un individu à un autre
selon l'époque et selon les institutions qui l'accompagnent.
Et même si la conscience de soi est cette liberté infinie de revenir sur soi (réflexion), le sujet est
toujours la proie des déterminations qui jalonnent son temps.
Dès lors, on peut certes penser la conscience comme état d'esprit, mais il nécessaire de
comprendre que la conscience est le lieu même d'états d'esprits qui diffèrent selon les individus et leurs représentations (morales, religieuses, politiques
etc.).
I.
l'enfermement de la conscience
a.
Le sujet s'est longtemps trouvé enfermé dans des cadres rigides.
Seul le côté extérieur à la conscience (Dieu)
était prôné, laissant celle-ci dans un état d'esprit non libre.
La Grèce antique nous en donne une belle illustration, et
notamment à travers la figure de Platon.
C et auteur a souligné le caractère supérieur de la Cité (cf.
La République).
L'individu doit ainsi se conformer à ce tout qu'est la C ité, car en dehors d'elle, il n'est rien.
Il n'y a pas de place à cette
époque pour une réflexion de la conscience sur elle-même.
L'homme ne peut développer sa particularité sans mettre en
péril l'ordre établi.
Et c'est Socrate qui sera le modèle premier d'une nécessité de retour sur soi pour la connaissance.
L'homme ne peut être libre s'il ne recouvre pas pleinement ce principe de la subjectivité.
Socrate incarnera à son
époque, au détriment du pouvoir de la Cité, la conscience morale, le sujet autonome, le vouloir individuel.
Il sera pour
cela, pour avoir provoqué l'ordre, jugé et mis à mort.
b.
Une autre figure capitale, représentative de la volonté d'extraire l'individu du joug des lois, est celle de Jésus.
En
effet, Jésus est venu apporter aux hommes un message d'amour.
A la différence des commandements des juifs, qui
vivent sous la domination et la crainte de Dieu, Jésus montre que Dieu est l'intériorité même des sujets, qu'il n'est pas
extérieur.
Le christianisme destituera le judaïsme de cet état d'esprit possédé et dominé, et fera de l'homme une
conscience morale autonome, un sujet libre.
Ainsi de la conception des Grecs à Socrate, ou de celle des juifs à Jésus,
on repère la démarche qui consistera à donner au sujet plus de liberté, ce qui passe nécessairement par la subversion,
par le renversement d'un ordre établi, par un état d'esprit qui se distingue de celui qui persistait dans la conscience de
la majorité des hommes à une époque donnée.
II.
la conscience : l'état d'un sujet relatif à son vécu, à l'appropriation de soi.
a.
Montaigne montre dans ses Essais que vouloir saisir l'être, c'est comme vouloir empoigner de l'eau.
La raison n'est
pas un honorable refuge, d'où une déconstruction de l'homme et de ses prétendues facultés, c'est ce qu'appelle Montaigne « la vanité et dénéantise de
l'homme ».
Il y a une vacuité ontologique de l'homme, alors que ce dernier croit le plus souvent fermement à sa raison, ou à son être.
A vec Montaigne on
peut douter sur tout, sauf sur la vanité de l'homme.
A insi le stoïcien est vaniteux puisqu'il pense être maître de lui-même.
Le doute exclut qu'on ne fasse
jamais sienne une certaine présentation du moi, et c'est toute la présentation des Essais : « Je ne peins pas l'être, je peins le passage » (III, 2).
A insi il n'y
a pas avec Montaigne de résultat, que ce soit l'ataraxie sceptique, ou une certitude inébranlable ; de fait, pour cet humaniste, la vie humaine n'a pas de but,
mais seulement « un bout » (Essai, III, 12).
Ainsi le titre de cette œuvre montre bien que l'homme est un essai permanent, qu'il a toujours en lui de
l'inconnaissable, et qu'il se révèle à chaque fois différent.
b.
Être conscient, dans le sens le plus généralement et aisément admis, c'est avoir conscience d'une expérience actuellement vécue.
Cet aspect de la
conscience est certainement le moins contesté pour être le plus évident.
Il est accepté, par exemple, aussi bien par un philosophe comme K.
Jaspers, qui
écrit : « La conscience est la totalité du moment [...] la totalité de la vie psychique actuelle » La constitution de la conscience en champ d'actualité étant la
moins récusable, c'est bien à l'expérience vécue que l'on pense généralement lorsqu'on entend saisir l'essentiel de l'activité de conscience.
Ce champ de la
conscience est donc rempli à chaque moment du temps de l'expérience actuellement vécue.
A ussi, la conscience serait l'ensemble de la vie psychique à
chaque moment de la vie.
On peut par exemple avoir conscience de son passé ou de son avenir.
Dans ce cas, la conscience ne peut être que totale, enfin
dans ce sens, où il n'y aurait pas un ailleurs de la vie psychique.
En d'autres termes, la conscience serait les processus psychiques en acte dans notre
esprit.
Mais cela serait limiter la réflexion aux portes des processus inconscients, ne pas voir ce qui peut diriger en sous-main la conscience, ce qui peut
diriger notre conscience contre notre perception et contre notre gré.
III.
L'état déterminé de l'esprit.
a.
A vec Marx, c'est l'existence sociale qui détermine les actions des hommes, leur conscience.
A insi, toujours pensant agir librement de son propre chef,
l'homme s'avère n'être que le produit de sa place qu'il occupe dans les rapports sociaux tendant à la production : « Ce
n'est pas la conscience des hommes qui détermine leur existence, c'est au contraire leur existence sociale qui
détermine leur conscience » (Marx, Avant-propos à la Critique de l'économie politique, 1859).
Les conditions matérielles de
l'existence sont responsables, selon Marx, des inégalités parmi les hommes, et de leurs effets, comme l'aliénation d'un
ouvrier qui ne sait pas réellement le produit sur lequel il travaille.
b.
Le sociologue P.
Bourdieu présentera (cf.
La distinction), avec le terme « habitus », les caractères innés et acquis
en l'homme.
L'habitus est une incorporation des règles qui régissent tel ou tel « champ » social, que l'homme reproduit
sans cesse.
Ainsi, il y a des habitus différents selon qu'on est issu du monde ouvrier ou du monde bourgeois.
C haque
classe sociale a ses habitudes bien ancrées en chaque individu issu d'elle.
L'habitus est un système de comportements
permettant à chacun de se mouvoir « comme un poisson dans l'eau » à l'intérieur de sa classe social.
L' habitus
comprend donc une part d'inné (héritage culturel issu des parents) et une part d'acquis (héritage culturel qu'on se forge
soi-même).
D'où le fait que pour cet auteur un enfant de professeur aura plus de facilité à l'école qu'un enfant d'ouvrier.
Chacun vit ainsi sans connaître ce qui le détermine réellement, et la liberté ne peut s'acquérir que si on connaît les
déterminations qui font qu'on soit ainsi.
Conclusion
On remarque au terme de ce cheminement que la conscience est changeante, et qu'elle peut recevoir diverses
formes.
Elle se cantonne le plus souvent à ce qui la détermine, et reste ainsi prisonnière de ses représentations.
D'où
l'importance de certaines figures qui viennent bouleverser ces conceptions, et redonner au sujet pensant la possibilité
de s'extraire un temps de ce qui le régit, et donc de provoquer en soi une réflexion sur la structuration de l'esprit..
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