La conscience est-elle source d'illusions ?
Extrait du document
«
Problématique:
Le problème soulevé par cette question repose sur la nature même de la conscience: apparemment, celle-ci
consiste en une intimité complète avec soi-même, telle que l'absence de distance interdit la possibilité de l'erreur.
Autrement dit, la conscience semble transparente à elle-même.
Ce sont cette transparence et cette proximité avec
soi-même que vous devez discuter.
En effet, Ce qui est présent dans la conscience semble directement accessible.
Un simple regard, une simple introspection suffisent.
De plus, le sens de ce qui est présent dans ma conscience est
là en sa totalité.
Avec la conscience, on est donc de plain-pied dans la signification.
Bref, la conscience est
transparente à elle-même.
Et ce qui se présenterait comme une zone d'ombre ne serait que la conséquence de
l'inattention ou d'une attention insuffisante.
En cela le rapport de la conscience avec elle-même diffère de son
rapport avec l'objet.
L'objet est une zone d'opacité pour la conscience.
Quand je m'engage dans la connaissance du monde extérieur, je
quitte le domaine de la certitude.
Seule la transparence de la conscience avec elle-même ouvre la sphère de la certitude.
Autrement dit, je lis dans
ma conscience à livre ouvert.
La certitude n'est jamais que l'adhésion de la conscience à une vérité reconnue par
elle avec évidence comme telle.
C'est à partir de Descartes que la notion de conscience a cessé d'être employée dans le sens de « conscience
morale » pour désigner le retour réflexif sur soi par lequel on pense qu'on pense.
Comme expérience, la conscience est un fait irrécusable.
Elle a pour elle le poids de l'évidence.
La conscience se
donne immédiatement à elle-même et apparaît claire & souveraine.
Ce qui fait l'originalité du rapport de la
conscience à elle-même, c'est l'immédiateté.
Nul intermédiaire, nulle médiation, la conscience se donne
immédiatement.
Pour Descartes, la vérité se saisit dans le présent et plus précisément dans l'instant.
En effet, c'est
au moment où je prononce « je suis, j'existe » que cette proposition est vraie.
C'est dans l'instant où elle se donne
que je l'éprouve dans sa vérité.
Le présent est la seule chose qui échappe au doute.
Il se distingue du passé qui, en
tant qu'il suppose la mémoire, dépend de la fiabilité de cette dernière et de la reconstruction qu'elle implique.
Seul,
le présent est ce qui peut signifier cette immédiateté.
Le présent est le temps de la vérité de la conscience.
Immédiateté et transparence de la conscience à elle-même assurent la présence du sens.
L'unité de la conscience
permet d'assigner un pôle d'identité à une multiplicité d'actes pourtant différents.
De cela et sur cela on peut fonder
le pouvoir de la conscience.
Car la possibilité de référer des actes divers à un même sujet exclut la possibilité de
renvoyer la faute sur autrui.
En outre, la claire transparence de la conscience à elle-même exclut la possibilité d'un
acte dont le sens échapperait au sujet.
Cependant les découvertes de Freud ont établi de manière définitive que la conscience est le siège d'illusions.
Opposer la conscience à l'inconscient se heurte à la difficulté majeure que la conscience se donne immédiatement à
elle-même tandis que l'inconscient se dérobe.
De l'inconscient on n'a nulle conscience !
En outre, il importe de déterminer les illusions que la conscience peut produire et la manière dont elle les produit.
Songez ainsi, dans le domaine de l'action, à la croyance en une capacité d'être la seule cause de l'action et donc en
la liberté; et analysez, dans le domaine de la connaissance, la croyance commune selon laquelle chacun est le mieux
à même de connaître ses propres croyances et les motifs de ses actions.
La solution de cette opposition consiste peut-être à distinguer différents domaines dans la conscience: les qualités
sensibles, comme la douleur, n'existent peut-être que pour et par la conscience.
Limites & illusions de la conscience.
Si c'est dans son rapport à elle-même que la conscience s'éprouve comme une certitude, qu'en est-il du rapport à
l'autre ? Qu'en est-il du rapport entre les consciences ? A m'enfermer dans le cogito, comment puis-je communiquer
avec les autres consciences ? Le seul rapport qu'il me soit permis d'avoir avec autrui c'est l'analogie.
Du
fonctionnement de ma conscience, j'induis le fonctionnement de la conscience d'autrui.
C'est à partir de moi-même
que je comprends l'autre.
Mais dès lors ce qui disparaît c'est la certitude de la vérité.
En effet, dans la mesure où je
n'ai pas accès à l'intériorité d'autrui autrement que sur le mode de l'analogie, je n'ai aucun moyen de contrôler ce
qu'il me dit.
Il peut tout aussi bien dire la vérité que mentir.
Le rapport avec autrui repose donc sur un acte de foi..
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