La connaissance de soi peut-elle être sincère ?
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INTRODUCTION
Question a priori surprenante : la connaissance, en général, peut être appréciée par rapport à sa vérité — mais plus
difficilement par rapport à la notion de « sincérité » (connotation psychologique ou morale, qui n'a pas grand-chose
à voir avec le fait de connaître).
De plus, cette question sous-entend que la connaissance de soi ne pose dans sa
constitution pas de problème particulier: on semble admettre qu'elle existe.
I.
QUE VISE LA CONNAISSANCE DE SOI?
— On peut distinguer:
• connaissance de ce que je suis (point de vue «objectif» ou général);
• connaissance de qui je suis (point de vue «subjectif» et singulier).
— Le premier point de vue renvoie, soit aux tentatives «scientifiques» pour analyser les éléments et la constitution
d'un «moi»,
soit à la tradition kantienne d'un moi transcendantal comme principe d'unité des représentations.
— Le second point de vue ferait référence aux analyses plus psychologiques » de la personnalité ou du caractère.
On y devine deux difficultés majeures:.
• l'introspection classique a été sévèrement critiquée par A.
Comte,
• problème que pose l'existence d'un inconscient freudien.
II.
CE QU'EST LE MOI
— Les apports des sciences humaines peuvent me proposer des éléments de connaissance «objective» ou générale
du moi (sociologie, linguistique, histoire...).
- Mais la question de la sincérité vient perturber la réception de cette connaissance u” objective»:
• un sociologue peut m'enseigner par exemple que mes goûts artistiques sont déterminés par mon groupe social (cf.
les travaux de Bourdieu): ce que je peux ainsi savoir ne m'empêche nullement de savourer authentiquement ce que
«je» préfère;
• un linguiste peut m'affirmer que le sentiment du «je» n'est que le résultat des structures de la langue (cf.
Jacobson).
Il n'en reste pas moins que je continue sincèrement à penser que ce « je » désigne une réalité qui n'a
rien de seulement linguistique.
— On constate ainsi que ce que je crois ou veux sincèrement être n'a rien à voir avec la façon dont je peux me
connaître en adoptant un point de vue extérieur.
— Dans ce point de vue extérieur, ce qui disparaît c'est précisément ma singularité — et la sincérité comme
certitude de me connaître vraiment est la marque de cette dernière.
C'est pourquoi il y aura éventuellement
désaccord entre ce qui m'est ainsi enseigné et ce que je perçois intérieurement comme me constituant (mes goûts,
mes valeurs...).
III.
QUI JE SUIS
— Le même constat s'impose lorsqu'on examine le rapport entre la saisie du moi comme personnalité intime et le
point de vue qu'aura sur ce même moi le regard d'un technicien extérieur.
— Pour me connaître, je prétends me scinder en deux (un durable sujet se considère comme un «objet »).
De la
critique de Comte, on retiendra que, même si une telle opération était possible, la perception de l' «objet» serait
faussée par la subjectivité du «sujet»: dès lors le maximum de sincérité (en tant qu'adhésion du sujet à ce qu'il ne
peut s'empêcher de considérer comme vrai) risque de coïncider avec le minimum de connaissance de soi!
— Si de surcroît on considère l'inconscient, en tant qu'il est par définition impossible à connaître par le sujet luimême, on constate:
• soit que la sincérité authentique suppose, pour exister, que le sujet s'oblige d'abord à explorer son inconscient en
effectuant une cure — ce qui rendrait le passage par cette dernière obligatoire pour quiconque, en contradiction
avec Freud lui-même;
• soit que la non-connaissance de l'inconscient peut bien entendu rendre illusoire la connaissance que le sujet a de
lui-même, mais qu'elle ne peut amener à mettre en doute la sincérité de cette connaissance illusoire.
— Dans tous les cas, la sincérité apparaît indépendante du contenu de la connaissance, elle n'a rien à voir avec son
caractère illusoire ou non.
CONCLUSION
Le sentiment du moi risque de ne pas coïncider avec ce qu'est réellement le moi.
Mais cela n'empêche nullement le
moi d'être sincère.
Comment en effet pourrais-je me mentir à moi-même, dès lors que pour mentir il faut connaître la
vérité afin de la dissimuler?.
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