La connaissance de l'histoire nous aide t-elle ?
Extrait du document
«
Introduction
L'histoire est omniprésente dans nos vie : sous forme de monuments, de jours fériés et de commémorations
diverses.
Enseignée à l'école dès les premières années de formation et jusqu'au baccalauréat, on estime qu'elle fait
partie de ces connaissances fondamentales qu'un citoyen doit avoir en sa possession.
Mais à quoi servent au juste
les connaissances historiques ? Sont-elles des connaissances gratuites, qu'il faut acquérir pour satisfaire une soif de
connaissance présente en chacun de nous, ou nous aident-elles vraiment ? On peut considérer qu'elles nous aident
dans la mesure où elles nous permettent de comprendre d'où l'on vient, ce qu'ont vécus nos ancêtres et pourquoi
certains faits sont ainsi.
Impossible en effet de saisir l'essence de la Constitution française et le principe de ses
institutions si l'on n'en connait pas le berceau.
Mais il peut sembler problématique de sous-entendre que le présent
ne se comprend qu'à la lumière du passé.
En effet, celui qui ne voit dans le présent que les conséquences du passé
peut aussi être doté d'une véritable cécité par rapport au présent.
La connaissance de l'histoire nous aide-t-elle
véritablement, a-t-elle une utilité présente, ou est-elle au contraire un obstacle à la compréhension du présent
comme présent ?
I.
La connaissance du passé éclaire notre compréhension du présent
A.
L'histoire peut s'entendre en deux sens : il peut s'agir de l'ensemble des faits humains, ou de la discipline qui
consiste en leur étude.
Pourtant, ce double sens est loin d'être une coïncidence, comme le montre Raymond Aron
dans cet extrait de son ouvrage Dimensions de la conscience historique: « Connaitre son histoire, c'est se
connaître.
Faire de l'histoire (essayer de comprendre le passé) est différent de faire l'histoire (s'engager dans le
cours des événements, des choses), mais ce n'est qu'en prenant conscience de son passé que l'on donne sens aux
actions humaines.
Cette ambiguïté me paraît bien fondée ; la réalité et la connaissance de cette réalité sont
inséparables l'une de l'autre d'une manière qui n'a rien de commun avec la solidarité de l'objet et du sujet.
» Raire de
l'histoire nous aide donc en ce que cette discipline nous permet de faire l'histoire, c'est-à-dire d'être actif, d'agir
dans le présent.
B.
Aristote, dans la rhétorique montre que les exemples historiques constituent une aide précieuse à la
délibération présente.
Si par le passé un homme a demandé une armée privée, et qu'il s'en est servi pour prendre le
pouvoir et devenir tyran, on peut supposer que si un autre homme en arrive à demander le même droit, il faut le lui
refuser et considérer comme une éventualité que même événement se répète.
C.
C'est tout le sens que l'on peut donner à ce qu'on appelle communément le « devoir de mémoire ».
Il s'agirait
de rendre présent, par des monuments, des jours nationaux, etc.
les événements marquant d'un peuple,
particulièrement les événements traumatisants.
Ce sont le plus souvent les victimes de ces tragédies qui sont alors
à l'honneur, et le message semble sans cesse être : se souvenir du passé pour ne plus le répéter.
Transition : pourtant, on pourrait se demander si la connaissance de l'histoire ne risque pas d'aboutir à une
incapacité d'aller de l'avant, si le devoir de mémoire ne tend pas à être un deuil sans fin dans lequel on se réfugie
pour ne pas avoir à regarder vers l'avenir ou même simplement vers le présent.
II.
L'histoire ne nous détourne-t-elle pas du présent pour nous tourner vers le passé ?
A.
En effet, l'esprit historique, l'esprit tout empreint d'histoire, peut-il réellement voir la nouveauté, est-il réellement
tourné vers l'action ? Dans la deuxième dissertation de la Généalogie de la mémoire, Nietzsche met en évidence le
rôle essentiel de la capacité active d'oubli.
L'oubli, c'est ce qui permet justement de faire table rase du passé et de
laisser une place réelle à l'inédit, à la nouveauté.
Et en effet, on peut se demander si une connaissance historique
trop ou mal développée ne risque pas de mener inéluctablement à la répétition du même : n'est-ce pas parce que le
souvenir de la guerre de 1870 était encore trop présent dans les esprits que la guerre de 14-18 s'est déclenchée ?
Combien de guerres ont été lentement préparées par la rancune de pays ennemis, incapables d'oublier leur défaite
ou leur victoire en demi-teinte ? La rancune et le ressentiment peuvent passer par une culture historique qui devient
dès lors une répétition du même et rend impossible d'aller de l'avant.
B.
on pourrait bien entendu répliquer qu'il suffit de bien faire la part entre histoire et propagande historique pour
retrouver tout l'intérêt de l'histoire.
C'est en effet parce que l'Allemagne, aussi bien que la France avaient forgé une
génération pleine de revanche et de haine, par le biais des manuels scolaires et des récits de parents ou grand
parent tués cruellement par l'autre camp que la connaissance de l'histoire a pu avoir de si tristes répercutions.
Mais
une fois cette distinction admise, peut-on vraiment dire que l'histoire nous aide en ce qu'elle nous donne des.
»
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