La cohérence suffit-elle à définir la vérité ?
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Introduction
Malgré les progrès accomplis, en matière de connaissance, par l'espèce humaine jusqu'à nos jours, il semble qu'ils ne nous
permettent toujours pas de poser définition sûre et universelle de ce qu'est la vérité.
Si de nombreux philosophes
s'accordent sur une proclamation de la vérité comme conformité entre la pensée et son objet, d'autres ont, en tous temps,
ruiné l'effort de détermination de ce qu'est une vérité sur la base de leurs doutes, scepticismes, soupçons concernant une
notion jugée soit relative, soit purement inaccessible.
Un véritable champ d'investigation philosophique, présent tout au
long de l'histoire de la discipline, aura pour objet de rechercher les fondements de la vérité.
Parmi ceux-ci, le critère de
cohérence d'un énoncé sera invoqué.
Est jugé cohérent une suite d'énoncés ne souffrant d'aucune contradiction.
Mais
alors deux questions se posent :
- Ce qui est cohérent est-il nécessairement vrai ?
- Le critère de cohérence est-il suffisant pour définir la vérité ?
I) La logique de la vérité
Du point de vue philosophique, ainsi que nous l'évoquions précédemment, la vérité est communément définie comme
accord de la connaissance avec son objet.
On accorde alors la valeur de vérité à un jugement qui est en tous points fidèle
à son objet.
Ce qui est reconnu ici, c'est la qualité « véritable » du rapport entre notre raisonnement et ce sur quoi il
porte.
La cohérence, qui consacre les raisonnements « non-contradictoires », peut alors prétendre être la condition
nécessaire de l'établissement d'une vérité et également son « critère » (ce qui la distingue de tout autre chose).
Aristote fut l'un des premiers à affirmer cette nécessité de conformité entre la pensée et son objet.
Il tentera, d'ailleurs,
d'en déterminer les conditions de validité formelle.
La « logique » aristotélicienne (cf.
Organon) repose toute entière sur la
considération de la logique formelle comme moyen mis à disposition de l'esprit lui permettant de raisonner et de s'exprimer
conformément à la vérité.
Il consacre alors la cohérence du raisonnement, dans l'exposition des formes cohérentes de la
pensée.
Ses fameux « syllogismes » (liaison déductive de trois propositions: majeure, mineure, conclusion), sont construits
comme des modèles formels de démonstration par raisonnement cohérent :
La majeure « Tous les hommes sont mortels »
La mineure « Or Socrate est un homme »
La conclusion « Donc Socrate est mortel »
Ce type de raisonnement aristotélicien permet de fonder la validité de la pensée sur le critère de sa cohérence et de son
expression logique.
Dès lors c'est bien la cohérence qui définit, dans sa forme logique, la vérité, avec Aristote.
Toutefois, baser son jugement de vérité sur la simple cohérence « formelle » (car c'est la forme du raisonnement qui
compte, et non la réalité des éléments qui le composent), c'est sans doute prendre le risque de confondre vérité et
validité.
II) L'inaccessible vérité
La vérité ne se réduit sans doute pas à l'affirmation d'une simple validité formelle entre le raisonnement et son objet.
Si la
cohérence semble être une condition nécessaire à l'établissement d'une vérité, est-elle pour autant suffisante ?
Kant, notamment, reconnu les limites de cette définition de la vérité comme cohérence.
Si la cohérence est, à ses yeux,
bien un critère de vérité, ce dernier n'est que purement formel (en simple rapport avec la validité du raisonnement et non
pas en rapport avec la réalité de son contenu), et qui plus est négatif (cf.
Kant, Critique de la raison pure, livre I, 2ième
partie : Introduction : idée d'une Logique transcendantale, III).
Au-delà de la simple cohérence d'une proposition – qui peut
toujours avoir l'apparence de vérité sans pour autant être réelle – Kant considère un second critère, universel et
fondateur, de vérité : la « concordance » de la pensée avec son objet.
La vérité ne saurait se réduire à une simple valeur
de validité formelle, mais encore faut-il que la pensée elle-même s'accorde avec son objet.
Kant conclue qu'aucune
« caractéristique suffisante et universelle » de la vérité ne saurait être donnée, puisqu'il « est tout à fait impossible et
absurde de demander une marque de la vérité de ce contenu des connaissances ».
Hume lui-même, remarqua les illusions de vérité engendrées par notre mauvaise compréhension et utilisation de notre
raisonnement.
S'il peut paraître cohérent et crédible de juger que le soleil, comme toujours, se lèvera demain (pour
reprendre le célèbre exemple qu'utilise Hume dans son Enquête sur l'entendement humain), rien d'autre que
« l'habitude », nous en a donné la conviction.
Ce que l'on peut prendre comme vérité, parce que conforme à un
raisonnement cohérent (ici Hume aborde et critique le « principe de causalité », qui établit que tout phénomène déterminé
à une cause déterminée).
Hume renvoie ainsi la notion de cohérence à ses limites sceptiques, rien ne garantissant, dans
notre usage du raisonnement, une vérité inébranlable.
Conclusion
Toute nos vérités, formelle ou matérielle, semblent dériver nécessairement, mais pas exclusivement, d'un
raisonnement cohérent et logique.
Mais la vérité étant en soi une valeur indéterminable absolument, la cohérence ne devient alors qu'un simple critère
négatif (de distinction d'avec le faux) d'une vérité jamais acquise dans sa totalité..
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