La beauté suffit-elle au bonheur ?
Extrait du document
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La beauté peut se définir comme ce qui, dans un être ou un objet, est susceptible de procurer un sentiment de
plaisir à celui qui le contemple.
Le bonheur peut être défini avec Albert Camus comme « l'accord d'un homme avec la vie qu'il mène ».
Arrêtons-nous
un instant sur l'extrême pertinence de cette définition : en effet, elle est compatible avec la pluralité des définitions
subjectives que chaque homme peut donner à la félicité.
Le bonheur d'un homme n'est pas celui d'un autre, le seul
lien entre leurs bonheurs respectifs est que ni l'un ni l'autre ne serait disposé à échanger le sien contre celui
d'autrui.
Ainsi, pour reprendre et développer la définition du bonheur par Albert Camus, nous pouvons dire que le
bonheur est l'état d'un homme en accord avec la vie qu'il mène, c'est-à-dire le sentiment que sa vie correspond à
ses valeurs et aux attentes purement subjectives qui sont les siennes par rapport à l'existence.
Si nous demandons « La beauté suffit-elle au bonheur ? » nous cherchons à savoir si la beauté est suffisante pour
susciter ce sentiment d'accord de l'individu avec la vie qu'il mène dont nous avons vu qu'il pouvait définir le bonheur.
On distingue généralement entre « conditions nécessaires » et « conditions suffisantes ».
Une condition nécessaire
est une condition qui est indispensable pour l'obtention d'une fin mais qui a besoin d'être unie a d'autres conditions
sans lesquelles elle est incapable de la provoquer.
En revanche, une condition suffisante est à elle seule le moyen
de l'obtention d'une fin, sans autre conditions à prendre en compte et à lui associer.
En nous demandant si la beauté suffit au bonheur, nous cherchons à savoir si le sentiment de bien être attaché à la
contemplation d'une chose dont nous jugeons qu'elle peut être dite belle est suffisant pour susciter chez l'individu
un autre sentiment : celui du bonheur.
Nous irons dans ce sens en disant que l'expérience de la beauté d'une chose
est suffisante pour nous procurer une certaine forme de bonheur, sur la nature de laquelle nous nous attarderons.
Mais nous viendrons à nous demander si loin d'être une condition suffisante du bonheur, la beauté ne serait pas,
plus modestement, une condition nécessaire de celui-ci.
Enfin, nous en viendrons à l'idée que si la beauté ne suffit
pas au bonheur, elle est en revanche la « promesse du bonheur », ainsi que le disait Stendhal.
La question au centre de notre réflexion sera donc de déterminer si la beauté est une condition suffisante ou
nécessaire à l'expérience du bonheur pour l'individu.
I.
La beauté est une condition suffisante du bonheur
La beauté procure à celui qui le contemple un sentiment d'harmonie qui se confond fugitivement avec le bonheur
Nous commencerons par dire que la beauté est effectivement suffisante au bonheur de l'individu, de sorte que
l'expérience du bonheur dépend de la beauté et de rien d'autre qu'elle.
Certes, nous ne pouvons dire que le bonheur
d'un individu dépend uniquement de la beauté, ce qui serait intenable : imaginons un homme qui vivrait parmi des
œuvres d'art superbes, mais sans avoir de quoi se nourrir, celui-ci ne serait pas heureux puisque des besoins
fondamentaux lui manqueraient.
En revanche, nous dirons que dans le moment de la contemplation d'une chose
belle, la beauté suffit au bonheur de l'individu.
Pour le dire autrement, une chose belle, comme une œuvre d'art,
procure à l'individu un bonheur qui dure autant que l'expérience de cette chose (autant que la contemplation du
tableau, la lecture du livre ou l'écoute de la symphonie).
Montesquieu disait que nul malheur chez lui n'avait jamais
résisté à deux heures de lecture.
Pour mieux le comprendre, nous pouvons penser à « L'Homme révolté » où Albert
Camus écrit des pages brillantes qui peuvent nous aider à résoudre le problème qui nous occupe.
En effet, il décrit
l'œuvre d'art comme ce qui substitue à l'expérience humaine de la discontinuité, de l'incompréhension du monde et
des lois qui le régissent, une vision ordonnée de la réalité.
Le roman, par exemple, est une œuvre d'art dont les lois
et le fonctionnement sont plus aisément interprétables que ceux de la réalité.
Nous dirons donc que la beauté suffit
au bonheur de l'homme, en ce sens que le bonheur de l'homme dure autant que l'expérience d'une chose belle.
L'artiste est celui qui peut vivre dans la quête permanente de la beauté et en faire la condition suffisante de son
bonheur
Nous tendons donc à dire que la beauté suffit au bonheur, en ce sens qu'elle procure un bonheur temporaire,
circonscrivant l'expérience du bonheur à celle d'une chose dont l'individu juge qu'elle est belle.
En revanche, nous
pouvons penser à un individu particulier pour lequel la beauté est une condition suffisante durable, permanente
même, de son propre bonheur : l'artiste.
C'est un thème puissamment présent dans l'œuvre de Baudelaire, tout
particulièrement dans son recueil intitulé Le Spleen de Paris.
En effet, Baudelaire montre que l'artiste véritable est.
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