Karl Popper et la connaissance objective
Publié le 21/04/2023
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Karl Popper et la connaissance objective
Introduction
La science vient du verbe latin « scire » qui signifie savoir.
Comme l’opinion ou la foi,
la science est une croyance, mais elle s’en distingue par des certitudes objectives,
énoncées au moyen d’une méthode rigoureuse qui affiche ses critères de validation.
Si Descartes, dans Principes de la philosophie, comparait la science à un arbre, un
système unique formé de plusieurs parties, en perpétuelle croissance, et dont nous
recueillons les fruits, le développement du savoir n’est pas si évident.
En effet en
étudiant les méthodes et l’évolution de la science, l’épistémologie montre les
ruptures et les remises en question que ce progrès suppose.
Dans le texte étudié de la Connaissance objective de K.
Popper, le problème suivant
est soulevé : Y a-t-il en science des énoncés pouvant être tenus pour définitivement
vrais ?
La thèse de Popper dans la Connaissance objective vise à établir le caractère
faillible de toute théorie scientifique en précisant cependant qu’une théorie faillible
n’est pas forcément une théorie fausse.
Une théorie faillible est une théorie qui laisse
la possibilité d’être testée, réfutée et désavouée, dans la formulation même de ses
énoncés et de ses lois.
Dans un contexte où plus rien n’est sûr, comment envisager
la possibilité d’un progrès des sciences ? Comment ne pas douter de la valeur de la
science si les énoncés qu’elle constitue ne peuvent jamais être tenus pour des
vérités constantes ? La quête sans relâche de la vérité a-t-elle un sens si nos vérités
sont constamment remises en question ?
Popper s’efforce, dans ce texte, de définir précisément la démarche de la science :
elle n’est pas une entreprise dogmatique où des énoncés devraient être
définitivement tenus pour vrais mais l’exercice permanent d’un sens critique qui
progresse non pas en affirmant le caractère confirmé et vrai de certains énoncés
mais en éliminant des erreurs.
Dès lors, à défaut de trouver la vérité en science,
nous pouvons espérer, par cette démarche critique de remise en cause permanente,
s’en rapprocher le plus possible sans jamais pourtant l’atteindre définitivement.
Le
texte étudié se présente sous trois parties.
Dans la première partie, Popper remet en
question la conception habituelle que l’on se fait de la démarche scientifique.
La
science n’est pas issue d’inductions et ses énoncés ne se vérifient pas par les
confirmations de l’expérience.
La science est par nature hypothétique ou
conjecturale.
C’est-à-dire qu’elle se présente comme une tentative aventureuse de
décrire et de prédire les phénomènes du réel.
Dans la deuxième partie, Popper tente
de définir ce qu’il faut alors entendre par progrès scientifique.
La science ne
progresse pas vers des vérités de plus en plus indiscutables.
Elle progresse en
éliminant les théories infirmées ou non corroborées par les faits expérimentaux.
C’est
par l’erreur que la science progresse et non par l’obtention définitive de vérités.
La
troisième partie du texte reformule la valeur de toute démarche scientifique qui, selon
Popper recherche la réfutation plutôt que la confirmation.
Ce qui fait la valeur de la
démarche critique, ce qui anime le chercheur ce n’est pas la recherche de la vérité
qu’il pourrait découvrir, mais c’est la réalité dont il fait l’expérience dans l’erreur, à
chaque fois que quelque chose, dans le réel, résiste à la théorie qu’il avait élaborer
pour essayer d’en rendre compte.
Les théories scientifiques sont des hypothèses
Dans la première partie du texte, ligne 1 à 6, Popper propose une autre définition de
la connaissance.
Elle n’est plus le lieu où se constituent des vérités absolues et des
lois infailliblement universelles mais celui où se construisent des hypothèses
théoriques aventureuses et faillibles.
Mais comment cette nouvelle approche, qui
exclut l’idée dogmatique qu’une théorie puisse se prétendre vraie, peut-elle être
compatible avec l’idée d’un progrès des sciences ? En quoi la science peut-elle
progresser si une théorie n’est rien d’autre qu’un modèle conjectural de
représentation du réel ?
Selon Popper, le propre des vérités scientifiques réside dans des tentatives, la
révocation de fautes, et en de nouvelles tentatives dirigées par les acquis réalisés au
cours des essais et des erreurs réalisés.
Autrement dit, corriger nos erreurs est les
seul moyen que nous avons de d’apprendre.
L’esprit humain ne peut s’empêcher de
faire sur la réalité un certain nombre d’hypothèses afin d’en expliquer le
fonctionnement.
Ces hypothèses sont au pire totalement fausses, au mieux assez
justes, mais toujours approximatives.
Pour connaître la valeur d’une hypothèse, il
faut la mettre à l’épreuve des faits.
Ainsi lorsqu’une théorie scientifique est démentie
par l’expérience, on l’abandonne et on tente d’en formuler une autre qui sera testée à
son tour.
Popper entreprend de disqualifier la conception commune que l’on se fait de la
démarche scientifique.
Pour lui, les théories scientifiques ne sont pas élaborées à
partir de ce qui s’observe, de façon répétée et régulière, dans l’expérience que nous
faisons du réel.
Au contraire les théories sont des conjectures rationnelles, des
hypothèses que nous élaborons pour rendre intelligible l’expérience du réel.
Passer de l’observation répétée et réglée de phénomènes particuliers à
l’établissement de lois générales, c’est procéder de façon inductive.
L’induction est
un processus de pensée logique dans lequel des observations spécifiques que l'on
croit vraies sont combinées pour tirer une conclusion afin de créer des
généralisations et des théories plus larges.
L’argumentation de Popper se construit comme une réfutation de cette conception
empiriste de la connaissance.
C’est pour lui une erreur que de penser que la science
procède par induction, car cela revient à imaginer que la science assemble des
observations répétées du réel pour en déduire une loi générale qui règle ces
phénomènes du réel à partir de ces régularités observées.
Cette critique de
l’induction comme passage du particulier au général doit beaucoup, aux travaux du
philosophe Hume qui, dans l’Enquête sur l’entendement humain et dans son son
Traité de la nature humaine (1739-1740), montre que rien ne justifie rationnellement
le passage d’un ensemble d’énoncés singuliers à un énoncé théorique universel.
C’est en s’interrogeant sur la notion de causalité dans la perspective de fonder une
science
qu’il
en
définit
les
termes.
Que disons-nous au juste lorsque nous affirmons, par exemple, que la vibration de la
corde d’un violon est « la cause » de ce son particulier ? Qu’il y a de plus entre cette
vibration et ce son qu’un simple rapport de succession, plus qu’une conjonction ? Il y
a entre ces deux événements une « connexion nécessaire » due à l’expérience que
l’on a du phénomène.
Mais comment tirer de l’expérience l’idée de nécessité ? Hume
explique que chaque fois que nous avons pincé ou vu pincer cette corde de cette
façon, nous avons entendu ce même son.
Par cette répétition, une habitude s’est
créée dans nos esprits, une « transition coutumière de l’imagination d’un objet à celui
qui l’accompagne habituellement ».
Une attente, une croyance et, souligne-t-il, « rien
de plus ».
Dès qu’un homme sent qu’un événement est en connexion avec un autre
dans son imagination, il sent aussi qu’il peut aisément prédire l’existence de l’un à
partir de l’apparition de l’autre.
Popper dépasse le raisonnement de Hume et propose non pas comme le fait Hume,
de sauver l’induction en en faisant un principe psychologique à la fois injustifiable
mais cependant incontestable, mais c’est de renoncer totalement au principe de
l’induction.
Pour Popper, l’esprit ne procède pas de façon inductive et c’est donc une erreur que
de croire que nous avons tendance à produire des énoncés généraux à partir de la
répétition habituelle d’événements singuliers.
Pour Popper l’esprit n’est pas passif
comme un seau qui collecte les données de l’expérience et qui imagine que cette
collection de faits singuliers correspond à une loi générale de la nature.
Au contraire
l’esprit est actif et il projette un regard toujours théorique sur l’expérience qu’il fait du
réel.
La démarche scientifique n’est donc jamais inductive : il est impossible
d’observer sans perspective théorique et il faut disposer d’une hypothèse pour diriger
le regard vers les phénomènes du réel qui seraient sans cela restés inaperçus.
Cette théorie du «projecteur » libère la démarche scientifique de l’obsession de vérité
qui a caractérisé trop souvent la recherche en sciences : les théories ne sont en fait
que des projections hypothétiques qui émanent du sujet et de son activité rationnelle,
et non pas du réel dont il fait l’expérience.
Le savant n’est pas le témoin passif qui
reçoit les leçons répétitives de l’expérience de la nature ; il est celui qui questionne le
réel à l’aide d’hypothèses théoriques qu’il a produites librement.
Dès lors, les
constructions théoriques sont des inventions rationnelles, par définition faillibles et
incertaines.
Même les « lois » que des savants comme Galilée, Newton ou Einstein
élaborent ne sont que des conjectures théoriques qui sont autant d’essais pour
organiser l’expérience que nous faisons du réel.
Les lois ne sont pas des énoncés
nécessaires et vrais : ce sont des hypothèses qui s’efforcent de décrire, d’expliquer
et de prédire les phénomènes du réel et qu’élabore une démarche théorique
audacieuse et cohérente.
Le progrès scientifique est-il possible si les....
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