Karl Heinrich MARX et la transformation du monde
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«
PRESENTATION DE "L'IDEOLOGIE ALLEMANDE" DE MARX ET ENGELS
Marx (1818-1883) est né à une époque où les fabriques envahissent l'Europe, où la colonisation bat son plein,
où Ricardo a théorisé l'économie libérale et capitaliste.
Très tôt, il décide de lutter en faveur des opprimés, plus
spécialement des ouvriers.
Expulsé de Prusse, puis de France, il s'installe à Bruxelles où il rencontre Engels
(1820-1895).
C'est là qu'ils vont rédiger en 1847 L'Idéologie allemande, manuscrits qui resteront inédits
jusqu'en 1932.
Ils forment une excellente introduction à la philosophie politique et économique de Marx, et la
situent par rapport aux penseurs de l'époque, notamment les jeunes hégéliens comme Feuerbach ou Bauer.
Les jeunes hégéliens idéalistes se présentent comme ceux qui vont libérer les masses en leur ouvrant les yeux
sur leurs représentations aliénées et aliénantes, notamment religieuses.
Or penser que l'émancipation passe par
une étude critique des représentations, c'est penser que ce qui fait problème, ce n'est pas la réalité, mais
l'idée que l'on s'en fait.
C'est penser aussi que seule la caste des penseurs éclairés peut apporter le salut.
Ne
faut-il pas, plutôt que d'examiner de façon critique des concepts, chercher réellement à bouleverser les
rapports sociaux ?
Les philosophes n'ont fait qu'interpréter diversement le monde, ce
qui importe, c'est de le transformer.
En 1845, Marx écrit les « Thèses sur Feuerbach ».
La onzième précise
que « Les philosophes n'ont fait qu'interpréter diversement le monde, ce
qui importe, c'est de le transformer ».
Contrairement à ce que prétend
une interprétation courante, il ne s'agit pas pour Marx de répudier la
philosophie et le travail de réflexion, mais de le redéfinir, et de lui donner
une nouvelle place, une nouvelle tâche.
Marx ne récuse pas la pensée,
mais sa transformation en idéologie, son éloignement de la pratique.
La onzième thèse clôt la série de note rédigées par Marx en 1845 qui
constitueront le point de départ de la rédaction, avec la collaboration
d'Engels, de l' « Idéologie allemande » (1846).
Ces thèses, qui ne sont
pas initialement destinées à la publication, paraîtront après la mort de
Marx à l'initiative de Engels, qui les présente comme un document d'une
valeur inappréciable puisque s'y trouve « déposé le germe génial de la
nouvelle conception du mode ».
Etape décisive dans la maturation de la pensée de Marx, cet ensemble
d'aphorismes, en dépit de son apparente limpidité, ne peut être compris
indépendamment de ce qui précède et de ce qui suit le moment de sa
rédaction.
Nul texte, en ce sens, ne se prête davantage au
commentaire, alors même, paradoxalement, que cette onzième thèse
semble dénier toute légitimité à l'activité d'interpréter.
Formé à l'école de la philosophie allemande, lecteur de Hegel avant de devenir émule de Feuerbach (qui est un
« matérialiste » au sens des Lumières), Marx construit sa propre compréhension du monde en « réglant ses
comptes avec sa conception philosophique antérieure ».
Le terme de « philosophie » désigne ici la représentation théorique dominante à son époque, qui fait de la
transformation des idées la condition nécessaire et suffisante de la transformation du monde.
(Ce qui constitue
une vision « idéaliste » de l'histoire et des rapports de la théorie à la pratique.)
Brocardant ceux qui possèdent « la croyance en la domination des idées », Marx leur oppose l'affirmation que «
les représentations, la pensée, le commerce intellectuel des hommes apparaissent […] comme l'émanation
directe de leur comportement matériel ».
Là gît le fond du désaccord avec Feuerbach : si celui-ci affirme bien la nécessité de faire commencer la
philosophie avec et dans la « non-philosophie », dans la vie réelle, il réduit celle-ci à l'existence individuelle
d'un homme pensé de manière abstraite, coupé des rapports sociaux (et par suite restreint à sa dimension
sensible).
L'opération critique effectuée ici par Marx consiste à redéfinir la réalité humaine.
Il s'agit de rejeter la thèse de
l'existence d'une nature humaine et de lui substituer l'analyse d'une réalité sociale complexe et structurée, où
les hommes édifient historiquement leur individualité en « produisant leurs conditions d'existence ».
Il s'agit donc de récuser une vue abstraite et éloignée du réel pour s'attacher à ce que sont les hommes
concrets et leur évolution historique.
La sixième thèse énonce que « L'essence humaine n'est pas une abstraction inhérente à l'individu pris à part,
dans sa réalité, c'est l'ensemble des rapports sociaux.
» Il ne s'agit aucunement, contrairement à ce que
maintes lectures hâtives ou prévenues affirment, de réduire l'individu aux rapports sociaux, mais d'affirmer que
l'essence humaine n'a pas la forme du sujet pensé par la psychologie.
Autrement dit, que la clé de la compréhension de la personnalité concrète ne se trouve pas dans la conscience
individuelle.
Mais, à l'inverse, celle-ci ne se détermine singulièrement que dans le cadre de rapports sociaux qui
lui préexistent et qui constituent de ce fait ses « présuppositions réelles », base de sa formation effective et
point de départ de son intelligence véritable.
On ne peut donc pas comprendre l'individu en l'isolant de la société dans laquelle il s'insère, travaille, etc.
Il
faut au contraire, pour saisir l'individu dans sa singularité, ne pas prendre pour base les illusions qu'il peut se
faire sur lui-même, en ce sens qu'il est victime des préjugés de son temps et que « les idées dominantes sont.
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