KANT: Les relations de pouvoir entre l’Etat et les citoyens
Extrait du document
«
Commentaire de texte
« De même que l'on peut dire des plantes (par exemple, des pommes de terre) et des
animaux domestiques, dans la mesure où, du point de vue de leur abondance, ils
constituent l'oeuvre de l'homme, qu'on est en droit de les utiliser, de les exploiter et de les
consommer (de les faire abattre), de même, semble-t-il, on pourrait dire aussi du pouvoir
suprême de l'État, du souverain, qu'il a le droit de mener ses sujets, qui sont, pour la plus
grande part, son propre produit, à la guerre comme à une chasse et à une bataille rangée
comme à une partie de plaisir.
En fait, ce principe juridique possède certes une validité en
ce qui concerne les animaux, lesquels peuvent être une propriété de l'homme, mais ne peut
en revanche en aucune manière s'appliquer à l'homme, notamment en tant que citoyen,
lequel doit toujours être considéré dans l'État comme un membre qui participe à l'activité législatrice (non seulement
comme moyen, mais en même temps aussi comme fin en soi) et doit donc donner son libre consentement, par
l'intermédiaire de ses représentants, non seulement à la guerre en général, mais aussi à chaque déclaration de guerre
particulière - condition limitative sous laquelle seulement l'État peut disposer de lui pour ce périlleux service.
» KANT
Suggestion d’analyse
Introduction :
Le texte de Kant est construit sur une analogie : il établit une comparaison entre le pouvoir que l’homme est
susceptible d’exercer sur les animaux ou les plantes et le pouvoir que l’Etat est capable d’avoir sur les hommes.
L’ensemble de l’analyse consiste donc à nuancer cette apparente similitude de fonctionnement.
Développement :
Le passage commence par une exposition très imagée, créant ainsi l’impression que l’on va examiner des situations très
concrètes.
Il s’agit d’un procédé qui tente de partir de constats immédiats, relevant du sens commun, mais bientôt l’on
comprend que cet appui n’est que le moyen de faire comprendre combien les ressemblances entre les situations sont
artificieuses.
Si les animaux domestiques sont propriété de l’homme, non parce qu’ils ne s’appartiennent pas mais
parce qu’ils ont été entièrement « créés » par l’homme pour sa propre satisfaction, on ne peut faire le même
rapprochement en ce qui concerne les hommes au sein d’un Etat.
Tout d’abord ce principe de propriété est annulé par
le fait que l’Etat ne peut posséder un individu sans son plein gré.
L’animal ou même la plante étant dépourvu du
langage n’a pas moyen d’exprimer un mécontentement ou un rejet, ainsi la propriété se fait presque automatiquement
puisqu’elle ne pose pas de question, elle s’impose à l’animal de fait.
Mais si l’homme n’appartient pas à un Etat en droit n’y appartient-il pas en fait ?
La différence majeure qui se creuse entre la condition de l’animal domestique et celle de l’homme dans une société
c’est que l’homme est par définition citoyen, et la citoyenneté impose une participation de l’homme à la vie de l’Etat.
Par conséquent rien ne peut lui être imposé puisqu’il fait partie même de l’Etat, il décide dans et pour l’Etat.
Cependant Kant, pose une limite à l’indépendance de l’individu face à l’Etat puisqu’en temps de guerre ou de
déclaration de guerre le citoyen a l’obligation, indiscutable, de défendre sa patrie et un refus quel qu’il soit peut
pousser jusqu’à l’expatriation.
Mais même si dans un cas comme celui-là on pourrait tenter de souligner une certaine
appartenance il faudra toujours souligner que c’est le citoyen lui-même qui par ses représentants a choisi son Etat, il
doit donc lui correspondre et chaque décision prise par les gouvernants doit lui paraître satisfaisante puisqu’il a choisi
ces mêmes gouvernants.
Ainsi l’Etat ne peut pas disposer des citoyens puisque ce sont les citoyens qui disposent de
l’État.
Conclusion :
Les relations de pouvoir entre l’Etat et les citoyens qui le composent sont des relations réciproques, il ne peut donc
être question de parler de possession de l’individu au même titre que l’on peut parler pour l’individu de la possession de
tel ou tel bien..
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