KANT: les 3 ignorances
Extrait du document
«
"L'ignorance peut être ou bien savante, scientifique, ou bien vulgaire.
Celui qui voit distinctement les limites de la connaissance, par
conséquent le champ de l'ignorance, à partir d'où il commence à s'étendre, par exemple le philosophe qui aperçoit et montre à quoi se
limite notre capacité de savoir relatif à la structure de l'or, faute de données requises à cet effet, est ignorant de façon technique ou
savante.
Au contraire, celui qui est ignorant sans apercevoir les raisons des limites de l'ignorance et sans s'en inquiéter est ignorant
de façon non savante.
Un tel homme ne sait même pas qu'il ne sait rien.
Car il est impossible d'avoir la représentation de son
ignorance autrement que par la science ; tout comme un aveugle ne peut se représenter l'obscurité avant d'avoir recouvré la vue.
Ainsi la connaissance de notre ignorance suppose que nous ayons la science et du même coup nous rend modeste, alors qu'au
contraire s'imaginer savoir gonfle la vanité." KANT.
L’ignorance a été l’un des premiers problèmes de la philosophie.
La figure de Socrate en est bien sûr la plus grande représentante.
Socrate, selon l’oracle de Delphes est le plus savant de tous les hommes, alors qu’il ne cessé de répéter « tout ce que je sais, c’est
que je ne sais rien ».
Le présent texte propose de réfléchir sur l’ignorance mais aussi sur les limites de la connaissance.
C eci est un
grand thème kantien.
Le philosophe s’était fixé pour but de répondre à la question : « que puis-je savoir ? » Et ces différentes
critiques sont des études visant à déterminer les limites de la connaissance.
La question de l’ignorance est très importante
puisqu’elle contient en creux la possibilité du savoir et du vrai.
Kant affirme qu’il existe deux ignorances.
Mais quelles sont leur
différence ? Peut-on savoir tout en étant ignorant ? Quelle doit être l’attitude l’homme qui cherche réellement la vérité ?
L’ignorance peut être une ignorance consciente et déterminée
Kant distingue premièrement la figure de l’ignorance « scientifique ».
Le rapprochement des deux mots peut tout d’abord étonné.
En effet, généralement
l’ignorance s’oppose à la science.
Mais l’auteur s’explique assez clairement.
L’homme de science, quand il connaît quelque chose, arrive à voir quel est le
domaine qu’il connaît et le domaine qu’il ne peut connaître.
Ainsi, par exemple, Kant a étudié les structures de notre pensée : il a mis au jour les formes a
priori( avant toutes expériences) de notre entendement qui sont le temps et l’espace.
En connaissant ces formes, il a pu dire que nous ne pouvons connaître le
monde au-delà des formes de réception qui sont subjectives.
Il a ainsi fixé le domaine d’ignorance en étudiant le fonctionnement de l’esprit humain.
De même,
quelqu’un qui étudie l’univers sait qu’il ne peut pas savoir les limites de l’univers et ce qui se trouve au-delà du domaine observable.
- Cet homme ne prétend pas savoir, ce qu’il ne sait pas.
Dans le domaine de l’ignorance qu’il a délimité, il ne peut que se taire.
C’est pour cela que Kant parle
de modestie.
Si nous connaissons quelque chose, nous savons que notre savoir est restreint et que nous connaissons telle chose mais pas telle autre.
Audelà de ce qu’il sait, il suspend son jugement, n’affirme plus rien.
Dès lors, connaître véritablement, c’est connaître que l’on ne sait pas tout, c’est savoir que
notre connaissance est partielle.
L’ignorance vulgaire ne se sait pas ignorante
- Kant voit la distinction entre les deux ignorances dans le fait que l’une se sait ignorante alors que l’autre l’ignore.
« Un tel homme ne sait même pas qu’il ne
sait rien ».
On retrouve ici une situation déjà expérimentée par Socrate.
Il s’adresse à des gens qui affirment avoir un savoir et pourtant, il se rend compte
qu’ils ne savent pas plus que lui.
- L’une des raisons de l’ignorance est qu’elle se prend pour la vérité.
Du coup, les hommes ignorants ne cherchent pas à connaître la vérité, à posséder la
connaissance puisqu’ils sont déjà persuadés de la posséder.
Pourquoi chercher si on est persuadé avoir déjà la réponse ? Platon dans son œuvre affirme en
effet que pour philosopher et chercher la vérité, il faut savoir que l’on ne sait pas, que l’on est imparfait.
C’est pour cela que seuls, les hommes philosophes :
les dieux possèdent la connaissance et n’ont pas besoin de la chercher et les animaux n’ont pas conscience de leur ignorance et ne peuvent pas non plus
philosopher.
- Par suite, l’ignorant ne peut pas savoir quelles sont les limites de son ignorance, puisque pour lui toutes ses idées sont au même niveau, toutes ses idées
ont la même certitude.
On retrouve ici le thème de la croyance qui accordent foi à des rumeurs, à des thèses sans chercher à les éprouver et à vérifier leurs
validité.
Il s’agit ici d’une attitude naïve et irréfléchie.
L’ignorance vulgaire est le propre d’un esprit fermé, qui affirme dogmatiquement son « opinion » et qui a
souvent recours à la violence.
La prise de conscience de l’ignorance passe par la science et fonde sa possibilité
- dés lors, pour prendre conscience de son ignorance, il faut forcément s’engager sur le chemin de la science.
Kant prend ici comme exemple l’aveugle.
C e
dernier peut-il se rendre compte ce qu’est le manque de vision, de lumière s’il n’a pas fait une fois l’expérience de voir ? Pour Kant, la réponse est négative, il
ne l’explique pas davantage.
Mais c’est que la figure de l’aveugle a été très importante pour les années précédant la philosophie de Kant.
A insi, par exemple,
Diderot dans sa lettre sur les aveugles, rapporte comment les aveugles peuvent se représenter la vue.
Or, ils ne peuvent pas comprendre la lumière qui est
spécifique à la vue.
Dès lors, pour qu’un aveugle comprenne l’obscurité, il faut qu’il est déjà vu le jour.
La comparaison montre que pour s’apercevoir de son
ignorance, il faut avoir eu l’expérience de savoir quelque chose.
- L’ignorance « savante » est en fait cruciale, elle fonde le point de départ de la science.
Elle est le point par lequel la science peut évoluer et augmenter sa
connaissance.
En effet les problèmes scientifiques ne se posent pas sur ce que l’on sait mais se penche sur ce que l’on ne sait pas.
Or, comme l’ignorance
savante a pu fixer précisément le domaine de l’ignorance concernant un objet, elle nous donne la direction mais aussi les termes du problème.
Ainsi le
philosophe pris en exemple par Kant sait que son ignorance concernant la structure de l’or vient du manque de données qu’il peut avoir.
Dès lors, ce qu’il faut
chercher, c’est comment obtenir ces données, quelles méthodes mettre en place.
Dans l’autre sens, Kant en fixant l’ignorance du monde en-soi( c’est-à-dire
tel qu’il est lui-même au-delà de la perception humaine), a évité des efforts improductifs et a recentré les recherches sur ce qu’on peut savoir.
- C e qui ressort de ce texte, c’est une conception de la connaissance.
C elle-ci n’est pas quelque chose d’innée ou de donnée mais elle s’apprend.
Nous ne
pouvons pas l’acquérir sans la conscience qu’avant nous ne savions pas.
C ’est-à-dire que les connaissances des limites de notre connaissance sont la
condition nécessaire à la recherche de la vérité.
Sans ses bornes, il n’y aurait pas de connaissance, pas de progrès de la connaissance.
C onnaître, ce n’est
pas posséder une vérité figée mais toujours rechercher le vrai davantage.
Dans ce texte, Kant met en évidence l’utilité et la nécessité d’une ignorance savante et les dangers d’une ignorance vulgaire.
C ette dernière amène l’homme à
affirmer sans réellement savoir, à être dogmatique et vaniteux alors que l’ignorance scientifique permet à l’homme de sans cesse s’améliorer en fondant la
recherche mais aussi d’adopter une attitude ouverte et modeste face au monde.
Kant est le premier à avoir autant insister sur l’étude des conditions de la
connaissance qu’il nomme philosophie transcendantale.
La critique propose de réfléchir sur les possibilités de la connaissance et ainsi récuser ou légitimer les
connaissances que nous possédons.
En définitive, fonder les limites du savoir et de l’ignorance est la base de la philosophie de Kant, qui selon permettra à la
philosophie de ne pas s’épuiser en vains conflits, sans tomber dans le scepticisme.
Second corrigé: http://www.devoir-de-philosophie.com/passup-themes-3889b.html.
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