KANT
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«
[Introduction]
Les débats renaissent périodiquement pour savoir si nous sommes libres ou si nous n'en
avons que l'impression.
Kant propose ici un critère simple permettant de vérifier que la
liberté est bien présente en nous : il suffit d'examiner la conscience du devoir et ce qu'elle
nous révèle.
[I.
On suspend aisément un penchant]
a.
Le premier exemple esquissé par Kant indique que le plaisir ne constitue pas pour
l'homme une obligation véritable : un homme qui affirme ne pouvoir y résister s'en montre
en fait très capable en fonction des circonstances.
b.
La volonté, ou la simple prudence, est donc ici plus forte que l'impulsion lorsque c'est la
vie du sujet qui se trouve en jeu.
c.
Le plaisir qui nous met en relation avec un objet extérieur, peut ainsi être différé par un
principe interne de l'individu, que l'on peut repérer comme participant de sa capacité à
juger ou de sa raison ; et il n'y a même pas à proprement parler conflit entre les deux, tant la solution semble rapide.
[II.
La loi morale ne souffre pas d'être oubliée]
a.
D'une tout autre orientation est la seconde situation évoquée : l'individu n'y est plus attentif à son corps et à ses
satisfaction sensibles, il est soumis à un ordre.
Et cet ordre venant de l'extérieur paraît d'autant plus respectable qu'il
s'accompagne d'une menace sur la vie même du sujet en cas de désobéissance.
b.
Mais l'ordre concerne un faux témoignage à porter contre un honnête homme : mensonge et injustice.
c.
Cette fois il ne s'agit plus d'opposer satisfaction et conservation de sa vie, le choix est entre conserver sa vie au
prix d'une injustice et la perte d'autrui.
Est-il possible que, dans ce cas, le sujet arrive à « vaincre son amour pour la
vie » (alors que, dans le premier exemple, c'est celui-ci qui l'emportait évidemment) ?
d.
C'est, dit Kant, possible.
Sans doute l'individu sera-t-il partagé entre son devoir et son amour de la vie (« il n'osera
peut-être assurer qu'il le ferait ou qu'il ne le ferait pas »).
mais le fait qu'il ne choisisse pas simplement, comme dans le
premier cas, de sauver sa vie, suffit à indiquer qu'il perçoit, contre le pouvoir extérieur, une puissance interne qui est
celle du devoir.
[III.
Loi morale et liberté]
a.
C'est ainsi la conscience de ce que l'on doit faire qui me permet d'affirmer une liberté.
Celle-ci n'est pas seulement
capacité de résister à la pression de l'extérieur, elle est, plus radicalement, ouverture d'une possibilité autre que celle
déterminée par ce pouvoir extérieur.
La liberté oppose à l'obéissance mécanique, suscitée par la peur de mourir, un
autre choix : elle échappe à la stricte contrainte en formulant ce qui lui est supérieur — l'obligation relative à la loi.
b.
Le paradoxe apparent est donc que la liberté se fait connaître en passant par la formulation de lois.
Kant retrouve
en morale une formulation qui était celle, plus politique, de Rousseau : la véritable liberté est l'obéissance à la loi qu'on
s'est prescrite.
Il ne s'agit donc pas de reconnaître la liberté dans des lois venant de l'extérieur de ma raison (celles de
mes satisfactions sensibles : le plaisir, ou celle d'un pouvoir en place qui me menace).
C'est au contraire parce que la
loi morale est inscrite dans ma conscience qu'elle me permet de comprendre sa relation avec ma liberté.
c.
On doit dès lors admettre que tout homme ayant la conscience de ce qu'il doit faire bénéficie en lui de la liberté, et,
s'il est vrai que la conscience du devoir peut être universelle, la liberté est un bien pour l'humanité dans son ensemble.
[Conclusion]
La situation morale, selon Kant, fait affleurer notre liberté ; mais celle-ci n'en reste pas moins de nature proprement
métaphysique.
On la saisit dans la conscience du devoir, mais on ne peut, au sens strict, démontrer son existence.
C'est précisément parce que les arguments logiques que l'on peut énoncer en sa faveur sont aisément équilibrés par
des contre-arguments qu'il reste à la saisir lorsqu'elle émerge en nous, incontestable, à l'occasion de ce qui nous
permet de résoudre tout conflit moral.
KANT (Emmanuel).
Né et mort à Königsberg (1724-1804).
Fils d'un sellier d'origine écossaise, il fit ses études à
l'Université de Königsberg, et s'intéressa davantage à la physique et à la philosophie qu'à la théologie.
En 1755, il est.
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