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KANT

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Newton pouvait non seulement pour lui, mais pour tout autre, décrire clairement, et déterminer pour ses successeurs, les démarches qu'il eut à faire depuis les premiers éléments de la géométrie jusqu'à ses grandes et profondes découvertes ; mais aucun Homère, aucun Wieland ne pourrait montrer comment ses idées riches en poésie et pourtant lourdes de pensées surgissent et s'assemblent dans son cerveau, car lui-même ne le sait pas et il ne peut donc l'enseigner à un autre. En matière de science par conséquent il n'y a entre le plus grand inventeur et l'imitateur, l'apprenti le plus laborieux, qu'une différence de degrés, mais il y a une différence spécifique entre lui et celui que la nature a doué pour les beaux-arts ; on ne veut pas pourtant diminuer ces grands hommes auxquels l'humanité doit tout, par rapport à ceux qui par leur talent pour les beaux-arts sont des favoris de la nature. Le talent des premiers consiste à faire progresser toujours davantage les connaissances, et les avantages pratiques qui en dépendent, comme à instruire les autres dans ces mêmes connaissances et c'est là une grande supériorité sur ceux qui méritent l'honneur d'être appelés des génies ; pour ceux-ci l'art s'arrête quelque part ; il a ses limites qu'il ne peut dépasser, qu'il a sans doute atteintes depuis longtemps et qui ne peuvent plus être reculées ; de plus une telle maîtrise ne peut se communiquer, elle est dispensée directement à chacun par la main de la nature ; elle disparaît donc avec l'un jusqu'à ce que la nature confère à un autre les mêmes dons ; et il ne reste plus à celui-ci que d'avoir un modèle pour laisser se manifester de semblable manière le talent dont il a conscience. KANT

« « Newton pouvait non seulement pour lui, mais pour tout autre, décrire clairement, et déterminer pour ses successeurs, les démarches qu'il eut à faire depuis les premiers éléments de la géométrie jusqu'à ses grandes et profondes découvertes ; mais aucun Homère, aucun Wieland ne pourrait montrer comment ses idées riches en poésie et pourtant lourdes de pensées surgissent et s'assemblent dans son cerveau, car lui-même ne le sait pas et il ne peut donc l'enseigner à un autre.

En matière de science par conséquent il n'y a entre le plus grand inventeur et l'imitateur, l'apprenti le plus laborieux, qu'une différence de degrés, mais il y a une différence spécifique entre lui et celui que la nature a doué pour les beaux-arts ; on ne veut pas pourtant diminuer ces grands hommes auxquels l'humanité doit tout, par rapport à ceux qui par leur talent pour les beaux-arts sont des favoris de la nature.

Le talent des premiers consiste à faire progresser toujours davantage les connaissances, et les avantages pratiques qui en dépendent, comme à instruire les autres dans ces mêmes connaissances et c'est là une grande supériorité sur ceux qui méritent l'honneur d'être appelés des génies ; pour ceux-ci l'art s'arrête quelque part ; il a ses limites qu'il ne peut dépasser, qu'il a sans doute atteintes depuis longtemps et qui ne peuvent plus être reculées ; de plus une telle maîtrise ne peut se communiquer, elle est dispensée directement à chacun par la main de la nature ; elle disparaît donc avec l'un jusqu'à ce que la nature confère à un autre les mêmes dons ; et il ne reste plus à celui-ci que d'avoir un modèle pour laisser se manifester de semblable manière le talent dont il a conscience.

» Analyse thématique succincte du texte On peut organiser le relevé des thèmes du texte à partir d'une première lecture, permettant d'identifier le propos de l'auteur, son objet : il s'agit ici de rendre compte de la différence qui existe entre l'activité scientifique et l'activité artistique au niveau même de la conscience qu'en prennent les hommes, artistes ou savants. • Premier thème (présenté à travers un exemple) : la possibilité pour un savant de rendre compte de ses propres démarches.

Newton. • Deuxième thème (présenté lui aussi à travers un exemple, placé en parallèle avec le premier) : l'impossibilité pour un poète de rendre compte des modalités de son activité créatrice.

Homère. • Troisième thème (explicitant pour la science la spécificité qui vient d'être définie) : l'absence d'opposition de nature entre « le plus grand inventeur » et « l'imitateur ». • Quatrième thème (développant pour l'art les conséquences de ce qui vient d'être dit) : la différence spécifique entre l'artiste-génie et l'imitateur. • Cinquième thème : refus d'établir une hiérarchie entre savants et artistes, dont on se borne à constater les différences. • Sixième thème : illustration de ce refus, par l'évocation de l'apport des savants à l'humanité. • Septième thème : reprise de la caractérisation comparative du génie artistique, notamment en ce qui concerne la négation de l'idée même d'un progrès en art. • Huitième thème : l'intransmissibilité du génie artistique. • Neuvième thème : le rôle catalyseur de l'imitation dans l'émergence d'un nouveau génie artistique. Formulation de la thèse générale du texte Le recensement thématique permet une définition assez aisée des moments du texte et de leurs articulations.

On aura noté l'importance du parallélisme effectué par Kant, et le rôle des caractérisations successives de la science et de l'art.

On aura remarqué aussi que la réflexion comparative ne porte pas tant sur la nature des activités en question que sur les données de leur genèse et de leur statut anthropologique.

Le travail de formulation de la thèse consistera à dégager l'idée générale susceptible de rendre compte au mieux des différents thèmes, et de leur agencement. Contrairement à la science, l'activité artistique ne peut faire l'objet d'aucune explication de ses modalités de production, ni par conséquent d'aucune transmission effective de la disposition qui lui correspond (le fameux « don » de la nature qui définit le génie).. »

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