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KANT

Extrait du document

Considérons les hommes tendant à réaliser leurs aspirations : ils ne suivent pas simplement leurs instincts comme les animaux ; ils n'agissent pas non plus cependant comme des citoyens raisonnables du monde selon un plan déterminé dans ses grandes lignes. Aussi une histoire ordonnée (comme par exemple celle des abeilles ou des castors) ne semble pas possible en ce qui les concerne. On ne peut se défendre d'une certaine humeur, quand on regarde la présentation de leurs faits et gestes sur la grande scène du monde, et quand, de-ci de-là, à côté de quelques manifestations de sagesse pour des cas individuels, on ne voit en fin de compte dans l'ensemble qu'un tissu de folie, de vanité puérile, souvent aussi de méchanceté puérile et de soif de destruction. Si bien que, à la fin, on ne sait plus quel concept on doit se faire de notre espèce si infatuée de sa supériorité. Le philosophe ne peut tirer de là aucune autre indication que la suivante : puisqu'il lui est impossible de présupposer dans l'ensemble chez les hommes et dans le jeu de leur conduite le moindre dessein raisonnable personnel, il lui faut rechercher du moins si on ne peut pas découvrir dans ce cours absurde des choses humaines un dessein de la nature : ceci rendrait du moins possible, à propos de créatures qui se conduisent sans suivre de plan personnel, une histoire conforme à un plan déterminé de la nature. KANT

« "Considérons les hommes tendant à réaliser leurs aspirations : ils ne suivent pas simplement leurs instincts comme les animaux ; ils n'agissent pas non plus cependant comme des citoyens raisonnables du monde selon un plan déterminé dans ses grandes lignes.

Aussi une histoire ordonnée (comme par exemple celle des abeilles ou des castors) ne semble pas possible en ce qui les concerne.

On ne peut se défendre d'une certaine humeur, quand on regarde la présentation de leurs faits et gestes sur la grande scène du monde, et quand, de-ci de-là, à côté de quelques manifestations de sagesse pour des cas individuels, on ne voit en fin de compte dans l'ensemble qu'un tissu de folie, de vanité puérile, souvent aussi de méchanceté puérile et de soif de destruction.

Si bien que, à la fin, on ne sait plus quel concept on doit se faire de notre espèce si infatuée de sa supériorité.

Le philosophe ne peut tirer de là aucune autre indication que la suivante : puisqu'il lui est impossible de présupposer dans l'ensemble chez les hommes et dans le jeu de leur conduite le moindre dessein raisonnable personnel, il lui faut rechercher du moins si on ne peut pas découvrir dans ce cours absurde des choses humaines un dessein de la nature : ceci rendrait du moins possible, à propos de créatures qui se conduisent sans suivre de plan personnel, une histoire conforme à un plan déterminé de la nature." KANT Ce texte est extrait de l'opuscule "Idée d'une histoire universelle au point de vue cosmopolite" qui date de 1784. Définitions des termes importants du texte: instinct: activité transmise héréditairement et caractérisée par un savoir-faire inné. citoyen raisonnable: individu membre du corps politique et agissant conformément à la raison, à la faculté universelle de distinguer le vrai du faux. histoire ordonnée: devenir orienté des événements, ensemble structuré se présentant selon la forme ou la disposition de la raison. concept: représentation abstraite dessein raisonnable: idée que l'on forme, projet, intention, conformes à la raison. nature: ici, non pas ensemble mécaniquement déterminé, mais tout finalisé; enchaînement des phénomènes révélant un grand dessein. Structuration du texte: A) "Considérons les hommes tendant à réaliser leurs aspirations : ils ne suivent pas simplement leurs instincts comme les animaux ; ils n'agissent pas non plus cependant comme des citoyens raisonnables du monde selon un plan déterminé dans ses grandes lignes.

Aussi une histoire ordonnée (comme par exemple celle des abeilles ou des castors) ne semble pas possible en ce qui les concerne.

On ne peut se défendre d'une certaine humeur, quand on regarde la présentation de leurs faits et gestes sur la grande scène du monde, et quand, de-ci de-là, à côté de quelques manifestations de sagesse pour des cas individuels, on ne voit en fin de compte dans l'ensemble qu'un tissu de folie, de vanité puérile, souvent aussi de méchanceté puérile et de soif de destruction.

Si bien que, à la fin, on ne sait plus quel concept on doit se faire de notre espèce si infatuée de sa supériorité." : Les hommes n'obéissent pas à un dessein raisonnable: leur action est un tissu de folie. a) "Considérons les hommes tendant à réaliser leurs aspirations : ils ne suivent pas simplement leurs instincts comme les animaux ; ils n'agissent pas non plus cependant comme des citoyens raisonnables du monde selon un plan déterminé dans ses grandes lignes.": L'action des hommes ne se présente pas comme celle de citoyens raisonnables. b) "Aussi une histoire ordonnée (comme par exemple celle des abeilles ou des castors) ne semble pas possible en ce qui les concerne.

On ne peut se défendre d'une certaine humeur, quand on regarde la présentation de leurs faits et gestes sur la grande scène du monde, et quand, de-ci de-là, à côté de quelques manifestations de sagesse pour des cas individuels, on ne voit en fin de compte dans l'ensemble qu'un tissu de folie, de vanité puérile, souvent aussi de méchanceté puérile et de soif de destruction.": Comment donc dégager une histoire ordonnée à partir de ce tissu de folie qu'est l'ensemble humain ? c) "Si bien que, à la fin, on ne sait plus quel concept on doit se faire de notre espèce si infatuée de sa supériorité.": A quel concept de notre espèce humaine pouvons-nous donc accéder ? B) "Le philosophe ne peut tirer de là aucune autre indication que la suivante : puisqu'il lui est impossible de présupposer dans l'ensemble chez les hommes et dans le jeu de leur conduite le moindre dessein raisonnable personnel, il lui faut rechercher du moins si on ne peut pas découvrir dans ce cours absurde des choses humaines un dessein de la nature : ceci rendrait du moins possible, à propos de créatures qui se conduisent sans suivre de plan personnel, une histoire conforme à un plan déterminé de la nature.": Le philosophe s'orientera donc vers l'idée d'un dessein de la nature, à défaut de tout dessein personnel raisonnable. Idée directrice du texte: Si l'on ne peut dégager un ordre du tissu de folie qu'est l'histoire humaine, néanmoins, le philosophe restera attaché à l'idée d'un plan caché de la nature. Le problème soulevé est celui de savoir si l'on peut parvenir à une unification historique, de manière à dépasser ces actions humaines disparates qui ne sont qu'un tissu de folie ou une expression de l'agressivité. Quel est l'enjeu du texte ? Si un dessein de la nature peut être finalement postulé par le philosophe, alors cette idée nous conduira finalement à une philosophie de l'histoire et nous serons en possession d'un fil conducteur pour rendre compte des actions des hommes. L'intérêt philosophique du texte découle de son enjeu.

Ce texte a l'intérêt de nous conduire aux portes d'une philosophie de l'histoire et donc d'intelligibiliser l'assemblage hétérogène des actions humaines.. »

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