KANT
Extrait du document
«
VOCABULAIRE:
EMPIRIQUE (adj.): Qui découle de l’expérience ou qui ne se règle que sur elle.
Le savoir
empirique découle largement de l’habitude, qui lui permet de repérer des régularités dans
l’expérience (par exemple, telle plante soulage toujours telle douleur).
Ce savoir s’obtient
par tâtonnements, par essais et erreurs, mais ce n’est pourtant pas un savoir scientifique
ou expérimental.
En effet, il ne sait pas vraiment expliquer ce qu’il observe, il ignore les
causalités réellement agissantes (par exemple, l’action physique-chimique de la plante dans
l’organisme).
A priori: Ce qui précède l’expérience, et n’est tiré que de l’esprit ou de la raison.
Chez Kant, les formes a priori de la sensibilité (l’espace et le temps) et de l’entendement
(les catégories) rendent possible l’expérience (l’a priori est ici transcendantal).
Les marques
de l’a priori sont l’universalité et la nécessité.
L’expérience, quant à elle, n’offre que des
généralisations et du contingent.
Dans la Critique de la Raison pure, Kant s'interroge sur l'essence de la connaissance humaine et montre qu'elle suppose
le jeu de deux facultés du sujet : l'entendement et la sensibilité' : « l y a deux souches de la connaissance humaine,
qui partent peut-être d'une racine commune mais inconnue de nous, à savoir la sensibilité et l'entendement; par la
première les objets nous sont donnés, par la seconde ils sont pensés ».
Leur union seule peut déterminer en nous des
objets.
L'unité de l'objet renvoie donc à deux facultés du sujet.
Dans cette étude des conditions de possibilité de la connaissance humaine, Kant découvre, comme condition de toute
expérience possible, l'unité transcendantale de la conscience de soi.
l n'y a pas de représentation sans conscience qui
serait une représentation sans rapport au sujet.
Le rapport au sujet est présent dans toute représentation; il est
nécessaire à toute représentation pour qu'elle soit telle.
Toute liaison d'une diversité (conceptuelle ou sensible) ne
saurait être le fait que de la spontanéité de l'entendement et en aucun cas de la sensibilité.
En effet, la liaison du
divers suppose un acte qui ne peut, en tant que tel, être le fait de la sensibilité dont la nature est réceptivité.
Pour se
représenter l' unité du divers, l'entendement est obligé d'en opérer la synthèse.
Cette opération est le fait d'une
fonction active de l'esprit à laquelle Kant donne le nom d'aperception originaire ou aperception pure.
C'est le « Je
pense ».
Kant montre dans le texte qui suit comment elle est une condition nécessaire de mes représentations, un
requisit fondamental.
Toute représentation suppose la conscience, car autrement elle ne serait rien pour moi.
Ainsi non
seulement le je pense doit accompagner toutes mes représentations, mais il faut encore, pour qu'elles soient bien mes
représentations, que ce je pense demeure le même quand ces représentations se succèdent.
Sinon, au lieu d'une
conscience identique, j'aurais « un moi aussi divers et bigarré que j'ai de représentations dont j'aie conscience ».
Toutes nos représentations supposent cette relation à une conscience identique, même si celle-ci est plus souvent
implicite qu'explicite.
Cette conscience pure, originaire, ce je pense qui accompagne toutes mes représentations est en
même temps ce qui les rend possibles par l'unification et la liaison du divers.
L'aperception rend possible par là même
non seulement la connaissance de l'objet (qui sans elle ne serait qu'une diversité), mais aussi la conscience du moi
comme telle : cette puissance d'unification ne devient consciente que quand elle entre en fonction.
C'est seulement
dans l'exercice de sa fonction de synthèse que le moi peut se saisir identique à lui-même dans cette activité de liaison.
Kant donne aussi à cette activité le nom d'aperception transcendantale, pour bien marquer qu'elle est la condition a
priori de possibilité de la connaissance.
Par elle se trouve posée l'unité de la conscience à travers ses représentations
et déterminée par là l'unité de l'objet représenté.
Sans cette unité originairement synthétique de l'aperception, aucune
représentation ne serait possible.
C'est pourquoi Kant la considère comme le point de vue le plus élevé de toute la
philosophie transcendantale.
ll faut toutefois remarquer que l'unité synthétique de l'aperception est rendue nécessaire pour un entendement qui
reçoit de l'extérieur, au moyen de la sensibilité, le divers à penser.
Elle n'est donc pas le fait de tout être pensant en
général : un entendement divin qui produit lui-même le divers qu'il unifie n'en aurait nul besoin.
C'est le caractère non
lié de l'intuition humaine sensible qui rend nécessaire un acte particulier de la synthèse.
Pour résumer ce qui vient d'être dit : toute synthèse d'une diversité suppose un acte conscient d'unification.
Cet acte
est l'aperception pure et conditionne a priori l'identité de la conscience dans le temps et l'unité de l'objet représenté.
Kant nous conduit ainsi à une théorie originale de l'objet.
Bien loin que l'objet soit ce sur quoi la connaissance doit se
régler (philosophie précritique), les objets sont réglés par notre pouvoir de connaître.
Nous voyons bien ici ce que Kant
entend quand il considère qu'il opère en philosophie une révolution copernicienne.
Alors qu'ordinairement on tient l'objet
pour la source de la connaissance et la cause de ses caractéristiques, c'est pour Kant le sujet (sujet universel et non
empirique) qui constitue l'objet.
L'objet est en réalité construit par le moi transcendantal, lequel est au-delà du divers
sensible dont il conditionne la synthèse.
On peut donc voir dans ce texte essentiel l'affirmation capitale d'un pouvoir constitutif du sujet et dans la philosophie
de Kant une philosophie de la conscience et du sujet.
"Le Je pense doit pouvoir accompagner toutes mes représentations; car, sinon, quelque chose serait représenté en moi
qui ne pourrait pas du tout être pensé, ce qui revient à dire que la représentation serait impossible, ou, du moins,
qu'elle ne serait rien pour moi.
Une telle représentation, qui peut être donnée avant toute pensée (Denken), s'appelle
intuition.
Donc tout divers de l'intuition a un rapport nécessaire au Je pense dans ce même sujet où ce divers se rencontre.
Mais.
»
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