Imaginons que vous soyez bibliothécaire et qu'un lecteur dans l'embarras vous demande de lui indiquer un « bon livre». Quels seraient les critères qui vous permettraient de le conseiller ? Evitez de faire un catalogue d'oeuvres et de rester dans le vague
Extrait du document
En tant que bibliothécaire, Monsieur, je me permettrai de vous indiquer ce qu'est, d'après un jugement qui m'est strictement personnel, un «bon livre». Mais permettez-moi avant tout de vous demander dans quels domaines vont vos préférences : aventure, roman, biographie, étude scientifique ? Il existe, en effet, de nos jours, une grande diversité dans les matières. Les éditeurs publient de tout, depuis les ouvrages traitant des fouilles archéologiques jusqu'aux autobiographies de telle ou telle personnalité de la télévision. Comme tout lecteur, vous possédez, je n'en doute pas, vos préférences, vos goûts particuliers. Avec quelques critères de mon choix, nous allons très certainement découvrir le livre qui vous conviendra : un contenu sérieux et un style plaisant et votre soirée sera, je le pense, captivée par ce petit chef-d'œuvre encore caché dans mes rayons.
«
Imaginons que vous soyez bibliothécaire et qu'un lecteur dans l'embarras vous demande de lui indiquer un « bon livre».
Quels seraient les critères qui vous permettraient de le conseiller ?
Evitez de faire un catalogue d'oeuvres et de rester dans le vague : soyez précis, exprimez-vous en fonction de vos
expériences de lecteur et de vos goûts.
En tant que bibliothécaire, Monsieur, je me permettrai de vous indiquer ce qu'est, d'après un jugement qui m'est
strictement personnel, un «bon livre».
Mais permettez-moi avant tout de vous demander dans quels domaines vont vos
préférences : aventure, roman, biographie, étude scientifique ? Il existe, en effet, de nos jours, une grande diversité dans
les matières.
Les éditeurs publient de tout, depuis les ouvrages traitant des fouilles archéologiques jusqu'aux
autobiographies de telle ou telle personnalité de la télévision.
Comme tout lecteur, vous possédez, je n'en doute pas, vos
préférences, vos goûts particuliers.
Avec quelques critères de mon choix, nous allons très certainement découvrir le livre
qui vous conviendra : un contenu sérieux et un style plaisant et votre soirée sera, je le pense, captivée par ce petit chefd'œuvre encore caché dans mes rayons.
Les pages d'un « bon livre » doivent, en priorité, renfermer un sujet intéressant et si possible passionnant.
Un bon éditeur
se doit de déceler parmi les milliers de manuscrits qui s'accumulent sur son bureau, les intrigues les plus captivantes et les
plus originales pour les romans policiers et les autres livres d'aventures.
N'est-ce pas dans son intérêt de choisir les
meilleures afin qu'elles deviennent populaires et soient lues de tous ? Joseph Kessel, l'un de nos grands romanciers
contemporains, doit, me semble-t-il, sa popularité et sa carrière à
l'originalité de ses œuvres.
Le lecteur est sans cesse tenu en haleine par l'évolution de l'histoire même, ses
rebondissements, ses renversements de situation.
Ajoutons à ceci une grande sensibilité et nous obtenons un très grand
roman tel que Le Lion...
pour les amateurs du genre, bien sûr!
Mais le problème le plus important est la réflexion du lecteur.
Un « bon livre » doit amener celui qui le lit à réfléchir sur les
différents thèmes posés par l'auteur.
La richesse d'un livre vient essentiellement des problèmes divers qu'il soulève.
Nombreux sont les romans beaucoup trop superficiels que l'on parcourt sans grand intérêt et que l'on oublie rapidement
parce qu'il est impossible de les approfondir.
Ces livres-là sont lus passivement, le texte est simplement survolé et les
lecteurs restent déçus.
Un « bon livre » doit aboutir à l'inverse.
Son contenu doit apporter avant tout à l'intéressé
certaines notions, de telle sorte que sa culture personnelle soit enrichie.
Les œuvres de Zola sont, en général, très
bonnes car elles répondent précisément à cette demande.
Dans L'Assommoir, par exemple, les thèmes de la déchéance
humaine et de la différence des classes dans la société sont évoqués en permanence et, ainsi, l'auteur incite constamment
le lecteur à la réflexion.
Un tel livre prête même à un débat en famille ou entre amis ; plus même : il prête à une étude
approfondie en classe.
En effet, il offre un éventail important de sujets de discussion.
Nous pouvons y déceler les nombreux aspects du
sociologue dénonçant les abus de sa société, réalisant des peintures très réalistes du milieu ouvrier sous ses aspects
historiques et même politiques : l'œuvre semble presque intarissable, son contenu est d'une très grande richesse.
La
lecture d'un « bon livre » est donc une excellente manière de se cultiver individuellement.
Mais il ne faut pas restreindre la
qualité d'une œuvre à l'importance des problèmes qu'elle traite.
D'autres critères entrent en jeu et notamment le style.
Là
encore, chacun peut avoir ses préférences.
Il faut noter cependant que ce second aspect recoupe en un sens le premier.
Un auteur sachant parfaitement jouer avec la langue française et utilisant le vocabulaire et les tournures de phrases avec
talent, exprime mille fois mieux sa pensée qu'un novice en la matière.
Si Montesquieu savait si bien faire passer ses messages, notamment dans L'Esprit des lois, c'est qu'en tant que magistrat,
il maîtrisait avec zèle cet art d'écrire et usait d'armes redoutables, telle l'ironie dans « De l'esclavage des nègres ».
Personnellement, le premier atout d'un style est le suivant : il doit être plaisant et par conséquent à la portée du lecteur.
Souvent un style vivant, d'une compréhension facile, est beaucoup plus attirant et beaucoup plus parlant aussi, qu'un
style hautement recherché que seuls les érudits peuvent comprendre.
Reprenons l'exemple de Montesquieu et de son
ouvrage où il condamne l'esclavage et prêche son abolition.
Le vocabulaire et les phrases simples sont accessibles à tous
et le texte n'en est pas du tout diminué.
Et le talent de l'auteur reste tout aussi grand car, sous un aspect de simplicité, se
cache une grande recherche.
Il existe, par contre, des contemporains qui publient des livres à grand tirage, principalement
des policiers ou des romans burlesques où il arrive même que l'on découvre non seulement des fautes de frappe, qui sont
excusables, mais des fautes strictement grammaticales, des constructions des plus incorrectes.
Il est vrai que ces livres-là
sont publiés dans un but exclusivement commercial et la qualité — d'ailleurs inexistante — importe peu aux éditeurs.
Mais si la littérature française est ainsi souillée, il existe néanmoins de très bons auteurs pour la relever.
Et « très bons
auteurs » ne veut pas dire « illustres auteurs ».
Là intervient un autre critère pour juger d'un « bon livre ».
Beaucoup trop
de gens associent «bon livre» et «grand auteur».
Il est indiscutable que Molière, auteur classique, Montaigne, humaniste
du XVIe siècle ou bien, récemment, l'existentialiste Jean-Paul Sartre sont des maîtres de notre littérature.
Ne pas les
connaître ou ne pas en avoir entendu parler serait une faiblesse dans notre culture.
Mais il ne faut pas pour cela
restreindre le choix de nos auteurs.
C'est aussi un manque d'esprit critique que d'affirmer : « Ce livre est très bon, bien
sûr, c'est un Balzac.
» Cette attitude est celle d'un fat qui se veut instruit alors qu'il n'est qu'un ignorant, sans aucune
finesse ou sensibilité littéraire.
Parmi ceux qui écrivent dans l'ombre, nous découvrons parfois des auteurs de grand talent.
Un livre peut réellement nous passionner bien que l'homme qui se cache derrière nous soit totalement inconnu ; tout
comme un ouvrage d'un personnage illustre peut nous décevoir.
Il faut avant tout bien choisir le livre selon nos goût
personnels, puis savoir porter nos propres jugements, favorables ou défavorables.
Voici un livre, Monsieur, qui, je crois, rassemble toutes les qualités nécessaires pour faire un bon livre.
Il traite d'un
problème qui retiendra très certainement votre attention et vous ouvrira les portes de la réflexion.
Mais il vous apportera
aussi, entre autres, un très agréable moment de détente, car, grâce au talent de son auteur, vous vous trouverez
transporté au milieu des personnages, vous vivrez leur histoire et partagerez leurs émotions.
Mais n'oubliez pas que vous
êtes seul juge de la qualité de ce livre et que la critique que vous serez amené à porter sur lui ne dépendra que de votre
personnalité?.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- « Le monde est un livre et ceux qui ne voyagent pas n’en lisent qu’une page » AUGUSTIN D’HIPPONE
- Les oeuvres d'art sont ascétiques et sans pudeur... Horkheimer
- « La liberté consiste à faire ce que chacun désire» Mill
- « ARRIAS » LIVRE V FRAGMENT 9
- Etre libre est-ce faire tout ce qui nous plaît ?