« Il n'y a pas de vrai sens d'un texte. Pas d'autorité de l'auteur. Quoi qu'il ait voulu dire, il a écrit ce qu'il a écrit ; une fois publié, un texte est comme un appareil dont chacun peut se servir à sa guise et selon ses moyens. » Justifiez et discute
Extrait du document
Introduction Le problème du vrai sens d'un texte doit s'envisager selon plusieurs axes : on doit d'abord considérer les intentions de l'auteur et les replacer dans leur contexte socio-historique ; puis s'intéresser à l'acte de lecture, qui est celui de la délivrance du sens ; et enfin s'interroger sur les conditions mêmes de la possibilité du sens. On verra alors que la notion même de vérité est à remettre en cause, ce qui ne signifie pas qu'il n'y ait aucune vérité. I. Le problème de la vérité A. L'autorité de l'auteur 1. Penser que la vérité du texte équivaut à ce que l'auteur a voulu dire, c'est admettre une autorité de l'auteur. En d'autres termes, c'est ramener l'oeuvre à l'homme : c'est donc accepter une maîtrise totale de l'auteur et nier tout inconscient. Mais il existe de nombreux contre-exemples : Parmi les différentes variantes d'un même texte : laquelle a autorité ? D'autre part, les travaux de. Freud et de la psychanalyse sur l'inconscient invalident la possibilité d'une maîtrise de l'auteur. 2. Réduire l'oeuvre à l'homme, en admettant une autorité de l'auteur, c'est se rendre l'auteur indispensable. Que faire des oeuvres dont l'auteur est mal connu, ou inconnu ? Exemple : Homère, dont la légende affirme la cécité, mais dont on ne sait rien. On soupçonne même que L'Iliade et L'Odyssée ne soient pas du même auteur. Exemple : William Shakespeare, dont on ignore aussi à peu près tout, ce qui n'empêche ni de le lire, ni de le jouer, ni de l'apprécier.
«
« Il n'y a pas de vrai sens d'un texte.
Pas d'autorité de l'auteur.
Quoi qu'il ait voulu dire, il a écrit ce qu'il a
écrit ; une fois publié, un texte est comme un appareil dont chacun peut se servir à sa guise et selon ses
moyens.
» Justifiez et discutez cette affirmation de Paul Valéry, en vous appuyant sur des arguments et
des exemples précis.
Introduction
Le problème du vrai sens d'un texte doit s'envisager selon plusieurs axes : on doit d'abord considérer les intentions
de l'auteur et les replacer dans leur contexte socio-historique ; puis s'intéresser à l'acte de lecture, qui est celui de
la délivrance du sens ; et enfin s'interroger sur les conditions mêmes de la possibilité du sens.
On verra alors que la
notion même de vérité est à remettre en cause, ce qui ne signifie pas qu'il n'y ait aucune vérité.
I.
Le problème de la vérité
A.
L'autorité de l'auteur
1.
Penser que la vérité du texte équivaut à ce que l'auteur a voulu dire, c'est admettre une autorité de l'auteur.
En
d'autres termes, c'est ramener l'oeuvre à l'homme : c'est donc accepter une maîtrise totale de l'auteur et nier tout
inconscient.
Mais il existe de nombreux contre-exemples :
Parmi les différentes variantes d'un même texte : laquelle a autorité ? D'autre part, les travaux de.
Freud et de la
psychanalyse sur l'inconscient invalident la possibilité d'une maîtrise de l'auteur.
2.
Réduire l'oeuvre à l'homme, en admettant une autorité de l'auteur, c'est se rendre l'auteur indispensable.
Que
faire des oeuvres dont l'auteur est mal connu, ou inconnu ?
Exemple : Homère, dont la légende affirme la cécité, mais dont on ne sait rien.
On soupçonne même que L'Iliade et
L'Odyssée ne soient pas du même auteur.
Exemple : William Shakespeare, dont on ignore aussi à peu près tout, ce qui n'empêche ni de le lire, ni de le jouer, ni
de l'apprécier.
B.
Littérature et émotion
1..
Admettre la totale maîtrise d'un auteur sur son oeuvre, ce serait admettre sa totale conscience – et nier
l'inconscient –, et admettre que l'oeuvre puisse être réduite à des procédés.
Or, si construire une table peut se
résumer à quelques procédés – c'est le travail d'un artisan –, il n'en est pas de même pour une oeuvre d'art, travail
d'un artiste.
La littérature n'est pas un ensemble de procédés réitérables, c'est une source unique d'émotions.
2.
Le texte, à travers les émotions qu'il suscite, a donc le lecteur pour visée.
Il n'y aurait pas d'autre « vérité du
texte » que cette émotion.
Exemples : les textes qui jouent avec le lecteur, comme Jacques le fataliste, de Diderot,
ou Si par une nuit d'hiver un voyageur, d'Italo Calvino.
Exemples : tous les textes qui cherchent à émouvoir, comme par exemple René, de Chateaubriand, ou plus
généralement, les ouvrages des Romantiques.
C.
Quel garant ?
1.
L'auteur peut bien sûr avoir un avis sur son texte, qu'il précisera dans une préface, ou dans un autre ouvrage :
c'est un éclairage utile pour comprendre le texte.
Exemples : la préface de Pierre et Jean, de Maupassant, ou encore la préface du Spleen de Paris, de Baudelaire.
2.
Mais cet avis de l'auteur ne saurait prendre le pas sur l'acte même de la lecture : il est simplement là pour le
guider, ou le faciliter ; il ne saurait s'y substituer.
Entre l'avis préalable de l'auteur, et les émotions ressenties par le
lecteur, il reste le texte même, seul garant d'une vérité, si vérité il y a.
Toute la querelle de la Réforme protestante
tient par exemple à ce retour au texte : qu'a voulu dire l'auteur, ou les auteurs, de la Bible ? Comment doit-on
l'interpréter ? Entre une vérité établie par l'Église, et les intentions supposées d'auteurs souvent très mal connus, il
reste toujours le texte.
Transition
La question de la vérité du sens d'un texte ne relève donc pas d'une prétendue autorité de l'auteur.
Dans la mesure
où c'est le lecteur qui est visé, ce sont ses émotions qui sont déterminantes, et par conséquent seul le texte, qui
les suscite, est garant de cette vérité.
Encore reste-t-il à savoir si vérité il y a.
II.
Vérité et vérités
A.
Il n'y a pas de vérité
1.
Créateur artistique et créateur divin
L'idée même de vérité suppose une autorité qui la garantisse : soit cette autorité est divine, et dans ce cas, la
question ne se pose plus, soit elle ne l'est pas, et la vérité devient alors fluctuante.
D'où la tendance, fréquente
chez les auteurs, à s'assimiler à Dieu en tant que créateurs.
Exemple : Hugo, qui déclare avec un certain humour : « Ego Hugo.
».
»
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