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Husserl et la vision scientifique du monde

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Nous qui n'avons pas seulement un héritage spirituel, mais qui encore ne sommes de part en part rien d'autre que de (tels) "devenus" dans l'histoire de l'esprit, nous avons ainsi et ainsi seulement une tâche à accomplir qui nous soit véritablement propre. Nous ne la gagnons pas par la critique de n'importe quel système actuel ou transmis par une tradition déjà ancienne, par la critique d'une "vision du monde" scientifique ou pré-scientifique - et pourquoi pas à la fin d'une vision du monde chinoise ? -, mais nous y parvenons seulement à partir d'une compréhension critique de l'unité d'ensemble de l'histoire, de notre histoire. Car celle-ci possède une unité spirituelle, tirée de l'unité et de la puissance instinctive d'une tâche qui veut s'accomplir dans le devenir historique (dans la pensée de ceux qui philosophent les uns pour les autres, et supra-temporellement les uns avec les autres), à travers les divers degrés de la non-clarté jusqu'à une clarté suffisante, jusqu'à son élaboration finale dans la totale transparence. Alors notre histoire ne se dresse pas seulement devant nous comme quelque chose qui est par soi-même nécessaire, mais comme quelque chose qui, à nous philosophes d'aujourd'hui, nous est confié. Nous sommes en effet précisément ce que nous sommes en tant que fonctionnaires de l'humanité philosophique moderne [...] Une telle façon d'éclairer l'histoire par une question en retour sur la fondation originelle des buts qui lient la chaîne des générations à venir dans la mesure où ils continuent leur vie en elles sous des formes sédimentées, mais qui en même temps peuvent toujours être réveillées et être rendus de nouveau à la vie par la critique [...] n'est rien d'autre que l'auto-méditation authentique du philosophe. Husserl

« Nous qui n'avons pas seulement un héritage spirituel, m a i s qui encore ne s o m m e s d e part en part rien d'autre que de (tels) "devenus" dans l'histoire de l'esprit, nous avons ainsi et ainsi seulement une tâche à accomplir qui nous soit véritablement propre.

Nous ne la gagnons pas par la critique d e n'importe quel système actuel ou transmis par u n e tradition déjà ancienne, par la critique d'une "vision du monde" scientifique ou pré-scientifique - et pourquoi pas à la fin d'une vision du monde chinoise ? -, mais nous y parvenons seulement à partir d'une compréhension critique d e l'unité d'ensemble d e l'histoire, d e notre histoire.

Car celle-ci possède une unité spirituelle, tirée de l'unité et de la puissance instinctive d'une tâche qui veut s'accomplir dans le devenir historique (dans la pensée de ceux qui philosophent les uns pour les autres, et supra-temporellement les uns avec les autres), à travers les divers degrés d e la non-clarté jusqu'à une clarté suffisante, jusqu'à son élaboration finale dans la totale transparence.

Alors notre histoire n e s e dresse pas seulement devant nous comme quelque chose qui est par soi-même nécessaire, mais c o m m e quelque chose qui, à nous philosophes d'aujourd'hui, nous est confié.

Nous somm es en effet précisément ce que nous sommes en tant que fonctionnaires de l'humanité philosophique moderne [...] Une telle façon d'éclairer l'histoire par une question en retour sur la fondation originelle des buts qui lient la chaîne des générations à venir dans la mesure où ils continuent leur vie e n elles s o u s des formes sédimentées, mais qui en même temps peuvent toujours être réveillées et être rendus de nouveau à la vie par la critique [...] n'est rien d'autre que l'auto-méditation authentique du philosophe. Le point de départ de cette définition de la tâche philosophique actuelle comme « question en retour » est le constat d'une crise d e s sciences européennes, c'est-à-dire d e la raison.

Sans remettre e n cause la rigueur propre à ces sciences — il a d'abord été mathématicien —, Husserl relie directement la réduction positiviste de l'idéal de rationalité et de scientificité à la fameuse crise éthique des valeurs. Cet extrait part du constat que nous sommes d'abord des héritiers, c'est-à-dire que notre héritage ne vient pas s'ajouter de l'extérieur et après coup à notre être, mais le constitue.

Or, comme tout héritage, celui-ci demande à ce que nous nous l'approprions ; et dans la mesure où cet héritage est spirituel, son appropriation passe par une interrogation critique destinée — précise la fin du texte — à tirer de sa léthargie une vie enfouie sous les couches d'une sédimentation traditionnelle (et on pourrait penser cette « auto-méditation du philosophe » comme une nouvelle compréhension du célèbre précepte « connais-toi toi-même »).

Husserl précise en second lieu la nature de cet héritage et de la tâche qui en résulte : De quelle histoire sommes nous les héritiers ? et A quoi devons-nous appliquer notre critique ? Il faudrait reconnaître dans l'histoire non pas une multiplicité de systèmes ou de visions du monde particuliers, mais une unique puissance spirituelle qui cherche son accom plissement, dont nous sommes aussi responsables ou qu'il nous incombe de servir en tant que « fonctionnaires ».

Mais — ce que ne dit pas ce texte — de quelle nature est cette puissance ? Husserl cherche à montrer que l'essence ou l'esprit de l'humanité européenne, son telos, c'est-à-dire ce à quoi elle aspire et ce qui a donc orienté son histoire, est un idéal de rationalité dont la dimension est aussi éthique, et qui, né en Grèce, s'est perdu, lorsque cette rationalité s'est vue réduire au calcul.

De ce point de vue, l'idéal galiléen d'une mathématisation de la nature représente un tournant majeur de cet obscurcissement. On remarquera qu'une telle conception de l'histoire échappe à l'alternative entre le scepticisme auquel conduit naturellement le relativisme historique et une métaphysique de l'histoire comme celle de Hegel ; ici, l'unité spirituelle et téléologique de l'histoire est pensée comme une tâche qui incombe à l'Europe.

Mais si cette unité a le statut d'une I d é e en un s e n s kantien, on ne trouve pas chez Kant u n e telle compréhension du temps historique en tant que tradition et héritage. HUSSERL (Edmond).

Né à Prossnitz (Moravie) en 1859, mort à Fribourg-en-Brisgau en 1938. Il fit des études de mathématiques, fut le disciple de Franz Brentano et fut professeur à Halle en 1887, à G6ttingen, de 1906 à 1916, et à Fribourg-en-Brisgau d e 1916 à 1933, date à laquelle il fut chassé d e l'Université, en tant qu'israélite.

Il fit, en 1929, une série de conférences à la Sorbonne.

— Husserl com battit le psychologisme.

Le problème d e la connaissance n'est plus primordial ; dans l'ordre cognitif, c'est la perception qui domine, de même que, dans l'ordre objectif, c'est le perçu.

Pour Husserl, « la philosophie est une science » ; elle doit être descriptive.

Son but est une description exhaustive de l'existence.

— Le critère décisif de l'existence, c'est la présence d'une signification à la conscience qui la vise.

La conscience est contemplation, intentionnalité et ouverture.

Elle existe« selon un mode d'être qui l'épuise dans la visée de l'autre qu'elle- même».

— La phénoménologie est une méthode :« Elle est un effort pour appréhender, à travers des événements et des s empiriques, des « essences », c'est-à-dire des significations idéales.

Celles-ci sont saisies directement par intuition à l'occasion d ' e x e m p l e s singuliers, étudiés en détail et d'une manière très concrète.

» (Lalande.) Cette méthode comporte d e u x caractéristiques : l'époché, c'est-à-dire la suspension du jugement, la mise entre parenthèses du problème de l'existence ou de l'inexistence des choses, de l'existence substantielle du monde extérieur.

« Quand il neutralise le monde, le phénoménologue s'aperçoit qu'il n'est pas placé « devant un pur néant ».

Son opération d é g a g e u n e sphère nouvelle d'existence q u e peut atteindre une expérience nouvelle, l'expérience transcendantale.

» (Husserl.) L'autre caractéristique est la réduction éïdétique, c'est-à-dire l'élimination des éléments empiriques du donné pour ramener à leurs pures essences objectives les phénomènes donnés à la conscience.

La réduction éïdétique est la substitution de la considération des essences à celle de l'expérience au sens usuel.

— La phénoménologie est aussi un système, et on la désigne du nom de phénoménologie transcendantale.« Elle cherche alors à mettre en lumière le principe ultime de toute réalité.

Comme elle se place au point d e v u e d e la signification, ce principe sera celui par lequel tout prend un sens, l'« ego transcendantal», extérieur a u m o n d e , mais tourné vers lui.

Ce sujet pur n'est d'ailleurs pas unique, car il appartient à la signification du monde de s'offrir à une pluralité de sujets. L'objectivité du monde apparaît ainsi comme une « intersubjectivité transcendantale ».

La reconnaissance du domaine transcendantal et sa description demandent qu'on adopte une attitude difficile à prendre et très différente de l'attitude naturelle : le moment essentiel en est ce que Husserl désigne du nom d e « réduction phénoménologique transcendantale ».

(G.

Berger.) — Dans la terminologie husserlienne, le n o è m e est l'objet visé par l'intention connaissante ; c'est le sens qui habite la réalité psychique ; la noèse est l'acte de la conscience tourné vers l'objet ; c'est la réalité psychique concrète.

— Husserl, qui n'eut guère le temps d'achever l'élaboration complète de son système philosophique a eu une influence considérable sur toute la philosophie moderne.. »

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