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Husserl et la géométrie

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Le géomètre, lorsqu'il trace au tableau ses figures, forme des traits qui existent en fait sur le tableau qui lui-même existe en fait. Mais, pas plus que le geste physique de dessiner, l'expérience de la figure dessinée, en tant qu'expérience, ne fonde aucunement l'intuition et la pensée qui portent sur l'essence géométrique. C'est pourquoi il importe peu qu'en traçant ces figures il soit ou non halluciné et qu'au lieu de dessiner réellement il projette ses lignes et ses constructions dans un monde imaginaire. Il en est autrement du savant dans les sciences de la nature. Il observe et expérimente ; autrement dit, il constate par expérience une existence ; pour lui l'expérience est l'acte sur lequel tout le reste se fonde et que la simple fiction ne peut jamais remplacer. C'est précisément pourquoi sciences du fait et sciences de l'expérience sont des concepts équivalents. Mais pour le géomètre qui explore non des réalités mais des « possibilités idéales », non des états de choses propres à la réalité mais des états de choses propres aux essences, l'intuition des essences est, à la place de l'expérience, l'acte qui fournit les ultimes fondements. Husserl

« Le géomètre, lorsqu'il trace au tableau ses figures, forme des traits qui existent en fait sur le tableau qui lui-même existe en fait.

Mais, pas plus que le geste physique de dessiner, l'expérience de la figure dessinée, en tant qu'expérience, ne fonde aucunement l'intuition et la pensée qui portent sur l'essence géométrique.

C'est pourquoi il importe peu qu'en traçant ces figures il soit ou non halluciné et qu'au lieu de dessiner réellement il projette ses lignes et ses constructions dans un monde imaginaire.

Il en est autrement du savant dans les sciences de la nature.

Il observe et expérimente ; autrement dit, il constate par expérience une existence ; pour lui l'expérience est l'acte sur lequel tout le reste se fonde et que la simple fiction ne peut jamais remplacer.

C'est précisément pourquoi sciences du fait et sciences de l'expérience sont des concepts équivalents.

Mais pour le géomètre qui explore non des réalités mais des « possibilités idéales », non des états de choses propres à la réalité mais des états de choses propres aux essences, l'intuition des essences est, à la place de l'expérience, l'acte qui fournit les ultimes fondements. • Un beau texte de Husserl, clair et structuré, qui dégage le clivage existant entre les sciences et de l'expérience et les mathématiques.

Husserl étudia, d'ailleurs les mathématiques avant de suivre l'enseignement de Franz Brentano. Ses premières oeuvres sont consacrées à la philosophie des mathématiques. Signalons Sur le concept de nombre (1887) et la Philosophie de l'arithmétique (1891).

Husserl, mathématicien de formation, décrit ici avec rigueur l'activité du géomètre, si profondément distincte de celle du physicien, par exemple. Comment déchiffrer ce texte à la fois clair et savant, net et érudit • Soulignez les termes importants et efforcez-vous d'en préciser le sens ; vous remarquerez d'ailleurs qu'ils figurent dans le texte en quantité non négligeable. - le géomètre : spécialiste de la géométrie, c'est-à-dire de la science de toutes les espèces d'espace ou, si l'on veut encore, de la branche des mathématiques ayant pour objet l'espace. - expérience: ici, saisie acquise parles sens, due à la sensibilité.

Appréhension empirique.

Faculté d'appréhender le réel par intuition sensible. - fonder: apporter ou fournir des bases ou des principes.

Pourvoir d'une véritable assise. - intuition: saisie directe, immédiate d'une réalité.

Mode de connaissance sans intermédiaires. - pensée : activité intellectuelle ou rationnelle de l'esprit humain. - essence : réalité ultime sans laquelle une chose ne serait pas ce qu'elle est.

L'essence est indépendante des particularités.

Ainsi, l'essence du triangle est l'ensemble de ses propriétés, sans lesquelles le triangle ne serait pas ce qu'il est. - imaginaire : ici, irréel, fictif, qui se rapporte aux constructions de l'activité (imaginative) ne correspondant à rien de réel. - sciences de la nature: connaissances discursives établissant des lois entre les phénomènes étudiés et portant sur les réalités de l'univers proprement dites, par opposition aux idéalités mathématiques. - observer: constater attentivement les données de l'expérience. - expérimenter : interroger méthodiquement les phénomènes pour vérifier une hypothèse. - existence : ici, le fait de se trouver là concrètement, dans le réel, au milieu des choses. - sciences du fait: chez Husserl, connaissances discursives portant sur des réalités empiriques. - sciences de l'expérience : connaissances discursives portant sur ce qui est apporté par les sens. - intuition des essences: saisie directe des réalités ultimes sans lesquelles les choses ne seraient pas ce qu'elles sont. - fondements : principes ou bases sur lesquels reposent les diverses réalités.

Assises du réel. • Maintenant, efforcez-vous de structurer le texte, d'en saisir l'organisation, le cheminement de pensée, de manière à y percevoir un sens, d'en être « I'herméneute » attentif.

Ici, Husserl chemine vers une idée essentielle (que l'on retrouve dans toute sa doctrine), que vous ne pouvez saisir et appréhender qu'à travers l'étude ordonnée. Voici cette organisation globale, ce plan: A.

« Le géomètre ...imaginaire » : Le géomètre ne fonde pas ses objets sur l'expérience. B.

« Il en est autrement ...

équivalents » : Les sciences de la nature fondent leurs objets sur cette expérience, et ce par opposition à la mathématique. C.

« Mais ...

fondements » : En géométrie, la saisie des réalités idéales (essences) s'avère fondatrice : c'est elle qui fournit des bases ou principes. Dans la première partie, Husserl met à distance l'expérience en ce qui concerne la géométrie car l'expérience n'y joue pas un rôle majeur ni fondateur.

Dans la seconde, il oppose, à cette idéalité des mathématiques, le «réalisme » des. »

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