HEGEL et Le trésor de raison
Extrait du document
«
Le trésor de raison consciente d'elle-même qui nous appartient, qui
appartient à l'époque contemporaine, ne s'est pas produit de manière
immédiate, n'est pas sorti du sol du temps présent, mais pour lui c'est
essentiellement un héritage, plus précisément le résultat du travail et, à
vrai dire, du travail de toutes les générations antérieures du genre humain.
De même que les arts de la vie extérieure, la quantité de moyens et
procédés habiles, les dispositions et les habitudes de la vie sociale et
politique sont un résultat de la réflexion, de l'invention, des besoins, de la
nécessité et du malheur, de la volonté et de la réalisation de l'histoire qui
précède notre époque, de même ce que nous sommes en fait de sciences et
plus particulièrement de philosophie nous le devons à la tradition qui enlace
tout ce qui est passager et qui est par suite passé, pareille à une chaîne
sacrée, [...) et qui nous a conservé et transmis tout ce qu'a créé le temps
passé.
Or, cette tradition n'est pas seulement une ménagère qui se
contente de garder fidèlement ce qu'elle a reçu et le transmet sans
changement aux successeurs; elle n'est pas une immobile statue de pierre,
mais elle est vivante et grossit comme un fleuve puissant qui s'amplifie à mesure qu'il s'éloigne de sa
source.
Ebauche d’introduction :
Hegel (1770-1831) est un penseur allemand du XIX e siècle ayant développé une philosophie de l’Histoire
comme accumulation de progrès dans les différents domaines du savoir, et ce malgré la domination successive
de cultures différentes.
Le problème est de savoir comment nous recevons les connaissances qui nous sont
transmises par les générations précédentes.
La réponse de Hegel est que nous les recevons à la manière d’un
«héritage» issu «du travail de toutes les générations antérieures».
Cette thèse s’accompagne de plusieurs
corollaires que l’auteur développera dans les différents mouvements du texte, qui sont au nombre de trois.
La
première partie s’étend du début jusqu’à «générations antérieures du genre humain».
La seconde va jusqu’à
«tout ce qu’à créé le temps passé.» Enfin, la dernière débute à «Or, cette tradition…» et se poursuit jusqu’à la
fin.
Quelques difficultés du texte :
Raison consciente d’elle-même : Hegel entend par-là notre capacité réflexive, le fait que nous
puissions avoir conscience de notre conscience, et tout ce qui dérive de cette capacité : science, et
philosophie (qui est pour Hegel la science par excellence).
mais pour lui c’est essentiellement… : Le sujet lui réfère au temps présent.
Eléments de commentaire :
Première partie : D’où viennent nos connaissances ?
L’expression «trésor de raison consciente d’elle-même» renvoie à la capacité spécifique de l’homme
d’avoir conscience de sa conscience.
Le «nous» sujet dans «nous appartiens» est immédiatement explicité,
Hegel désigne par ce pronom les hommes de son époque, ses contemporains.
Que ce «trésor» ne soit pas
«sorti du sol du temps présent» tient apparemment de l’évidence, mais Hegel ne cherche pas à nous apprendre
que nous avons un passé.
Le «trésor» réfère en effet à une «raison consciente d’elle-même», la science et la
philosophie, qui ne sont pas le privilège du présent sur les époques passées, mais un héritage du «temps
passé».
De quel genre d’héritage s’agit-il ? Son acquisition a-t-elle demandé un effort ou s’est-elle produite
naturellement ? Hegel répond explicitement qu’il s’agit du «résultat du travail […] de toutes les générations
antérieures du genre humain.» et développera cette réponse dans la suite du texte.
Deuxième partie : Une chaîne sacrée…
Le second mouvement s’ouvre par une énumération d’effets rapportée à une suite de causes.
L’expression «arts de la vie extérieure» désigne toutes les formes de savoir-faire que peut produire un peuple :
techniques de chasse, d’agriculture, d’architecture, etc… ces différentes choses, ainsi que les coutumes et
gouvernements («les habitudes de la vie sociale et politique») sont présentées comme résultant d’un mélange
d’inventions et d’adaptations, tantôt fruits de la «réflexion» (ce terme renvoie encore à la raison consciente
d’elle-même), tantôt de la nécessité, «des malheurs».
Ces différentes notions aboutissent au dernier terme de
cette suite : «la réalisation de l’histoire qui précède notre époque».
Cette expression renvoie à la philosophie.
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