Freud: Faut-il ressentir pour connaître ?
Extrait du document
Le
transfert se manifeste chez le patient dès le début du traite-ment et
représente pendant quelque temps le ressort le plus solide du travail.
On ne s'en aperçoit pas et on n'a pas à s'en préoccuper, tant que
son action s'effectue au profit de l'analyse poursuivie en commun.
Mais dès qu'il se transforme en résistance, il appelle toute
l'attention. [...]
Lorsque le malade est sur le point d'engager la
lutte normale contre les résistances dont notre analyse lui a révélé
l'existence, il a besoin d'une puissante impulsion qui fasse pencher
la décision dans le sens que nous désirons, c'est-à-dire de la
guérison. Sans cela, il pourrait se décider en faveur de la répétition
de l'issue antérieure et infliger de nouveau le refoulement à ce qui
avait été amené à la conscience. Ce qui décide de la solution de cette
lutte, ce n'est pas la pénétration intellectuelle du malade - elle
n'est ni assez forte ni assez libre pour cela -, mais uniquement son
attitude à l'égard du médecin. Si son transfert porte le signe
positif, il revêt le médecin d'une grande autorité, transforme les
communications de ce dernier en articles de foi. Sans ce transfert, ou
lorsque le transfert est négatif, le malade ne prêterait pas la moindre
attention aux dires du médecin. La foi reproduit à cette occasion
l'histoire même de sa naissance : elle est le fruit de l'amour et
n'avait pas besoin d'arguments au début. C'est seulement plus tard
qu'elle attache à ceux-ci assez d'importance pour les soumettre à un
examen critique, lorsqu'ils sont formulés par des personnes aimées.
Les arguments qui n'ont pas pour corollaire le fait d'émaner de
personnes aimées n'exercent et n'ont jamais exercé la moindre action
dans la vie de la plupart des hommes. Aussi l'homme n'est-il en
général accessible par son côté intellectuel que dans la mesure où il
est capable d'investissement libidineux d'objets, et nous avons de
bonnes raisons de croire, et la chose est vraiment à craindre, que
c'est du degré de son narcissisme que dépend le degré d'influence que
peut exercer sur lui la technique analytique, même la meilleure.
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