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Faut-il vivre comme si nous ne devions jamais mourir ?

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« Analyse du sujet • Faut-il...

? : la question est posée en termes d'exigence, d'impératif.

Nous n'avons pas à nous interroger sur une possibilité, mais sur une nécessité.

Mais qu'est-ce qui peut justifier un tel impératif ? • Le comme si renvoie au caractère imaginaire et hypothétique de la proposition qui suit.

Il ne s'agit pas de faire de la science-fiction (de nous croire soudain immortels), mais d'occulter ce que nous savons être notre lot à tous. • Pour bien vivre, devons-nous anéantir la perspective de la mort, l'oublier volontairement et faire comme si elle ne nous concernait pas ? Identification de la problématique. La question met en cause la position morale de l'homme face à sa propre mort.

Doit-il vivre en ignorant la mort ? Mais ce serait reconnaître alors que l'idée de la mort est un obstacle au « bien-vivre ».

L'homme doit-il céder à l'illusion de l'immortalité pour vivre en paix, ou trouver au contraire dans la méditation de la mort le secret de son existence ? Introduction Le sujet présente un double paradoxe.

D'abord il suggère que je puisse me donner délibérément une règle qui semble impliquer ou bien un refus de savoir, comme si l'on devait vivre en cultivant l'inconscience et l'aveuglement, ou bien, pour le moins, un refus de tenir compte de ce que l'on sait : vivre comme si je ne devais jamais mourir, c'est soit feindre l'ignorance, et mimer une régression vers un état de nature, comme celui où se trouve le sauvage de Rousseau, dont les « projets bornés comme ses vues s'étendent à peine jusqu'à la fin de la journée », soit ériger l'inconséquence en principe, puisque je vis selon ce que je sais être faux.

Ensuite, même si je sais que je vais mourir, ma vie ordinaire la plus commune semble manifester que je n'y prends pas garde.

Lorsque nous nous lançons dans des entreprises, dont nous ne sommes pas sûrs de voir le terme, lorsque les années futures s'inscrivent dans nos projets, n'agissons-nous pas spontanément comme si nous ne devions jamais mourir ? Auquel cas le conseil serait superflu.

Ne paraît-il pas plus sensé et raisonnable de rappeler à l'homme son humaine et mortelle condition : memento mori, afin qu'il mette sa vie en accord avec la connaissance qu'il a de la mort à venir ? Mais qu'est-ce alors qu'une vie dirigée par la conscience de la brièveté de la vie ? I - La pensée de la mort comme devoir de lucidité a) Les Stoïciens nous rappellent qu'il y a un devoir de lucidité : « Vous vivez comme si vous deviez toujours vivre ; jamais vous ne pensez à votre fragilité » (Sénèque, De brevitate vitae).

Il y a donc comme une contradiction entre la vérité de notre vie et notre manière de la vivre.

« C'est en mortels que vous possédez tout, c'est en immortels que vous désirez tout ».

Est-ce parce que nous oublions notre condition que nos désirs en deviennent infinis ? Ou est-ce parce que nos désirs et nos projets s'étendent toujours plus avant que nous oublions que nous sommes mortels ? b) L'homme de l'immédiat, l'homme à l'état de nature de Rousseau, vit dans le pur présent sensible : incapable de se projeter hors de ce présent dans un temps qui n'est pas, il ignore à la fois l'avenir et la mort. c) Le sage au contraire sait que nous somme mortels, et il connaît l'avenir comme un temps qui ne m'appartient pas. La mort est pour lui comme l'absolu de cette dépossession : non seulement l'avenir ne m'appartient pas, mais ma vie ne m'appartient pas non plus, puisque la mort m'en dépouillera.

La mort est donc comme l'horizon de tout avenir. Ainsi, se rappeler que l'on est mortel, c'est cesser de fuir hors du présent, c'est refuser de s'égarer.

L'homme ordinaire présente ce paradoxe qu'il vit dans l'avenir sans la mort.

En ce sens, oublier que nous sommes mortels, n'est-ce pas l'origine du divertissement ?. »

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