Faut-il se détacher des choses matérielles ?
Extrait du document
«
[Pour Bouddha, la vie humaine est pleine de souffrances dues
à notre désir des choses matérielles.
L'homme doit donc se
détacher du monde matériel pour atteindre le nirvana et
délivrer ainsi son âme du cycle des réincarnations.]
Le bouddhisme ou la négation de tout désir.
Le bouddhisme nous propose une sagesse.
Les trois premières vérités fondamentales enseignées par le Bouddha sont les suivantes :
1.
Toute vie est souffrance.
2.
L'origine de la vie et de la souffrance est le désir.
3.
L'abolition du désir entraîne l'abolition de la souffrance.
Nous pouvons présenter ceci par l'équation : vie = Désir = Souffrance.
En effet, il n'y a de vie que par le désir, par le désir farouche de survivre, de se défendre contre les autres vivant, de se nourrir, de tuer pour cela,
comme on le voit chez tous les vivants, les animaux et les hommes.
Le désir fondamental est donc le désir de persévérer dans son être, lé désir
d'être et de persister à être un individu, séparé et différent du reste du monde, ou, comme disent les Occidentaux, le désir d'individuation.
D ‘autre part, le désir n'est jamais satiable, nous souffrons toujours de désirs inassouvis, que redoublent encore les douleurs
physiques de la maladie et de la vieillesse, qui sont le lot des vivants.
Bref, à regarder les choses lucidement, la vie est
essentiellement faite de souffrance.
Bien rares sont les moments de vraie joie.
Certes, nous avons l'espoir d'arriver un jour au
bonheur par la satisfaction de tous nos désirs : c'est d'ailleurs ce qui nous fait vivre, mais ce n'est qu'illusion vaine.
Ce qu'il
faut donc, c'est arriver à échapper à la souffrance.
Le nirvana, le Karma et la réincarnation.
C omment y arriver ? C omment faire ? La solution s'impose logiquement : il suffit de supprimer en nos tous nos désirs, y compris notre désir
fondamental de vivre et d'être heureux.
Lorsque nous y serons parvenus, nous serons délivrés du désir, donc de la souffrance.
Nous atteindrons
alors à l'état dit de « nirvana », cad de délivrance, qui est caractérisé comme un état, bienheureux.
Nous voyons que, selon le bouddhisme, il faut
tuer en soi tout désir.
M ais se suicider n'est pas pour autant la bonne solution pour échapper à la souffrance.
En effet, celui qui se suicide le fait
parce qu'il souffre trop de ses désirs inassouvis et par désespoir d'arriver à trouver le bonheur.
Il est donc encore tout empli du désir de son
bonheur personnel.
Dès lors, puisque c'est le désir d'individuation qui produit la vie, il devra nécessairement revivre, cad se réincarner.
La
doctrine orientale de la réincarnation est donc rigoureusement logique sur ce plan.
Il en va de même pour son corollaire, la doctrine du « karma »
(destin), qui est souvent mal comprise.
Les occidentaux et les religions populaires orientales l'envisagent souvent sous une forme moralisatrice :
si l'on souffre de cette vie, si l'on y est en butte à un destin cruel, c'est que l'on a fait du mal dans une vie antérieure et qu'on le paie maintenant.
C ette conception suppose une divinité providentielle, qui surveille nos actes et distribue châtiments et récompenses.
Mais pourquoi alors attendelle une autre vie ? En réalité la doctrine du « karma » ne requiert pas l'existence d ‘un tel juge divin.
Elle découle de la logique propre du désir.
En
effet, si l'on meurt avec encore en son âme toutes sortes de désirs inassouvis, de regrets, d'appétits nécessairement on se réincarne dans un être
animé de ces désirs.
Or, plus on a de désirs, plus on souffre.
Le « karma » n'est rien d'autre que ceci : la souffrance que s'inflige en quelque sorte
à lui-même celui qui n'a pas su surmonter ses désirs dans sa vie précédente.
Dès lors, nos expériences multiples peuvent suivre deux types de trajectoires.
L'une est « descendante » : si en chacune de nos existences nous
accumulons de plus en plus de désirs, nous nous réincarnons chaque fois dans un être de plus en plus bas, vil, désirant, et souffrant.
C 'est ainsi
que celui qui est animé de désirs particulièrement bestiaux finira par se réincarner dans un animal, féroce ou libidineux, et poursuivra sa
dégringolade suivant les degrés de la hiérarchie des êtres.
L'autre direction, « ascendante », appartient à celui qui surmonte peu à peu ses désirs
au cours de ses existences successives.
Dès lors, il se réincarnera dans des êtres de plus en plus nobles, purs et sages, de moins en moins
désirants et souffrants, jusqu'à ce qu'il élimine de lui tout désir et qu'il atteigne le détachement absolu, le « nirvana ».
Alors son cycle d'existence
prendra fin, il cessera de se réincarner et, puisqu'il aura supprimé en lui le désir d'être un individu séparé, il se réunira avec l'absolu, le
« Brahman », et se résorbera en lui.
C ar seul l'absolu existe.
C 'est par une catastrophe ontologique d'ailleurs inexpliquée que des êtres qui ne
sont que des fragments de l'absolu se détachent et se détournent de lui, croient exister par et pour eux-mêmes, croient être des individus séparés
et se prennent même pour le centre du monde, ce qui fonde leur égoïsme.
C'est donc une « ignorance transcendantale » qui est à l'origine des
existences individuelles et du désir de persévérer dans son être, donc de la souffrance.
La connaissance doit venir lever cette ignorance, déchirer
le « voile de la maya » et révéler le caractère profondément illusoire de toute existence, de nous-mêmes comme de tout ce qui nous entoure.
[Comme tout ascétisme, le bouddhisme est une doctrine qui
nie le corps, le plaisir et la vie.
Il est excessif de considérer
que, dans la vie terrestre, les souffrances prédominent.
Ce qui est illusoire, c'est de vouloir se détacher de ses désirs.
]
C ritique du bouddhisme
Nous pourrions critiquer le bouddhisme sur plusieurs points.
En effet, ce n'est pas le bonheur positif qu'il nous apporte, mais seulement la cessation de
la souffrance.
Or, cela n'est pas identique.
Mais, objectera-t-on, la fusion avec l'absolu n'est-elle pas une jouissance, une béatitude ? C e n'est pas
pensable, puisqu'elle ne s'opère que par la suppression de notre conscience individuelle.
Or, si je ne suis plus un individu conscient, je ne ressent plus
rien ; parler de mon bonheur n'a plus aucun sens.
Pourtant, c'est bien cette néantisation du soi, ce suicide spirituel que recherche le bouddhisme,
notamment à travers les techniques du yoga.
Un des plus hauts exercices de méditation yogique, en vue duquel la maîtrise du corps et de la pensée
est recherchée, est le fait d'arriver à penser le rien, cad à ne plus penser à rien, à ne plus du tout, à anéantir sa pensée et –puisque nous sommes des
êtres essentiellement pensants- son être.
De plus, l'absolu lui-même, dans lequel il faut résorber son être, n'est rien d'autre que le néant.
Les
Orientaux éprouvent quelques difficultés à parler du « Brahman », précisément parce qu'on ne peut rien en dire : du rien, rien ne se dit.
Mais si
l'existence individuelle est une illusion et un mal, l'absolu bouddhique ne peut être un individu : il est principe rigoureusement impersonnel, à la
différence du Dieu judéo-chrétien, qui lui est une personne, qui a une pensée, une volonté, qui crée volontairement le monde et des êtres distincts de.
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