Faut-il espérer que la technique nous libère du travail?
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Sujet : Faut-il espérer que la technique nous libère du travail?
Discussion : Le développement de la technique est ce sur quoi repose l'hégémonie des puissances occidentales ;
elles justifient leur essor par la perspective d'un affranchissement progressif des individus à l'égard des servitudes
liées au travail.
Les principales objections formulées à l'encontre du déploiement parfois forcené des moyens
modernes de maîtrise trouvent leur contradiction sous la forme de la promesse d'une émancipation future.
Mais la
naissance d'une « civilisation des loisirs » n'est-elle pas une profonde duperie ? Est-il bien sûr que les hommes sont
« libérés » ? La technique ne fait-elle pas apparaître des modèles de contrôle symbolique bien plus puissants que
tous les asservissements visibles expérimentés antérieurement ?
Suggestion de plan :
Première partie : Le modèle techniciste
Avant même de savoir si la technique libère ou non l'individu de l'esclavage quotidien, il faut rappeler que dans la
hiérarchie des civilisations le modèle occidental de développement est posé comme appartenant au sommet.
Si l'on
s'appuie sur ce que dit Claude Levi-Strauss et son effort pour exprimer l'idée que chaque société poursuit une
finalité qui lui est propre, cette comparaison qui tranche en faveur du développement techniciste est évidemment
une usurpation.
Il y a une évidence de la puissance mise en oeuvre pour dominer l'élément naturel et les acquis des
hommes dans le domaine de la physique, des mathématiques et de leurs applications, sont considérables.
« Ce n'est
pas seulement son utilisation, c'est bien la technique elle-même qui est déjà domination (sur la nature et sur les
hommes), une domination méthodique, scientifique, calculée et calculante.
» Marcuse, Culture et Société.
Mais cela
permet-il d'opérer le glissement sémantique qui conduit de la « domination » à la « libération » ?
Deuxième partie : L'aliénation technologique
Les encarts publicitaires des années soixante mettaient en exergue le luxe que serait le temps pour la ménagère qui
aurait acquis les nouveaux robots allégeant ses tâches domestiques.
Il n'est pas besoin de rappeler les études des
sociologues qui prouvent depuis longtemps qu'il est plus long de laver un mixer qu'un couteau, et que le gain
prétendu est immédiatement affecté à d'autres systèmes de contrainte qui remplacent les précédents, pour
démontrer qu'un écart se creuse entre les prétentions affichées et la réalité.
Il va donc de soi que la libération par
la technique participe d'un processus idéologique fort visant à entraîner les individus dans une logique capitaliste et
marchande qui ne vise pas nécessairement au bien-être des citoyens.
« Plus les techniques progressent, plus la réflexion est en recul.
» Gabriel Marcel, Les Hommes contre l'humain, 1951.
Heidegger dénonce l'aliénation dont nous sommes les victimes et qui nous fait
accroire que le développement technique est synonyme de progrès : « Quand
nous considérons la technique comme quelque chose - de neutre, c'est alors
que nous lui sommes livrés de la pire façon : car cette conception [...] nous
rend complètement aveugles en face de l'essence de la technique.
»
Heidegger, La Question de la technique.
Heidegger: La technique
1.
Le projet cartésien
Pour Heidegger, l'ère moderne réalise le projet cartésien de maîtrise et de
domination de la nature.
Elle est l'ère où se manifeste dans toute son ampleur
la technique, la mobilisation de toutes les forces en vue d'une exploitation.
Toute la nature est devenue, non plus objet de contemplation ou de pensée,
mais un fonds exploitable et calculable, y compris l'homme lui-même qui n'en
est que le gérant.
Ainsi, le Rhin, dont le poète savait dire le mystère, n'est
plus qu'une énergie électrique potentielle, qu'une source d'énergie sommée de
se livrer (La Question de la technique).
2.
La signification de la technique
Cette description du monde technique n'est pas, pour Heidegger, l'occasion
de s'inquiéter pour l'homme, au sens où il le croirait menacé par des
catastrophes, mais de diagnostiquer un nouveau rapport de l'homme à l'Être qui s'annonce.
D'une part, l'étant,
l'ensemble de ce qui est, est sommé de se livrer sous une forme calculable (ainsi, le scientifique questionne tel ou
tel phénomène pour en obtenir une maîtrise mathématique) ; d'autre part, l'homme lui-même est sommé d'étendre sa
main ordonnatrice, de tout planifier et soumettre à ses calculs.
Le danger de la technique est l'illusion qu'elle suscite
chez l'homme de pouvoir se rencontrer lui-même dans ce qui est, et donc de ne jamais pouvoir exister
authentiquement.
HEIDEGGER : DIRE "OUI" ET "NON" À LA TECHNIQUE.
»
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