Faut-il dire de l'homme qu'il est libre ou qu'il se libère ?
Extrait du document
«
L'homme, en tant qu'être conscient, a le sentiment d'être libre.
Mais ce sentiment est, en fait, illusoire.
Il résulte
de l'ignorance.
Car l'homme est soumis à des déterminismes naturels, sociaux, psychologiques.
Il faut donc dire de
l'homme non qu'il est libre, mais qu'il se libère.
La liberté s'acquiert par la maîtrise de la nature (de ce point de vue,
le développement des sciences et des techniques a donné à l'homme un grand pouvoir); par la maîtrise du
développement économique et social; par la maîtrise de soi (dominer ses passions, chercher à mieux connaître son
inconscient).
La liberté se conquiert donc.
Elle est le pouvoir d'agir fondé sur la connaissance des déterminismes qui
s'exercent sur nous.
1) La liberté comme essence de l'essence inaliénable
« Renoncer à sa liberté, c'est renoncer à sa qualité d'homme, aux droits de l'humanité et
même à ses devoirs.
Il n'y a nul dédommagement possible pour quiconque renonce à tout.
Une telle renonciation est incompatible avec la nature de l'homme.
»
Rousseau.
C'est dans le « Contrat social » que l'on trouve l'une des affirmations les plus radicales de Rousseau concernant la liberté comme
bien inaliénable, définissant l'homme en propre.
L'idée que la liberté est un bien inaliénable, et que nul ne peut consentir à y renoncer pour appartenir à l'Etat, est
une thèse centrale de la pensée politique de Rousseau.
Elle sous-tend tout le « Contrat social », où il s'agit de
déterminer comment les hommes peuvent véritablement s'associer, obéir à un pouvoir commun, à des lois valant
pour tous, sans abdiquer leur imprescriptible liberté.
Cette fameuse formule s'inscrit dans un contexte polémique.
Rousseau vient de montrer, en accord avec Hobbes
et les partisans de l'école du droit naturel, que toute société, tout Etat, ne peut reposer que sur des conventions :
« Puisqu'aucun homme n'a une autorité naturelle sur son semblable, et puisque la force ne produit aucun droit,
restent donc les conventions pour base de toute autorité légitime parmi les hommes.
»
Rousseau entend maintenant se démarquer de ses prédécesseurs en refusant toute espèces de pacte de soumission qui lierait le peuple à des
gouvernants, qui soumettrait la liberté des hommes à celle d'un autre.
C'est pourquoi il entend prouver que renoncer à sa liberté conduit à se
détruire en tant qu'être humain, et que, par suite, nul ne peut le vouloir.
Mais sans doute faut-il comprendre que la liberté pour Rousseau est constitutive de l'humanité : être humain, c'est
être libre.
On peut aller jusqu'à dire que la liberté pour Rousseau prend la place du cogito chez Descartes.
Descartes considérait les animaux comme de simples automates, des machines, et la pensée seule assurait l'homme
de sa différence essentielle avec les bêtes.
A cela Rousseau rétorque, faisant sienne les thèses sensualistes :
« Tout animal a des idées puisqu'il a des sens [...] et l'homme ne diffère à cet égard de la bête que du plus ou
moins.
»
Mais, alors que l'animal est régi par l'instinct, par des règles de comportement innées, fixées par la nature, l'homme
est libre : « et c'est surtout dans la conscience de cette liberté que se montre la spiritualité de son âme ».
Ce qui
fait la grandeur de l'homme , sa spécificité, sa spiritualité, ce qui le définit en propre, ce n'est plus la raison, c'est la
liberté.
A partir de ces fondements, mis à jour dans le « Discours sur l'origine et les fondements parmi les hommes »
(1755), Rousseau va s'employer à démontrer tous les arguments qui tentent de justifier l'esclavage privé et la
sujétion politique.
Il entend d'abord réfuter le parallèle établi par Grotius (1583-1645) entre l'esclavage privé et la soumission des
peuples.
Si l'on pouvait comprendre qu'un homme se vende pour pouvoir survivre, il n'en resterait pas moins
incompréhensive qu'un peuple se donne à un maître qu'il devra nourrir.
Rétorquer que le peuple gagne au moins sa
sécurité revient à dire, selon Rousseau, que les compagnons d'Ulysse étaient en sécurité dans l'antre du
Cyclope : ils attendaient tranquillement d'être dévorés chacun à leur tour.
Enfin, même si u peuple pouvait se
donner, il ne pourrait en aucun cas engager la liberté de ses enfants, nés libres, car en admettant que l'on puisse
disposer de sa liberté, on ne peut engager celle des autres.
Rousseau commence ici à démontrer les arguments fallacieux qui justifient l'emprise du pouvoir sur les hommes, et les privent de leur bien le plus
précieux au nom d'une prétendue sécurité.
Mais il va plus loin en montrant que même un contrat de soumission est, en fait, juridiquement nul,
moralement inconcevable.
Un contrat suppose un échange de biens entre contractants, or renoncer à sa liberté, c'est renoncer à tout, c'est
échanger un bien un bien infini (ma liberté) contre un avantage qui sera par définition disproportionné.
Si je donne.
»
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