Etre moral, est-ce contrarier ou suivre sa nature ?
Extrait du document
«
Les deux verbe du sujet soulignent, pour le premier, l'action et, pour le second, la passivité.
Contrarier, c'est
s'opposer, gêner, résister.
Suivre, c'est accompagner, se conformer, évoluer dans la même direction.
Être moral, serait-ce de s'opposer à tout ce qui en nous relève de la nature ou au contraire se conformer à la
nature en chacun de nous ? Ce qui relève de la nature humaine : la raison et la passion.
Mais ce qui distingue
l'homme de l'animal est cette capacité de se perfectionner.
La raison permet l'accès à la moralité.
La position kantienne est originale : contrairement à Rousseau, il ne pense pas que l'homme soit originellement
bon et pacifique, mais il ne pense pas non plus comme Hobbes qu'il soit un loup pour les autres hommes.
Kant admet ces deux concepts car la nature n'est ni bonne ni mauvaise, elle est amorale.
L'homme possède «
des impulsions à tous les vices », mais aussi la raison qui peut s'élever jusqu'au devoir.
Ce ne sont pas les penchants naturels qui sont dangereux et mauvais,
mais leur non-contrôle par une raison éduquée.
L'homme ne peut réaliser
toutes ses dispositions naturelles qu'en vivant en société - état de
culture - et en développant la vertu, cet acte par lequel un être humain
montre la force de sa volonté « dans l'accomplissement de son devoir »
(Métaphysique des moeurs).
Si «la passion est une maladie de l'âme», pour Kant, c'est parce qu'elle
aliène la raison et porte atteinte à la liberté.
La nature de l'homme est
de s'élever non de régresser.
L'état de culture est un progrès - malgré «
davantage de vices » - vers l'autonomie.
La question posée par le sujet
est donc paradoxale :
- si je contrarie ma nature, je ne peux pas progresser puisque le propre
de la nature humaine est d'être perfectible ;
- si je suis ma nature, je risque de ne satisfaire que mes désirs, mes
penchants, mes instincts, ce qui est le propre de l'homme « innocent » à l'état de nature -, mais contraire à la perfectibilité.
L'homme, pour devenir un être moral, doit donc « exercer une contrainte
sur lui-même », sur sa nature, et en même temps suivre sa nature qui lui
permet de s'améliorer.
L'éducation est identifiée alors à la socialisation.
C'est pourquoi le verbe
suivre, contrairement à la définition donnée au début, n'est pas synonyme de passivité.
Suivre, c'est alors
chercher ce qu'est sa nature humaine, sa propre nature.
Cette quête de soi nous fait découvrir l'action morale
véritable : faire son devoir par pur devoir, respecter l'humanité en moi-même et en autrui.
La morale exige donc la construction d'une contrainte de soi par soi et la production d'une loi à laquelle je vais
obéir.
Elle implique la liberté, attestée justement par l'existence de lois dérivées de la raison pratique : ce
pouvoir de légiférer est un pouvoir de porter des jugements de valeur.
« L'homme a un penchant à s'associer, car dans un tel état, il se sent plus qu'homme par le développement de
ses dispositions naturelles.
Mais il manifeste aussi une grande propension à se détacher (s'isoler), car il trouve
en même temps en lui le caractère d'insociabilité qui le pousse à vouloir tout diriger dans son sens ; et de, ce
fait, il s'attend à rencontrer des résistances de tous côtés, de même qu'il se sait par lui-même enclin à résister
aux autres.
C'est cette résistance qui éveille toutes les forces de l'homme, le porte à surmonter son inclination
à la paresse, et, sous l'impulsion de l'ambition, de l'instinct de domination ou de cupidité, à se frayer une place
parmi ses compagnons qu'il supporte de mauvais gré, mais dont il ne peut se passer.
L'homme a alors parcouru
les premiers pas, qui de la grossièreté le mènent à la culture dont le fondement véritable est la valeur sociale
de l'homme [...] .
Sans ces qualités d'insociabilité, peu sympathiques certes par elles-mêmes, source de la
résistance que chacun doit nécessairement rencontrer à ses prétentions égoïstes, tous les talents resteraient
à jamais enfouis en germes, au milieu d'une existence de bergers d'Arcadie, dans une concorde, une
satisfaction et un amour mutuel parfaits ; les hommes, doux comme des agneaux qu'ils font paître, ne
donneraient à l'existence plus de valeur que n'en a leur troupeau domestique [...].
Remercions donc la nature
pour cette humeur non conciliante pour la vanité rivalisant dans l'envie, pour l'appétit insatiable de possession
ou même de domination.
Sans cela toutes les dispositions naturelles excellentes de l'humanité seraient
étouffées dans un éternel sommeil.
»
Kant..
»
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