Etre libres nous fait-il libres ou esclaves ?
Extrait du document
«
La liberté semble difficile à circonscrire et à définir : elle s'applique effectivement à des domaines divers tels que la
liberté politique, la liberté de penser, de s'exprimer,… Pourtant nous avons tous une expérience, un désir de liberté.
Descartes nous dit d'ailleurs qu'il s'agit d'une notion commune en ce que nous la connaissons tous en nous, nous
l'éprouvons.
Il est vrai que l'homme est de manière fondamentale libre, sûrement parce qu'il n'est pas prédéterminé
ni par des instinct, ni par une nature.
Etre libre, fondamentalement c'est pouvoir faire ce que l'on a envie de faire.
C'est donc une capacité à choisir, à décider de nos actions.
C'est pourquoi la formulation du sujet peut sembler
paradoxale : comment la capacité d'être libre pourrait nous faire esclave ? Le verbe « rendre » semble sousentendre que la liberté peut nous transformer.
Si, comme le dit Sartre, nous sommes « condamnés à être libre », si
nous ne pouvons pas choisir la liberté, ne sommes-nous pas esclave de la liberté ? N'est-ce pas cette liberté qui
nous permet de nous faire esclave ? N'y a t il pas par suite une liberté première qu'il nous faut actualiser, pour
laquelle nous devons nous battre pour qu'elle soit réellement liberté ?
Etre libre, c'est être capable de faire ce que l'on veut
- Comme nous l'avons dit, il semble paradoxale de dire qu'être libre, nous rend esclave.
La notion d'esclave se définit
justement par le contraire de la liberté.
Est dit esclave celui qui est privé de liberté et est sous l'autorité d'un
maître.
Or, dans l'antiquité, le mot Liber a été formé pour opposé le citoyen qui peut faire ce qu'il a envie et de
l'esclave qui n'a aucun droit et ne peut faire que ce que veut son maître.
Le terme liber signifie en effet sous son
sens usuel « sans contrainte ».
Etre libre, c'est donc avoir la capacité de faire ce que l'on veut, sans qu'aucune
contrainte vienne nous perturber.
En effet, l'expérience simple d'un comportement libre enseigne qu'il n'est soumis à
aucun empêchement.
- Pour Descartes, ainsi, la liberté est présente partout où l'homme existe.
Il loge la liberté en la faculté du librearbitre.
Le libre arbitre désigne la capacité d'un sujet à privilégier une voie dans une multitude de choix.
Dès que
nous choisissons par exemple, ce que nous voulons faire de nos loisirs, nous exerçons notre liberté.
« Il est si
évident que nous avons une volonté libre, qui peut donner son consentement ou de ne le pas donner quand bon lui
semble, que cela peut être compté pour une de nos plus communes leçons.
» (Principes de philosophie)
Il semble donc évider que la capacité à être libre, le libre-arbitre nous permet dans toutes les situations à choisir
parmi les multiples voies qui s'offrent à moi.
De même pour Sartre, la liberté est la capacité qui s'actualise de pouvoir
dire « oui » ou « non ».
- D'ailleurs, c'est bien parce que la première nature d'être libre nous permet de véritablement faire ce que l'on a
décidé, de choisir entre le bien et le mal que les lois nous considèrent responsables et que nous pouvons avoir à
répondre de nos actes.
Tous les systèmes juridiques se basent sur ce postulat.
C'est parce que l'homme est
considéré comme un être libre, qui choisit ses actions qu'il peut répondre de ses actes et être jugé.
La
responsabilité juridique et morale présuppose toujours la liberté comme préalable.
La liberté fait de nous des êtres condamnés à être libres et préférant s'asservir
- Pourtant, nous dit Sartre, « l'homme est condamné à être libre ».
Cela pour
lui ne voulait pas dire que quelqu'un oblige l'homme à être libre, mais
justement que personne n'a créé l'homme et son plan d'action n'est pas
prédéterminé par un quelconque instinct ou une quelconque nature.
Pour le
philosophe, l'existence précède l'essence chez l'homme, c'est-à-dire que
l'homme n'est que ce qu'il fait.
Aucun Dieu n'a pas fixé sa nature et par ce
fait, il n'y a pas de valeurs ou d'ordre à suivre.
C'est à l'homme de se choisir.
« C'est ce que j'exprimerai en disant que l'homme est condamné à être libre.
Condamné, parce qu'il ne s'est pas créé lui-même, et par ailleurs cependant
libre, parce qu'une fois jeté dans le monde il est responsable de tout ce qu'il
fait.
» ( L'être et le néant) Si donc nous ne pouvons pas choisir la liberté,
c'est que nous sommes justement pas libre fondamentalement de choisir ou
de refuser la liberté.
Nous sommes soumis à la liberté, nous sommes ses
esclaves.
- On peut d'ailleurs par la suite penser que c'est bien parce que cette liberté,
le fait d'être libre, sans pouvoir s'échapper, sont si lourds que l'homme choisit
souvent d'y renoncer et de se soumettre à un maître.
Pour Kant, les hommes
préfèrent en effet rester esclave, ne pas avoir à décider par eux-mêmes.
« La paresse et la lâcheté sont les causes qui expliquent qu'un si grand
nombre d'hommes[…], restent cependant volontiers, leur vie durant,
mineurs, et qu'il soit si facile à d'autres de se poser en tuteurs des
premiers.
»( Qu'est-ce que les lumières ?) D'ailleurs le célèbre écrivain russe,
Dostoïevski, affirmait de même : « il n'y a qu'une chose que les hommes préfèrent à la liberté, c'est l'esclavage.
»
Cette liberté subie mène donc l'homme souvent à s'aliéner pour ne plus porter le poids de ses actions.
Nous pouvons
ainsi trouver des exemples de secte où les membres donnent leur vie à ce qu'ils considèrent un maître.
De même
intellectuellement, on peut se contenter d'affirmer ce qu'affirme quelqu'un que l'on juge supérieur à nous, sans
prendre la peine de réfléchir plus.
D'ailleurs même en disant que l'homme peut renoncer à sa liberté, remettre sa vie entre les mains de quelqu'un
autre, on admet que l'homme a en premier lieu, le choix de conserver sa liberté ou de la refuser.
Cette possibilité de
renoncer à sa liberté est énoncée par plusieurs philosophes tel Rousseau : « « renoncer à sa liberté, c'est renoncer.
»
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