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Est-on d'autant plus libre qu'on a plus de raisons d'agir comme on le fait ?

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« Vocabulaire: Agir: opération propre à un être animé (agent): avoir une activité qui transforme une réalité donnée dans laquelle le sujet ne reconnaissait pas l'objet de son désir. RAISON: Du latin ratio, « calcul », « faculté de calculer, de raisonner » (en grec logos). * Au sens subjectif : mode de penser propre à l'homme (lui-même défini comme « animal raisonnable »). * Par opposition à l'intuition : faculté de raisonner, c'est-à-dire de combiner des concepts et des jugements, de déduire des conséquences. * Par opposition à la passion ou à la folie : pouvoir de bien juger, de distinguer le vrai du faux, le bien du mal. * Par opposition à la foi : la « lumière naturelle », naturellement présente en tout homme. * Par opposition à l'expérience : faculté de fournir des principes a priori (c'est-à-dire indépendants de l'expérience) * Au sens objectif : principe d'explication, cause (exemple : les raisons d'un phénomène). * Argument destiné à légitimer un jugement ou une décision (exemple : donner ses raisons). L'idée de liberté évoque l'absence de contrainte, d'agir en dehors de toute obstacle.

La liberté serait d'abord "faire ce que je veux".

Mais cette première définition est insuffisante: il faut demander à quelles conditions la volonté elle-même est libre.

Autrement dit, suis-je vraiment libre de faire ce que bon me semble ? Mon vouloir n'estil pas déterminé par des forces que je ne connais ni ne contrôle ? Mais lorsque je délibère en vue d'agir, une raison de prendre tel parti plutôt que tel autre est bien un motif qui oriente mon choix, qui détermine ma volonté à se porter vers une certaine direction.

Les raisons et les motifs limitent donc la liberté de la volonté, puisqu'ils la déterminent.

L'homme libre ne serait-il pas celui qui choisirait sans raisons ? Mais déjà, le terme apparemment clair de « raisons (d'agir) laisse apercevoir une difficulté.

Une raison est un motif, c'est-à-dire une détermination rationnelle de la volonté ; on ne doit pas appeler raison n'importe quel mobile sensible, qui vient du corps, des passions.

Une raison est un élément susceptible d'intervenir dans une délibération où je pèse le pour et le contre.

Par exemple, la nocivité du tabac est une raison pour choisir d'arrêter de fumer, mais l'accoutumance que j'ai contractée vis-à-vis de cette substance n'en est pas une pour continuer; elle n'est qu'un mobile (venu du corps) qui me pousse à faire abstraction des raisons.

Cette distinction est importante, car il est clair que l'abondance des mobiles sensibles qui peuvent me déterminer à prendre un parti n'est pas une garantie — bien au contraire — de la liberté de mon choix. Il faut donc étudier le problème en ne considérant que la soumission de ma volonté aux seules raisons (motifs rationnels).

Il est bien évident qu'un motif est une force qui incline ma volonté à prendre un parti plutôt que tel autre.

Toute la question est cependant de savoir jusqu'où s'étend la puissance des motifs.

C'est le problème fondamental de la liberté humaine : les motifs sont-ils pour la volonté des éléments qui orientent le choix, mais ne le déterminent pas (la décision restant finalement à une volonté absolument libre) ? Ou bien la décision finale n'est-elle que la simple résultante des forces que représentent les motifs, la volonté n'étant rien d'autre que cette résultante ? On peut choisir la première solution, en se reposant sur l'expérience intime que chacun possède de sa liberté : Descartes fait remarquer que même lorsque j'ai toutes les raisons de choisir dans un sens, il reste en mon pouvoir de choisir définitivement dans l'autre sens.

Au père Mesland, Descartes fait remarquer que je peux très bien faire le pire tout en voyant le meilleur ; cela signifie que ma liberté précède en fait toutes les raisons que je peux avoir d'agir; il existe en tout homme un pouvoir absolu, fondamental de se déterminer librement, indépendamment des motifs et même éventuellement contre eux. La puissance que nous vivons en nous-mêmes et qui vise la liberté n'est pas nécessairement celle de la passion destructrice et violente.

Dans ses Méditations, Descartes reconnaît en lui sa volonté "si grande que je ne conçois point l'idée d'aucune autre plus ample et plus étendue".

En cet infini pouvoir de la volonté que nous expérimentons en nous-mêmes, il voit la marque et la ressemblance de Dieu.

La liberté humaine est infinie, à l'image de la puissance infinie de notre volonté.

Il n'appartient qu'à nous d'affirmer ou de nier, de faire ou de ne pas faire, de poursuivre ou de fuir tout ce que nous voulons.

La liberté n'est pas un état d'indifférence dans lequel je suis plongé lorsque toutes les contraintes sont absentes — car en ce cas je ne choisis pas ou bien je choisis au hasard —, mais bien dans l'acte volontaire par lequel je donne mon assentiment ou je le refuse.

Nous serons donc d'autant plus libres que nous agirons en raison, c'est-à-dire en connaissance de cause.

Plus la connaissance des conséquences et des effets de nos actes nous est claire, plus notre volonté trouve de facilité à s'exercer dans ses jugements.

Si la volonté est une puissance infinie, la raison en est le seul guide pour la bien conduire. Les motifs passionnels, les désirs, selon une formule de Leibniz, "inclinent sans nécessiter ".. »

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