EST-IL RAISONNABLE D’ASPIRER AU BONHEUR ?
Publié le 05/01/2023
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«
EST-IL RAISONNABLE D’ASPIRER AU BONHEUR ?
Le bonheur, un idéal de l’imagination : Texte de Kant
Le bonheur semble être le bien suprême auquel aspire l’ensemble des hommes : « Nous le cherchons
toujours pour lui-même, et jamais pour une autre raison [...] c’est ce qui par soi seul rend la vie
souhaitable et complète », dit Aristote dans Ethique à Nicomaque (Livre I.
chap.
VII, §5 et 7,
Flammarion G.F.)
Tous les autres biens désirés ( par exemple le confort ou l’amour) le sont en vue du bonheur, ce sont
des moyens et non une fin en soi comme lui.
Le bonheur peut se définir formellement comme un état durable de complète satisfaction,
d’harmonie et de plénitude avec soi-même et avec le monde.
L’étymologie du mot « bon-heur »
vient de la langue des augures (latin): « bonum augurium », « bon augure » signifiant la chance, la
« bonne heure », la bonne étoile sous laquelle on naît.
La part de chance échue à la naissance ;
cependant, celui qui ne naît pas sous une bonne étoile peut-il prétendre au bonheur ?
Travailler à être heureux ne va-t-il pas constituer alors l’ouvrage de sa vie ?
Le bonheur serait donc le fruit de la liberté telle que la conçoit le sens commun, à savoir vivre en
harmonie, se réaliser ainsi que réaliser ce qui tient à cœur.
Tous les manques seraient-ils alors
comblés , toutes les tensions apaisées et l’homme éprouverait-il un sentiment de plénitude sereine ?
On peut se demander si cette conception n’est pas illusoire, le malheur étant un élément inévitable de
l’existence humaine.
En effet, nos désirs sont variés et variables, parfois inconciliables.
Notre raison
est alors bien incapable de définir clairement le contenu de ce bonheur et ce qu’il faudrait faire pour
l’atteindre.
c’est pourquoi la satisfaction d’un désir a souvent des effets secondaires imprévisibles qui
rendent malheureux.
Ensuite, notre propre constitution physique et psychique nous empêche de
ressentir de façon constante une satisfaction intense.
Enfin, la réalité dans son ensemble, naturelle et
humaine, ne concorde pas avec nos aspirations.
Ce constat peut déboucher sur un pessimisme radical
niant la valeur de la vie.
Malgré tout, les hommes ne renoncent pas complètement à leurs rêves, ils essaient de les adapter à la
réalité.
Ainsi, de nombreux philosophes ont tenté de distinguer de vrais biens (l’honnêteté, le plaisir
intellectuel...) et des biens illusoires ( la richesse, le pouvoir, les honneurs...) et de proposer une
sagesse qui définisse les principes généraux d’un bonheur humainement accessible.
Texte de Kant : le bonheur, un idéal de l’imagination :
Kant montre ici, à partir de nombreux exemples, que la raison humaine est incapable de définir
clairement des règles de conduite pour parvenir à coup sûr au bonheur, auquel pourtant tous les hommes
aspirent.
«[…]le malheur est que le concept du bonheur soit un concept tellement indéterminé (1) que, même si
tout homme désire d’être heureux, nul ne peut jamais dire pourtant avec précision et en restant
cohérent avec soi-même ce que vraiment il souhaite et veut.
[…] S’il veut la richesse, combien de
soucis, quelle envie et que d’embûches ne risque-t-il pas d’attirer ainsi sur sa tête !
S’il veut beaucoup de connaissances et de discernement, peut-être cela ne pourra-t-il que se
transformer en un regard d’autant plus aiguisé pour lui montrer d’une façon seulement d’autant plus
effrayante les maux qui jusqu’ici restent encore dissimulés à ses yeux et qui ne sauraient pourtant être
évités, à moins que cela ne fasse que charger d’encore plus de besoins ses désirs, qu’il a déjà bien
assez de difficulté à satisfaire.
S’il veut une longue vie, qui va lui soutenir que ce ne serait pas là une
longue misère ? S’il veut du moins la santé, combien de fois les ennuis physiques l’ont-ils préservé
d’excès où l’aurait fait tomber une pleine santé, etc ? Bref, il est incapable de déterminer selon un
principe(2) avec une complète certitude ce qui le rendrait vraiment heureux, -car pour cela
l’omniscience (3) serait indispensable.[…]
Le bonheur est un idéal, non pas de la raison, mais....
»
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