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Est-il possible d'agir à l'encontre de son propre jugement ?

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« Analyse du sujet : q Il est impératif de commencer par tenter de définir ce qu'est le jugement.

Le jugement, en philosophie, désigne une faculté essentielle de l'entendement humain qui permet à l'homme d'évaluer la vérité d'une proposition, ou la valeur d'une action.

Le jugement peut aussi bien porter sur des décisions de justice, il s'agit alors de dis cerner le juste de l'injuste, sur la vérité ou la fausseté d'une proposition que sur l'efficacité d'une action.

Le dis cernement est sans doute le premier mouvement du jugement mais , en outre, le jugement est une prise de décision.

Nous pourrions donc le décomposer, en premier lieu, en un acte de discernement où se dégagent plusieurs possibilités, puis en un choix parmi ces possibilités donc en une prise de décision. q C ependant, si le jugement est une action, il semble bien plutôt la précéder.

O n sépare en effet classiquement dans une théorie de l'action le moment de la réflexion de celui de l'action effective.

Le jugement, dans ce déc oupage, semble occuper une position charnière, juger c'est décider.

L'action sera l'effectuation, la réalisation d'une décision. q Quand nous pensons au jugement nous le revêtons souvent d'un caractère définitif, je rends mon jugement comme je rends ma sentence.

Dans ce cas, l'action et le jugement définitif coïncident.

Le jugement est la fin de la réflexion.

M ais il es t évident que l'on peut se rétracter, corriger son jugement parce que de nouveaux éléments nous obligent à le réévaluer.

La stabilité d'un jugement varie cependant beaucoup avec le caractère, il y a ceux qui ne réévaluent jamais leur jugement, on les dira obstinés, et ceux qui changent d'opinions c onstamment. q Il faut enfin remarquer l'adjectif qualificatif « propre », le jugement est propre à celui qui le tient, il n'est donc pas influencé ou du moins il est luimême son principe d'action.

Il ne se contente pas, par exemple, d'obéir à un ordre. Problématique : Dans la situation la plus courante, il semble que j'agis à la s uite d'un jugement.

Je peux juger de ce qui m'est le plus utile, donc sur les moyens en vue d'une fin.

Je peux juger sur la moralité d'une action avant de l'accomplir, et il semble bien que mon action soit bien l'application de ce jugement.

Néanmoins, il se peut que l'action que j'entreprends ne soit pas une réalisation adéquate du jugement, ou encore il se peut que quelque chose en moi me pousse à agir contre mon jugement.

S'ensuit-il de ces remarques qu'une action à l'encontre de son propre jugement s oit possible ? 1.

Il est impossible d'agir contre son propre jugement a) b) c) d) Nous pouvons commencer par remarquer qu'il es t possible que le résultat de l'action aille à l'enc ontre de mon intention.

Je peux, en effet, vouloir faire le bien et faire le mal, faire tout pour réussir et manquer mon coup.

C es « ratés » sont peut être réductibles avec l'expérience ou avec une autre forme de savoir, il semble qu'aucune science de l'action ne nous permette avec assurance de viser juste. A utrement dit il y a dans le monde de la contingence, de l'imprévisible et même si nous soutenons que tout obéit à des lois, il est impossible de prendre en compte l'ensemble des paramètres.

Dans toute action nous opérons un plan plus ou moins complexe, plus ou moins réaliste ou applicable en vue d'une réuss ite.

Le jugement peut porter aussi bien sur la préparation, sur les moyens que sur la fin. De là ne s 'ensuit pas, pour autant, que l'on puisse agir à l'encontre de son jugement.

Si je juge que pour réussir une action donnée je dois us er de tels moyens et non pas de tels autres, et que cette action échoue, je n'ai pas agi contre mon jugement, c'est peut être seulement que j'ai mal jugé.

Le jugement n'est donc pas du tout synonyme d'intention.

Il est sans doute impossible que le jugement soit toujours s ûr, bien juger c'est choisir la meilleure possibilité.

Il est de la nature du jugement sur l'action de ne jamais être certain du point de vue de sa réussite. C oncernant le jugement sur la fin d'une action, il faut se placer du point de vue de ce que nous recherchons pour elle-même.

C ette fin qui se suffit à soi-même est le bonheur.

De ce point de vue nous pouvons dire, que certaines de nos actions vont à l'encontre de notre bonheur.

M ais, là encore, c'est peut-être parce que nous nous trompons sur le bonheur, parce que nous faisons une erreur de jugement sur ce que doit être la vie bonne, que nous pouvons sans le savoir travailler contre nous-mêmes. P our que l'action puisse aller véritablement à l'encontre d'un jugement qui concerne cette action, il est clair qu'il faut qu'au moment de l'action j'agisse c ontrairement à mon jugement. 2.

Il est possible d'aller à l'encontre des jugements « propres » a) P our penser la possibilité d'agir à l'encontre d'un jugement il faut bouleverser le schéma d'action, cec i en étendant notre recherche à d'autres types d'action.

On s'aperçoit alors que nombre de nos expériences s emble contredire la thèse que nous avons défendu en première partie.

Tout d'abord nous pouvons contester que ce soit un jugement rationnel qui nous pousse à agir.

Il est évident que je n'ai pas, dans tout type d'action, le temps de bien juger.

A insi, je peux agir par réflexe sans qu'aucun jugement réfléchi n'en soit à l'origine.

Je peux également agir sous l'empris e d'une passion, par peur ou par habitude.

Il se peut ainsi qu'avant le moment de l'action, j'ai émis tel jugement et que je me retrouve, malgré moi, à l'instant même où je dois agir dans l'incapacité de l'accomplir, comme si un autre que moi agissait à ma place. b) Je peux donc agir contre un jugement à partir du moment où je n'arrive pas à maîtriser mes passions.

Je parviendrais d'autant mieux à ajuster mes actions à mes jugements que je suis exercé à me dominer.

C ela s ignifie donc que, quand je passe à l'action, je peux quitter le terrain réflexif du jugement.

Q uand je juge sur une action future, proche ou lointaine, je me projette dans un monde irréel, je ne suis pas en « chair et en os » dans le moment de l'action.

Je pourrais avoir tous les éléments en main, au moment de l'action tous mes jugements peuvent s'effondrer. c) C ela est plus visible dans le cas du jugement moral.

Par exemple je juge que telle action ou encore que telle chaîne d'actions est juste ou morale.

Il se peut que je cède à la passion, que je sois tenté de mal agir sans pour autant émettre un nouveau jugement avant l'action.

Je conserve le même jugement mais je ne l'applique pas.

Il est important de rappeler ici qu'il s'agit d'un jugement propre et non pas d'une sorte d'autorité morale qui me donnerait mauvaise conscience s ans que les préceptes ou commandements auxquels elle me contraint ne soit issus de mon propre jugement. Conclusion : Il arrive souvent que nous jugions une ac tion après coup et qu'elle nous apparaisse alors véritablement comme juste ou injuste, bonne ou mauvaise.

Q uand nous agissons, nous sommes pris par l'action, cette pris e dans l'action rend difficile les conditions qui rendent pos sible un véritable jugement.

A gir contre un jugement propre, ce n'est pas seulement agir non intentionnellement, c'est ne pas être celui qui décide, c'est être le jouet de passions, de réflexes, d'un type de jugements aussi qui ne sont pas véritablement des jugements propres.

A gir contre s on jugement est donc plus rare qu'agir non intentionnellement, mais ceci ne déresponsabilise pas pour autant le sujet agissant dans la mesure où il doit être attentif, et s'exerc er à se dominer.

L'homme peut-il pour autant, en toutes c irconstanc es, juger avant toutes ses actions ? C 'est en tout cas une attitude, un choix, celui qui agit sans juger dans des habitudes, s ous le coup de la passion ne choisit-il pas, parfois, de ne pas choisir ?. »

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