Est-ce la nécessité qui pousse l'homme a travailler ?
Extrait du document
«
introduction
L'enfant ne travaille pas, il joue.
L'homme ne peut pas que jouer, il doit travailler.
Qu'est-ce qui pousse l'homme à
travailler ?
Première partie : La pénurie de la nature ?
a) De nombreux mythes font état d'un âge d'or, d'une époque disparue où la nature fournissait tous les biens en
abondance.
Le travail, alors, n'était pas nécessaire.
Cf.
la Genèse : l'Éden, le paradis terrestre, est un jardin.
Si les
premiers hommes sont condamnés à travailler, après leur péché, c'est parce que Dieu maudit le sol : « il produira des
épines et des ronces ».
L'homme gagnera son pain « à la sueur de son front ».
b) Les hommes ont donc lié la nécessité du travail à une pénurie objective de la nature, que cette pénurie soit
originelle ou non, accidentelle ou essentielle.
Travailler, c'est travailler à vaincre ce manque en transformant la
nature pour en tirer plus qu'elle ne donne immédiatement.
La fin du travail, ce qu'il vise et ce qui marquerait son
terme, c'est l'abondance retrouvée.
Il faut pour cela, se rendre « maître et possesseur de la nature ».
c) Mais la pénurie de la nature ne peut être définie indépendamment des besoins de l'homme.
Elle leur est relative.
Deuxième partie : Des besoins trop nombreux ?
a) L'oisiveté de l'homme à l'état de nature, selon Rousseau, ne résulte pas
que de la « fertilité naturelle » de la terre ; elle vient aussi de ce que ses
désirs « ne passent pas ses besoins physiques » (Discours sur l'inégalité).
L'accord immédiat de notre nature avec la nature supprime le travail.
b) Ce qui nous conduit à travailler serait alors une inadéquation entre nous et
la nature, qui s'élargit démesurément lorsque nous laissons nos besoins
étendre leurs exigences.
Les désirs insatiables de l'homme le poussent à
travailler.
L'homme est la victime de sa propre démesure : qu'il limite ses
besoins, s'il veut moins travailler, à ceux qui sont naturels et nécessaires.
En
devenant maître de lui-même, l'homme s'épargnerait le souci de devenir maître
de la nature.
Cf.
les morales de l'Antiquité.
c) Cette sagesse n'est pas celle de notre culture.
Celle-ci a pris conscience
que le travail n'est pas qu'une relation entre l'homme et la nature, entre des
besoins maîtrisables et des objets destinés à les satisfaire.
Il est, aussi, une
relation de l'homme avec lui-même, avec son humanité.
Troisième partie : Le travail, réalisation de l'humanité ?
a) Hegel.
Dans la dialectique du Maître et de l'Esclave, ce dernier transforme
sa nature en transformant la nature par son travail.
On pourrait dire que rien ne pousse l'homme à travailler, sinon
sa propre essence, sa liberté, qui cherche à se déployer.
b) Pour Marx, alors que « l'animal ne produit que sous l'empire du besoin physique immédiat », l'homme, lui, « produit
alors même qu'il en est libéré et il ne produit vraiment que lorsqu'il en est libéré.
Le produit de l'animal fait, comme
tel, partie de son corps physique, tandis que l'homme se dresse librement face à son produit » (Marx, Manuscrits de
1844, Éditions Sociales, p.
63-64).
De plus, « ce qui distingue dès l'abord le plus mauvais architecte de l'abeille la plus experte, c'est qu'il a construit la
cellule dans sa tête avant de la construire dans la ruche ».
« L'homme n'opère pas seulement un changement de formes dans les matières naturelles ; il y réalise du même coup
son propre but dont il a conscience, qui détermine comme loi son mode d'action, et auquel il doit subordonner sa
volonté » (Le Capital, I, 3, 7).
Ainsi, le travail humain en général ne peut se confondre avec la production animale,
relation simple de l'être avec la nature : il est une humanisation de la nature dans laquelle se réalise la nature de
l'homme.
L'homme travaille parce que le travail est ce par quoi l'homme se fait en faisant autre chose.
c) Mais l'homme ne travaille pas « en général » : son activité concrète, les objets qu'il transforme et les moyens qu'il
utilise varient au cours de l'histoire.
« Ce que sont (les individus) coïncide avec leur production, aussi bien avec ce
qu'ils produisent qu'avec la façon dont ils le produisent.
» Dès lors, si l'acte productif, l'objet produit et tous les
moyens qui permettent de le produire sont définis, déterminés par un autre que le travailleur, si donc celui-ci, dans
certains modes de production, est étranger au travail, il devient aussi étranger à lui-même.
L'aliénation du travail
fait que le travailleur fuit un travail où il ne se réalise pas, où il perd sa réalité (Manuscrits p.
57)..
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