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EST-CE CONDAMNER UNE THEORIE POLITIQUE QUE DE LA QUALIFIER D'UTOPIE ?

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« EST-CE CONDAMNER UNE THÉORIE POLITIQUE QUE DE LA QUALIFIER D'UTOPIE ? RAPPEL DE MÉTHODE • On présente un plan fondé sur la recherche de nombreuses déterminations de la notion clé du sujet (= l'utopie). • En suivant un plan du type Thèse/Antithèse/Synthèse, on s'efforce de montrer que l'utopie est un mixte de pensée et d'imaginaire (= Première partie), qu'en cela elle est progressive (= Deuxième partie), mais qu'elle trouve sa limite en ce qu'elle ne se soucie guère de réfléchir sur les moyens de son éventuelle réalisation (= Troisième partie). PROPOSITION DE PLAN I.

Introduction — On qualifie généralement d'utopie tout rêve de songe-creux. — La conception d'un Etat juste éloigne cependant aisément de la réalité empirique. — Suffit-il donc de qualifier d'utopie une théorie politique pour la condamner ? Première partie. Etymologiquement, «u-topie» signifie: «d'aucun lieu».

L'insularité du pays d'Utopie imaginé par Thomas More n'est, bien sûr, pas accidentelle.

Platon ne situait-il pas la merveilleuse civilisation engloutie évoquée dans son Critias sur une île (= l'Atlantide) ? • Et si ce n'est pas d'île qu'il s'agit, l'exotisme est ici de rigueur: le cadre géographique de l'utopie est nécessairement singulier. L'utopie a partie liée avec le rêve ; elle est onirique, en ce qu'elle tourne délibérément le dos à la réalité concrète pour mieux tendre vers un ailleurs dont les plans sont confiés à l'imagination. L'utopie est, tout compte fait, chimérique.

Elle semble n'avoir de réalité que dans la fantaisie, dans l'imagination de philosophes dépourvus de tout sens pratique. Deuxième partie. L'utopie a l'indéniable mérite d'invoquer de «bons sentiments»: cette générosité, pour impuissante qu'elle soit, n'est pas sans avoir des vertus consolatrices — durant les périodes d'oppression notamment: « le poète en des jours impies/Vient préparer des jours meilleurs./ll est l'homme des utopies ;/Les pieds ici, les yeux ailleurs », écrit Victor Hugo dans Les Rayons et les ombres. Parce qu'elle rêve, l'utopie est donc, en un sens, progressive.

Elle est, déclare Anatole France, «le principe de tout progrès (...).

De rêves généreux sortent les réalités bienfaisantes» (Discours aux étudiants, 1910). Parce qu'elle a une fonction critique, parce qu'elle dénonce — implicitement, au moins — les tares de l'ordre existant, l'utopie est levain social.

Elle peut même jouer un rôle historique et devenir l'étendard de mouvements sociaux bien réels (ex.

: projets messianiques de Thomas Munzer pendant la Guerre des paysans en Allemagne). Troisième partie. L'utopie semble, toutefois, vouée à n'être jamais que contemplative, quasi indifférente à sa propre réalisation.

«La cité dont nous avons tracé le plan, déclare Socrate, dans la République, n'est fondée que dans nos discours» (Platon, La République, livre IX). L'utopie est donc susceptible de revêtir une fonction narcotique : elle peut, à sa façon, être un opium du peuple.

Opposant son propre socialisme — «scientifique» — aux diverses variantes du socialisme «utopique», Marx va jusqu'à prétendre que «quiconque compose un programme de société future est réactionnaire» (Lettre à Beesly, 1869). Aussi ne s'agira-t-il pas de proposer, une fois de plus, un modèle définitif ni une configuration statique de la société future.

Ce qui caractérise, en effet, l'utopie, c'est que l'image de l'avenir y est purement et simplement juxtaposée à l'état présent, comme son contraire abstrait. Conclusion L'utopie est muette sur le chapitre des moyens de sa propre effectuation.

Aussi, plutôt que de prendre ses désirs pour des réalités, le réformateur social doit-il s'efforcer de « dégager des principes mêmes du monde les nouveaux principes» (Marx, Lettre à Ruge, septembre 1843).. »

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