Epicure: C'est un grand bien, croyons- nous, que le contentement
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PRESENTATION DE LA "LETTRE A MENECEE" D'EPICURE
La Lettre à Ménécée est l'un des rares écrits qui nous restent de l'oeuvre
immense d'Épicure (vers 341-270 av.
J.-C.), que nous connaissons surtout à
travers son disciple Lucrèce.
Le projet du fondateur de l'École du Jardin, à une
époque où la Grèce traverse une grave crise politique, économique et sociale,
est de fonder une sagesse sur une physique matérialiste.
Souvent mal compris
et caricaturé, Épicure ne cessera d'inspirer les philosophes athées cherchant à
penser le bonheur de l'homme ici et maintenant.
Il s'agit de méditer sur les causes du malheur humain et de montrer quels en
sont les remèdes afin d'atteindre l'ataraxie* : la philosophie d'Épicure est une
médecine de l'âme, qui nous enseigne la conduite à adopter à l'égard de nos
craintes et de nos désirs.
"C'est un grand bien, croyons-nous, que le contentement, non pas qu'il
faille toujours vivre de peu en général, mais parce que si nous n'avons
pas l'abondance, nous saurons être contents de peu, bien convaincus que
ceux-là jouissent le mieux de l'opulence, qui en ont le moins besoin.
Tout
ce qui est fondé en nature s'acquiert aisément, malaisément ce qui ne
l'est pas.
Les saveurs ordinaires réjouissent à l'égal de la magnificence
dès lors que la douleur venue du manque est supprimée.
Le pain et l'eau
rendent fort vif le plaisir, quand on en fut privé.
Ainsi, l'habitude d'une
nourriture simple et non somptueuse porte à la plénitude de la santé, elle fait l'homme intrépide dans ses
occupations, elle renforce grâce à l'intermittence de la frugalité et de la magnificence, elle apaise devant les
coups de la fortune.
Partant, quand nous disons que le plaisir est le but de la vie, il ne s'agit pas des plaisirs déréglés ni des
jouissances luxurieuses ainsi que le prétendent ceux qui ne nous connaissent pas, nous comprennent mal ou
s'opposent à nous.
Par plaisir, c'est bien l'absence de douleur dans le corps et de trouble dans l'âme qu'il faut
entendre.
Car la vie de plaisir ne se trouve point dans d'incessants banquets et fêtes, ni dans la
fréquentation de jeunes garçons et de femmes, ni dans la saveur des poissons et des autres plats qui ornent
les tables magnifiques, elle est dans la tempérance, lorsqu'on poursuit avec vigilance un raisonnement,
cherchant les causes pour le choix et le refus, délaissant l'opinion, qui avant tout fait désordre dans l'âme.
"
ÉPICURE.
La portée de ce texte est considérable, d'abord parce qu'il remet en question les opinions reçues sur l'épicurisme.
Pour rappeler ces dernières, vous pouvez vous référer, par exemple, à la description que Sganarelle fait de son maître
Dom Juan, dans la pièce de Molière.
Il le qualifie de « pourceau d'Épicure ».
Les raisonnements d'Épicure offrent ici un
saisissant contraste avec l'idée reçue selon laquelle l'épicurisme est la « philosophie des débauchés ».
Votre commentaire doit mettre l'accent sur le caractère presque ascétique du bonheur épicurien.
La conception
épicurienne du plaisir est en grande partie négative.
En effet, le plaisir n'est pas défini comme une jouissance, mais
comme une « absence de douleur dans le corps et de trouble dans l'âme» (ligne 14).
Loin de prôner le rejet de toute
norme morale qui entraverait la réalisation de chacun de nos caprices, Épicure propose une éthique de l'usage raisonné
du plaisir.
Pour montrer les limites d'une telle thèse, vous pouvez, en vous appuyant sur les analyses de Platon ou de Kant,
soutenir que l'idée de plaisir est radicalement étrangère à la véritable moralité, et lui est même souvent opposée.
En
effet, rechercher le plaisir, c'est obéir à un intérêt.
On bannit de la sorte le désintéressement qui caractérise, selon
eux, la conduite moralement bonne.
ANALYSE ET PROBLEMATISATION DU SUJET.
§ Ce texte est tiré de la Lettre à Ménécée d’Epicure, et traite du désir et du bonheur, définit ici comme
plaisir mais comme un plaisir tout particulier.
C’est à une redéfinition du plaisir que nous avons affaire
dans ce texte, et cette définition passe par une définition du désir.
§ Le bonheur semble de prime abord pourtant distinct du plaisir et donc du désir qui en est le moteur, au
sens où la satisfaction de tous nos désirs semble un plaisir illusoire.
Mais alors le bonheur serait-il
l’absence même de désir ? Faut-il se déprendre de tout désir, de toute satisfaction, donc de toute
sensibilité pour pouvoir être heureux ? Le bonheur est-il alors un état supérieur à celui de l’homme, que
l’homme, sensible ne pourrait atteindre, dans la mesure où il serait trop haut pour lui ?
§ Il semble bien pourtant qu’il soit possible à l’homme d’être heureux, mais ce bonheur est-il alors le vrai
bonheur ou seulement une illusion due au désir ? Le désir serait-il alors l’autre du bonheur, cette illusion
de bonheur dont les hommes se contentent « faute de mieux » et afin de satisfaire à un plaisir
immédiat ? Le bonheur serait alors conditionné non pas par les désirs, et à fortiori par la satisfaction de.
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