ÉPICTÈTE: «Quant aux désirs, pour le moment, renonces-y totalement»
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Thème 368
ÉPICTÈTE: «Quant aux désirs, pour le moment, renonces-y totalement»
La condamnation du désir par la philosophie
«Quant aux désirs, pour le moment, renonces-y totalement.» Épictète, Manuel (lei siècle ap.
J.-C.).
• Pour la philosophie stoïcienne, le désir est dangereux, et il vaut mieux y renoncer.
C'est la seule voie possible pour
qui veut atteindre la sagesse qui consiste en l'«ataraxie» ou absence de trouble, obtenue par la reconnaissance
rationnelle de la nécessité qui gouverne le monde.
• D'après Épictète, il y a deux sortes de désirs: les premiers portent sur «ce qui ne dépend pas de nous»: notre corps,
la richesse, la célébrité, le pouvoir...
Désirer ces choses-là, c'est s'exposer aux plus grands malheurs puisque ce sont
des choses qui nous échappent complètement et qui sont très changeantes.
On pourrait donc désirer au moins «ce qui
dépend de nous», c'est-à-dire désirer la sagesse.
Mais celle-ci ne peut être l'objet que d'une décision et non d'un
désir: celui qui se contente de la désirer souffrira de ne pas y parvenir.
Mieux vaut donc renoncer à tous les désirs et
s'efforcer d'être purement rationnel.
• On peut remarquer toutefois qu'Épictète précise «...pour le moment».
Le sage pourra laisser libre cours à son désir de
sagesse lorsqu'il sera parvenu à celle-ci.
Mais ce «désir» aura changé de signification et se confondra avec la sagesse.
LE STOÏCISME OU L’AMOUR DU DESTIN.
Nous pouvons reprendre l’analyse en partant, à l’instar des stoïciens, de trois affirmations de base peu contestables :
le bonheur serait d’avoir tout ce que je désire ; la liberté, de faire tout ce que je veux ; l’homme, esclave de ses
désirs, n’a ni bonheur, ni liberté.
La folie des désirs.
Mais pourquoi en va-t-il ainsi ? C’est qu’avoir tout ce que je désire et faire tout ce que je veux ne sont pas en mon
pouvoir.
Obtenir tout cela ne dépend pas de moi, mais de circonstances extérieures, de la coopération d’autrui, de la
chance, bref de l’ensemble de la nature.
Par exemple, être aimé ne se commande pas.
Cela dépend des sentiments
d’autrui.
Je peux me mettre en frais pour séduire, mais je ne suis jamais assuré du résultat, ni de la naissance, ni de la
durée d’un amour.
Gagner un combat ne dépend pas davantage de ma seule décision : je peux m’entraîner le plus
possible, mais la victoire dépendra de la force relative de l’adversaire.
Faire fortune ne découle pas de mon simple
désir.
Je peux acheter un billet de loterie, mais je n’ai pas le pouvoir de faire en sorte qu’il soit gagnant.
C’est le hasard
qui en décidera.
Je peux ouvrir un commerce, créer une entreprise, mais je me livre alors à tous les aléas de l
‘économie.
En poursuivant tout cela, l’amour, la gloire, la richesse, le pouvoir, je désire des choses que ma volonté et
mon pouvoir ne suffisent pas à m’octroyer, mais qui dépendent de l’ordre général de l’univers.
C’est donc, semble-t-il,
pure folie que d’y faire tenir mon bonheur.
Sauf à être particulièrement favorisé par le sort, j’ai de forces chances de
ne pas tout obtenir, d’être dès lors frustré et malheureux.
La sagesse serait donc de limiter mes désirs à ce qui dépend
de moi, à ce que je suis certain de pouvoir posséder et conserver.
C’est précisément ce que disent les penseurs
stoïciens.
Mais qu’est-ce qui dépend de moi ? Qu’est-ce qui est en mon pouvoir ?
Ce qui dépend de moi.
Mon pouvoir d’accomplir des actes est très limité, par les lois de la nature ou les lois juridiques.
Quant à mon pouvoir
de faire réussir mes actions, il est quasiment nul, puisque cela dépend du concours du reste du monde, ou encore de la
chance.
En y réfléchissant bien, je ne suis pas absolument certain d’être encore vivant demain ou tout à l’heure.
Tant
de choses peuvent arriver…
En revanche, il est une chose qui ne dépend que de moi, sur laquelle j’ai un pouvoir absolu : c’est ma volonté.
Moi seul
décide de ce que je veux.
Par exemple, si je ne veux pas aller à un endroit, on peut m’y contraindre par la force, mais
on n’aura pas pu changer ma volonté.
Je découvre, par cette réflexion, que je possède, comme chaque homme, une
volonté absolument libre, ou encore un libre-arbitre, comme disent les philosophes.
Je dispose donc d’un domaine de
pouvoir et de liberté, qui est tout intérieur à moi-même.
Le secret du bonheur.
A partir de ce constat, je peux raisonner de la façon suivante :
_ certes, je n’ai pas le pouvoir de faire tout ce que je veux ;
- mais je peux choisir librement ce que je veux ;
- donc, je peux ne vouloir faire que ce que je peux faire, ou ce que je suis en train de faire (je peux limiter ma volonté
à mon pouvoir) ;
- dès lors, je fais exactement ce que je veux ;
- donc, selon la définition, je suis libre, pleinement.
La liberté intérieure de ma volonté assure, si j’en use bien, la liberté extérieure de tout mon être..
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