En quoi toute forme d'esclavage est-elle contraire au droit ?
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Introduction
Lorsque Platon, dans son dialogue du Gorgias, met en opposition Socrate et Calliclès sur la question de la justice, ce
dernier affirme un droit de nature.
Ce droit est en fait celui du plus fort sur le plus faible, droit de domination naturel
de l'un sur l'autre.
Calliclès reproche à Socrate d'apporter la confusion entre loi des hommes et lois naturelles, selon
qu'il en appelle de l'un et de l'autre dans son discours.
Cette opposition entre droit naturel et droit constitutionnel
reste d'actualité, les différentes formes de violences et d'esclavagismes existant encore aujourd'hui de par le
monde.
Les dictateurs et oppresseurs de ce monde justifient d'ailleurs leurs actes par ce droit naturel de domination
des forts sur les faibles (soit pour la préservation du pouvoir, soit par l'argument du respect des lois de la nature).
La question ainsi posée – en quoi toute forme d'esclavage est-elle contraire au droit ? – trouve son paradoxe dans
le concept ambigu et polysémique de droit.
Reste donc, pour répondre à cette question, à déterminer philosophiquement si et en quoi un droit, autre que
naturel, s'oppose à la domination des plus forts sur les plus faibles ?
Plus, nous pouvons légitimement nous demander si la liberté humaine est possible et inaliénable ?
I.
Légitimité d'un droit contre la loi naturelle du plus fort ?
C'est sur un point de vue politique que ce questionnement se fonde tout
d'abord.
De manière exemplaire, Rousseau (Cf.
Discours sur l'origine et les
fondements de l'inégalité parmi les hommes) s'interrogera sur les origines et la
légitimité de l'établissement d'un droit capable (ou non) de régler les rapports
entre les hommes.
Pour ce faire il met en place l'hypothèse (polémique) d'un
état fictif de nature pour contrebalancer avec cette même hypothèse dont se
sont servis Hobbes (Cf.
Léviathan) et Locke (Cf.
Traité du gouvernement
civil) pour affirmer, d'une certaine manière, cette loi de domination (par la
force pour le premier ou par un mouvement libéral pour le second) des plus
forts sur les plus faibles.
Hobbes reprendra d'ailleurs Plaute (« homo homini
lupus », qui signifie « l'homme est un loup pour l'homme ») pour affermir cette
idée de guerre intestine qui subsiste entre les hommes à l'état naturel.
Mais,
selon Rousseau, et c'est l'objet de son discours, un autre état de nature est
envisageable que celui de l'esclavagisme et de la barbarie de l'homme sur
autrui.
Le coup de force de Rousseau est de montrer en quoi le despotisme, la
révolution sanguinaire et l'esclavagisme n'ont aucune légitimité du point de
vue naturel (l'homme-animal n'a cure de cette volition de domination puisqu'il
n'est gouverné instinctivement que par deux passions : « l'amour de soi » et
la « pitié »).
C'est bien plutôt la marque perverse du phénomène culturel et
social.
C'est en ce sens que toute forme d'esclavagisme est légitimement
condamnable par le droit le plus primaire : la loi instinctive de la nature.
Les
inégalités sociales et la possibilité d'abus de domination esclavagiste des
régnants sur les sujets est donc bien le fait de la civilisation et non du droit naturel.
Retrouvons cependant l'argument de Calliclès repris dans le discours nietzschéen (Cf.
Généalogie de la morale) : il y
a bien, naturellement, des forts (actifs et nobles) et des faibles (réactifs et sournois).
En ce sens, il n'y a pas
d'esclavagisme mais une simple adéquation aux desseins naturels.
C'est un renversement des valeurs et donc un
renversement de la logique du droit auquel s'attelle Nietzsche.
Les forts naturels, bien loin de dominer concrètement
les faibles naturels, sont plutôt à la merci des procédés anti-naturels (morale, religion, lois punitives) que créés ces
derniers pour se préserver de cette force légitime.
Plus, dans le combat éternel et universel de la force vive (dont la
figure emblématique est Dionysos) contre la faiblesse réactive (Apollon), cette dernière tend inéluctablement à
s'imposer nous dit celui qui « philosophe à coups de marteaux ».
C'est donc une nouvelle forme d'esclavagisme
pervers à laquelle nos générations successives assistent impuissantes : le droit artificiel du plus faible contre le plus
fort.
Cet assujettissement pernicieux et illégitime tend donc à s'imposer non pas contre le droit, mais par le biais
d'un droit constitué contre un droit naturel et légitime.
Avec cette conséquence que le droit constitué par les
faibles est bien plutôt la forme la plus vile de toutes les formes de domination que l'histoire de l'humanité est
connue.
II.
Une liberté humaine inaliénable ?
Cette dévaluation philosophique et conceptuelle de la morale et de la politique humaines ne doit cependant pas nous
faire oublier les heures sombres et monstrueuses que l'humanité à connue.
Pensons à la conquête, au nom de la
religion, des « nouveaux mondes » (sous les traits de Pizarro par exemple).
Pensons à l'esclavagisme du peuple noiraméricain dénoncée enfin par Abraham Lincoln et la guerre de Sécession (entre l'Union américaine et certains états
esclavagistes du sud de l'Amérique).
Pensons à la colonisation européenne du continent africain, à l'effroyable projet
funeste des nazis...
L'esclavagisme est, malheureusement, de tous temps présent sur la surface du globe.
La
« Déclaration universelle des droits de l'homme » (le 10 décembre 1948 à Paris) est le symbole de reconnaissance de.
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