En quoi les Fables de La Fontaine que vous avez lues et étudiées sont-elles des fables ?
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La Fontaine a tant renouvelé le genre de la fable qu'il est impossible d'en donner une définition unique. Si certaines fables sont de véritables fables, d'autres sont modifiées pour devenir une forme ouverte propre à toutes les adaptations.
I.
Le poète respecte la définition ésopique de l'apologue et s'y conforme fréquemment.
La définition ésopique
Depuis les origines, la fable se compose de deux parties inégales : le «corps », qui est le récit; et l'«âme» qui est la moralité. La Fontaine ne l'ignorait naturellement pas, puisqu'il rappelle cette définition dans la préface qu'il rédige pour le premier recueil des Fables.
Le passage du «corps» à l'«âme» s'effectue selon le principe de la transposition : le lecteur adapte au monde des humains le comportement animal, en tirant la leçon de l'ensemble de la fable. C'est pourquoi celle-ci est par essence allégorique*: elle exprime une idée en la représentant sous l'aspect d'un animal.
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La Fontaine a tant renouvelé le genre de la fable qu'il est impossible d'en donner une définition unique.
Si certaines
fables sont de véritables fables, d'autres sont modifiées pour devenir une forme ouverte propre à toutes les
adaptations.
I.
Des fables véritables
Le poète respecte la définition ésopique de l'apologue et s'y conforme fréquemment.
La définition ésopique
Depuis les origines, la fable se compose de deux parties inégales : le «corps », qui est le récit; et l'«âme» qui est la
moralité.
La Fontaine ne l'ignorait naturellement pas, puisqu'il rappelle cette définition dans la préface qu'il rédige
pour le premier recueil des Fables.
Le passage du «corps» à l'«âme» s'effectue selon le principe de la transposition : le lecteur adapte au monde des
humains le comportement animal, en tirant la leçon de l'ensemble de la fable.
C'est pourquoi celle-ci est par essence
allégorique*: elle exprime une idée en la représentant sous l'aspect d'un animal.
Des fables conformes à la tradition
De nombreuses fables contenues dans les Livres VII à XII correspondent à cette définition traditionnelle.
Les
Animaux malades de la peste (VII, 1), Le Lion, le Loup et le Renard (VIII, 3), Les Obsèques de la Lionne (VIII, 14) ou
L'Âne et le Chien (VIII, 17) s'inscrivent dans cette perspective ésopique.
Examinons par exemple Le Rat et l'Huître (VIII, 9).
Trente-trois vers en composent le récit : parti à lu découverte du
monde, un Rat de «peu de cervelle» est victime de son inexpérience ; il se laisse piéger par une Huître.
Six vers en
dégagent la morale, qui commence par ces mots : « Cette fable contient plus d'un enseignement».
Et La Fontaine
de fustiger l'ignorance.
Rien n'est plus conforme aux lois du genre.
II.
Des fables modifiées
Toutes les fables de La Fontaine ne sont toutefois pas construites sur ce modèle.
La présence des humains et du
fabuliste constitue une modification de l'apologue traditionnel.
La présence des humains
La fable ésopique excluait la présence des humains.
Or, non seulement, celle-ci est de plus en plus forte dans les
Livres VII à XII, mais certaines fables campent exclusivement des hommes.
Tel est te cas des Deux Aventuriers et
le Talisman (X, 13), de Démocrite et les Abdéritains (VIII, 26), de La Mort et le Mourant (VIII, I) ; de La Laitière et
le Pot au lait (VII, 9).
Il s'ensuit que la fable se transforme souvent en satire, ce qu'elle n'était pas avant La Fontaine.
Le Savetier et le
Financier (VIII, 2) en est une parfaite illustration.
Entre la crainte des voleurs et les soucis que lui cause la gestion
de sa fortune, le Financier en perd le sommeil.
La dénonciation de la cupidité est évidente.
La présence du fabuliste
La fable avait toujours été un genre impersonnel dans lequel le narrateur s'effaçait derrière ses personnages.
La
Fontaine n'intervient certes pas en permanence.
Mais sa présence se fait sentir.
Tantôt ce sont des confidences en
demi-teintes comme l'éloge de la rêverie qui clôt La Laitière et le Pot au lait (VII, 9).
Tantôt l'aveu devient plus
poignant:
« Ne sentirai-je plus de charme qui m'arrête? Ai-je passé le temps d'aimer?» (Les Deux Pigeons, IX, 2, v.
82-83).
Ces accents personnels se devinent encore dans Les Deux Amis (VIII, Il); dans Un animal dans la Lune (VII, 17),
dans Le Paysan du Danube (XI, 7) ou dans L'Ours et l'Amateur des jardins (VIII, 10).
III.
Une forme ouverte
Cette double modification transforme la fable en une forme ouverte propre à embrasser tous les genres et à devenir
elle-même poème.
Des genres littéraires différents
Si la fable se change en satire, elle peut aussi prendre l'aspect d'une petite pièce de théâtre, dans Les Deux Coqs
(VII, 12) ou Le Lion, le Loup et le Renard (VIII, 3) par exemple.
Ailleurs elle se change en un poème philosophique,
comme dans le long Discours à Madame de La Sablière (fin du Livre IX).
Parfois elle est une prise de position
politique : le prologue de L'Écrevisse et sa Fille (XII, I0) souligne l'habileté stratégique de Louis XIV «qui tout seul
déconcerte une ligue à cent têtes».
À d'autres moments, elle est un poème d'amour (Tirais et Amarante, VIII, 13).
Narrative par le récit, dramatique par le dialogue, la fable tient tour à tour de l'épopée, de la comédie, de la
tragédie, de l'églogue ou du conte.
Des poèmes
La Fontaine assouplit ainsi la rigidité de la fable pour dire ses rêves, ses regrets, ses nostalgies et pour en faire le
réceptacle en réduction de tous les genres littéraires.
Il l'érige en poème.
Pour mesurer l'évolution qu'il lui fait subir,
il convient de se rappeler que depuis l'Antiquité la fable n'avait jamais eu de prétentions littéraires et qu'on ne lui en
avait jamais accordé.
Avec La Fontaine la fable annexe tout le champ de l'imaginaire, de la sensibilité et de la
poésie..
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