En quoi le concept d'erreur permet-il de mieux comprendre la faute?
Extrait du document
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Remarques sur l'intitulé du sujet :
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Il est question de « mieux comprendre » quelque chose, c'est-à-dire d'augmenter l'intelligibilité d'un
phénomène (qui est ici = la faute, c'est-à-dire une action contraire à la morale).
D'où le présupposé : comme
telle, la faute n'est pas parfaitement compréhensible, c'est-à-dire qu'on ne parvient pas à en rendre raison) =
présupposé du sujet)
La faute pose donc un certains nombres de difficultés qu'il faudra soigneusement expliciter afin de voir
comment le concept d'erreur peut, dans une certaine mesure, les résoudre.
Ainsi, il faudra donc définir avec précision ce qu'est l'erreur et en quoi il se distingue de la faute (en effet, la
dualité doit être maintenue : il s'agit de prendre un concept pour en éclairer un autre et non de les identifier)
Toute la difficulté tient donc à ce que la faute est du registre de l'agir moral et l'erreur de l'ordre du
connaître.
Faute consiste à aller à l'encontre de ce qui est juste ou bien, elle est contraire au devoir ou à
l'obligation ; l'erreur consiste à se méprendre sur ce qui est vrai (se tromper = tenir pour vrai ce qui est faux et
inversement)
Du coup, la question consiste à articuler cognitif et éthique, théoria et praxis, et à déterminer ce que cette
articulation a de pertinent et de fécond pour le but proposé (mieux comprendre la faute) Comment ?
Méthode : aller du simple, plus évident au complexe.
Problématique :
« Nul n'est méchant volontairement » disait Socrate.
Par là, il voulait souligner que la faute relève bien souvent
d'une erreur ; ce faisant, il tendait à faire de celui qui a mal agit, quelqu'un qui a d'abord mal pensé.
L'intérêt de ce
rapprochement consiste à rendre intelligible la faute.
En effet, pourquoi pourrions-nous mal agir en connaissant ce
que nous devons-faire ? Toutefois, le concept d'erreur peut-il être mobilisé dans le seul but de déculpabiliser le
fautif ?
1-
LE CONCEPT D'ERREUR MANIFESTE CE QUE LA FAUTE COMPORTE D'IGNORANCE
Pour Socrate, seule l'ignorance permet de comprendre que l'on puisse
mal agir.
En cela, il s'oppose à l'idée selon laquelle, on peut volontairement
fauter : la faute consiste à prendre un mal pour un bien, c'est-à-dire les
confondre.
Exemple : la lâcheté : le lâche s'imagine que la fuite face au
danger est un bien ; or, sur l'instant et de son point de vue, il semble bon de
fuir, mais, en soi, ou pour son armée, la fuite est un mal, car le bien réel =
courage.
Le concept d'erreur mobilisé pour éclairer la faute permet de saisir ce
que celle-ci comprend d'innocence.
En effet, nous désirons être heureux dit
Socrate à Menon ; or, si l'on savait que le mal commis n'est pas un bien mais
au contraire ce qui nous rendra malheureux, comment pourrions-nous le
vouloir ? Parce que ‘lon ne peut pas vouloir être malheureux, on ne peut
vouloir être mauvais et c'est cela dont rend raison le concept d'erreur : le mal
commis résulte d'une méprise, d'un défaut de connaissance du vrai bien.
C'est dans le « Gorgias » de Platon que l'on trouve exposé le paradoxe
socratique : « Nul n'est méchant volontairement ».
Cette thèse surprenante
de prime abord doit être reliée aux deux autres : « Commettre l'injustice est
pire que la subir » ; « Quand on est coupable il est pire de n'être pas puni que
de l'être ».
L'injustice est un vice, une maladie de l'âme, c'est pourquoi, nul
ne peut vraiment la vouloir (on ne peut vouloir être malade), et la punition,
qui est comparable à la médecine, est bénéfique à celui qui la subit.
L'attitude commune face à la justice est résumée par Polos dans « Gorgias » et Glaucon au livre 2 de la
« République ».
Les hommes souhaiteraient être tout-puissants et pouvoir commettre n'importe quelle injustice
pour satisfaire leurs désirs.
Il vaut donc mieux, selon eux, commettre l'injustice que la subir.
Cependant, comme
subir l'injustice cause plus de dommage que la commettre de bien, les hommes se sont mis d'accord pour faire des
lois en vue de leur commune conservation.
Nous ne sommes donc justes, en vérité, que par peur du châtiment.
Si
nous pouvions être injustes en toute impunité, comme Gygès qui possède un anneau le rendant invisible, nous
agirions comme lui : nous ne reculerions devant aucune infamie pour nous emparer du pouvoir, devenir tyran.
Bref,
nous serions injustes pour satisfaire nos désirs.
Platon réfute inlassablement cette thèse, cette hypocrisie qui consiste à ne vouloir que l'apparence de la justice,
l'impunité, pour pouvoir accomplir n'importe quelle injustice.
Le nerf de l'argument consiste à montrer que, en réalité, « Commettre l'injustice est pire que la subir ».
C'est par
une ignorance du bien réel que les hommes souhaitent pouvoir être injustes.
Parce que nous confondons le bien
apparent (le plaisir, la satisfaction immédiate des désirs les plus déréglés) avec le bien réel, la santé de l'âme.
Nous
croyons vouloir commettre l'injustice, alors que c'est impossible, que « nul n'est méchant volontairement », parce
que nous voulons.
Etre injuste est faire son malheur en croyant se faire plaisir.
L'antagonisme entre le point de vue habituel et la position de Socrate est magnifiquement exposé par le débat entre
Calliclès et Socrate, dans le « Gorgias ».
Calliclès prétend : « Voici, si l'on veut vivre comme il faut, on doit.
»
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