En quoi la technique est-elle révélatrice de l'intelligence humaine ?
Extrait du document
«
Vocabulaire:
TECHNIQUE
Tout ensemble de procédés pour produire un résultat utile.
La technique moderne s'appuie sur la science; mais elle
s'en distingue puisque la science est un effort pour expliquer ce qui existe tandis que la technique cherche à
produire ce qu'on souhaite qui soit — qui n'est pas.
La technique peut se définir comme un vouloir, incarné en un
pouvoir par l'intermédiaire d'un savoir.
Comme adjectif: par opposition à esthétique, qui concerne des procédés susceptibles d'être développés et transmis,
et non des dons ou capacités innées.
Intelligence
Du latin intelligere, « comprendre ».
Appartient davantage au vocabulaire de la psychologie que de la philosophie.
Chez Bergson cependant, l'intelligence est la faculté d'adaptation à la matière en vue de l'action, c'est-à-dire la
faculté de fabrication des outils conceptuels aptes à l'organiser et à la transformer, par opposition à ['intuition,
comme mode de connaissance de la durée et de l'esprit.
[Introduction]
« L'intelligence, écrit Bergson dans L'Évolution créatrice, est caractérisée par la puissance indéfinie de décomposer
suivant n'importe quelle loi et de recomposer suivant n'importe quel système.
» Elle se présente donc d'abord comme
une faculté active et consciente d'adaptation aux situations les plus variées et les plus complexes.
La technique,
quant à elle, est l'ensemble des procédés que l'homme met en oeuvre pour réaliser certains résultats déterminés.
Nous allons voir comment, à travers ses différents développements, la technique apparaît comme la révélation de
l'intelligence humaine.
[I.
La technique humaine comme moyen d'adaptation de l'homme à la nature]
L'animal est caractérisé par son instinct, c'est-à-dire un ensemble d'activités héréditaires, propres à toute une
espèce et directement adaptées à des buts (reproduction, survie, défense...).
L'homme est dépourvu de toute
aptitude instinctive, il apparaît même à sa naissance au sein de la nature comme « le plus faible et le moins
intelligent des animaux », disait Jean Itard.
Tandis que l'animal possède dans ses aptitudes naturelles tout ce qui lui
permettra de se protéger, l'homme apparaît bien démuni face à la nature.
Il doit donc par son intelligence trouver les
moyens qui lui permettront de s'adapter à un environnement qui lui est le plus souvent hostile.
On peut dire que c'est la technique qui fournit à l'homme l'ensemble de ces moyens.
Ce qui caractérise
spécifiquement la technique humaine est le fait qu'elle est consciente tandis que l'activité animale s'effectue sans
réflexion.
Le travail est de prime abord un acte qui se passe entre l'homme et la
nature.
L'homme y joue lui-même vis-à-vis de la nature le rôle d'une
puissance naturelle.
Les forces dont son corps est doué, bras et
jambes, tête et mains, il les met en mouvement, afin de s'assimiler des
matières en leur donnant une forme utile à sa vie.
En même temps qu'il
agit par ce mouvement sur la nature extérieure et la modifie, il modifie
sa propre nature, et développe les facultés qui y sommeillent.
Nous ne
nous arrêterons pas à cet état primordial du travail, où il n'a pas encore
dépouillé son mode purement instinctif.
Notre point de départ c'est le
travail sous une forme qui appartient exclusivement à l'homme.
Une
araignée fait des opérations qui ressemblent à celles du tisserand, et
l'abeille confond par la structure de ses cellules de cire l'habileté de
plus d'un architecte.
Mais ce qui distingue dès l'abord le plus mauvais
architecte de l'abeille la plus experte, c'est qu'il a construit la cellule
dans sa tête avant de la construire dans sa ruche.
Le résultat auquel le
travail aboutit, préexiste idéalement dans l'imagination du travailleur.
Ce n'est pas qu'il opère seulement un changement de forme dans les
matières naturelles ; il y réalise du même coup son propre but dont il a
conscience, qui détermine comme loi son mode d'action, et auquel il
doit subordonner sa volonté.
Marx.
Ce passage est extrait du livre I du Capital, dans lequel Marx étudie le
développement de la société capitaliste.
Il s'agit ici de montrer en quoi le travail est spécifiquement humain, c'està-dire propre à l'homme.
Marx caractérise d'abord le travail comme une action par laquelle l'homme donne forme utile à la matière.
Cette
action est une transformation par laquelle il « s'assimile » les matières naturelles, c'est-à-dire leur imprime sa marque
en les façonnant de telle sorte qu'elles répondent, sous forme d'objets, aux besoins de son corps.
À ce niveau, rien ne vient pourtant encore distinguer le travail de l'homme de celui des animaux et notamment des
insectes qui, eux aussi, comme l'araignée ou l'abeille, transforment la matière et lui impriment leur marque.
C'est pourquoi Marx doit préciser que cette définition donne simplement à l'homme le rôle d'une « puissance naturelle.
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