En quoi la croyance religieuse se distingue-t-elle des autres croyances ?
Extrait du document
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Croire, c'est en partie ne pas être certain, c'est attribuer à ce en quoi l'on croit qu'une probalité d'existence.
Pis, il y
a une sorte d'irrationalité dans la croyance puisque l'on croit malgré l'absence de preuves assurées, contre la réalité
qui ne propose pas de manière flagrante la présence ou la certitude de ce en quoi l'on croit.
C'est l'aspect
contrefactuel de la croyance: de même, par habitude, nous avons vu jusqu'ici le soleil se lever, et nous croyons qu'il
se lèvera demain, même si ce raisonnement inductif n'apporte pas la certitude d'un tel événement mais seulement
l'attribution d'une probabilité proche de 1.
Habitués à voir deux choses se présenter ensemble dans l'ordre des
événements, nous concluons de l'approche du deuxième fait lorsque nous voyons se présenter le premier.
On croit
donc contre les faits en ce sens que l'on prédit quelque chose qui ne s'est pas encore présenter à nous.
Nous
complétons le donné, nous lui attribuons un sens qui n'est pas immanent, qui n'est pas présent de lui-même devant
nous.
Le mot religion vient de religare du latin qui signifie relier, soit ici relier l'homme à une entité transcendante,
responsable de la création, même si incommensurable avec le monde que nous habitons (elle est infinie nous sommes
finis, elle est parfaite nous sommes imparfaits...).
Comme toutes les croyances, elle fait appel à quelque chose qui
n'est pas présent hic et nunc, pour compléter le donné, pour lui donner un sens de l'extérieur.
La seule différence
résidant peut-être dans ce à quoi elle fait appel.
Mais alors, l'objet d'une croyance détermine-t-il cette croyance au
point d'en faire plus qu'une attitude psychologique, au point d'en faire autre chose qu'une simple croyance?
I.
Lucrèce: la croyance avant tout comme inadéquation de l'homme au monde
Dans De la Nature, Lucrèce renvoie toutes les croyances au même statut, qu'elles soient de l'ordre de la
superstition, ou encore d'ordre religieux.
Le terreau de toutes croyances est à chercher dans l'inadéquation
fondamentale de l'homme au monde qui l'oblige à poser, entre lui et la nature, des intermédiaires susceptibles
d'intervenir en sa faveur, capables de conjurer la mauvaise fortune.
Les superstitions, la religion, sont autant
d'explications que l'homme produit spontanément face à ce qu'il ne comprend pas.
En ce sens, la physique, ou
l'explication rationnelle du cosmos à partir des causes efficientes, simplement matérielles, apparaît comme le remède
pour distraire l'homme de telles dérives.
La théodicée, soit une explication mythique de l'origine dans laquelle figure l'action des dieux, doit bientôt s'effacer
pour laisser place à un travail de la raison.
L'homme fait appel aux dieux pour atténuer l'angoisse que génère la
grandeur impressionnante d'un univers arbitraire en première apparence.
Mais bien loin de calmer cette angoisse, la
religion, en conférant une finalité aux phénomènes, les rend d'autant plus étrangers, agissant comme un catalyseur
de cette angoisse primordiale.
L'esprit humain va bientôt saisir que les causes matérielles suffisent à expliquer
l'univers, en dehors de tout recours aux mythes.
La physique est cette entreprise qui n'a recours qu'à la réalité matérielle, et qui déduit les faits présents à partir des
faits antécédents, sans recourir aux caprices d'une divinité.
Nulle finalité ne traverse ce monde qui se réduit à une
composition d'atomes matériels.
Ces derniers, par l'ensemble possible de leurs combinaisons génèrent l'entièreté du
réel.
La croyance religieuse, tout comme les superstitions, naît de l'angoisse, ce n'est que ce sentiment originaire
qui la convoque avec nécessité, jusqu'à cet instant où l'homme saisit que la raison lui suffit, qu'il perd plus qu'il ne
gagne à recourir à ce qui le dépasse.
II.
Kant: la religion comme croyance rationnelle
Dans la Critique de la Raison Pure, Kant expose le programme de la raison humaine en trois questions: Que dois-je
faire? (morale), Que puis-je savoir? (épistémologie), et enfin, Que m'est-il permis d'espérer? (religion).
La religion
relève donc de la sphère de l'espérance, une espérance qui conjugue deux éléments ontologiquement distincts: le.
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