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En quel sens la société dénature-t-elle l'homme ?

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« Problématique: Il s'agit de discuter une thèse assez commune au XVIII ième siècle, mais encore assez vivace de nos jours, selon laquelle la vie en société, l'appartenance à un État organisé et à la civilisation, nous éloigneraient de notre véritable naute.

Il faut donc d'abord souligner tous les traits qui peuvent opposer la vie naturelle à la vie culturelle de l'homme et mettre en évidence les distorsions manifestes qui résultent de notre insertion dans les multiples structures artificielles que crée la vie en commun. Toutefois, une telle question repose sur une confusion entre deux signification du terme de nature: d'une part, la "nature", c'est l'absence de civilisation et il est évident que la vie en société nous fait perdre cette dimension de notre existence.

Mais, d'autre part, la "nature" d'une chose, c'est aussi son essence réelle et authentique.

Or, et c'est ce qui peut permettre la discussion, il n'est pas évident que l'absence d'organisation sociale et de convention constitue l'essence profonde de l'homme.

N'est-il pas plutôt cet animal qui ne peut vivre seul sans le soutien d'une société ? La société naît de l'interdépendance entre les hommes, de leur incapacité à satisfaire leurs besoins par euxmêmes.

La société ne naît donc pas ex nihilo, elle n'est pas une structure naturelle, puisque elle change et varie en fonction des individus qui en sont membres. Pour certains penseurs cet artifice peut d'ailleurs faire perdre à l'homme sa nature originelle.

Le tout est de savoir si cette dénaturation doit être envisagée en termes de gain pour l'espèce humaine ou au contraire en termes de perte. La société n'est-elle pas fondée sur le besoin des hommes, et la nécessité de trouver chez un autre la possibilité de satisfaire ce besoin ? La société naîtrait alors du besoin de trafiquer et permettrait à l'individu de pourvoir à ce que la nature lui a empêché d'accomplir par lui-même.

C'est donc, comme nous le verrons en deuxième lieu, que la nature de l'homme n'est pas sociable.

Que la société doit être envisagée comme un artifice.

Mais est-ce pour autant un artifice nécessaire ? La société n'est-elle pas le signe que l'homme ne saurait se satisfaire de lui-même ? Et ce sentiment n'est-il pas la source de davantage de désagrément que de progrès pour l'espèce humaine ? La société réalise ce que la nature échoue à accomplir Pour Smith, l'utilité collective ne suffit pas à elle seule à comprendre l'origine de la société.

C'est dans le penchant à trafiquer que l'auteur voit la source de la division du travail.

L'échange de biens entre les individus ne peut se faire que si chacun trouve dans le bien qu'il acquiert quelque chose qui « vaut » autant que le bien qu'il aliène : cette mesure commune n'est autre que la quantité de travail nécessaire à la production d'un bien donné.

Le penchant du trafic fait émerger un principe d'équivalence entre les biens de nature différente, ce qui rend possible la spécialisation dans son activité. Le penchant au trafic permet d'expliquer l'existence d'un ordre social spontané hors de tout accord conscient entre les hommes, donc sans contrat.

Les échanges interindividuels suffisent à produire un marché, dans lequel le prix et non pas, par exemple, le vote suffit à mettre tout le monde d'accord.

Si bien que l'antagonisme tant redouté entre l'intérêt privé et l'intérêt public se trouve supprimé par l'analyse de Smith.

Puisque en poursuivant leur intérêt propre, les hommes à leur insu, contribuent à une division du travail toujours plus poussée, à l'avantage de la société toute entière.

Alors que la notion de contrat social apparaît comme une solution au désordre des passions au moyen de ce ressort qu'est la crainte, la notion de marché substitue au conflit des passions la diversité des intérêts, régulée par le mécanisme du prix.

L'égoïsme privé n'apparaît plus comme ce que la société réfrène pour se conserver, mais au contraire, comme la source même du bonheur (pensé comme somme des bonheurs individuels). C'est ce que recouvre la citation suivante : « Chaque animal est toujours obligé de s'entretenir et de se défendre lui-même à part et indépendamment des autres, et il ne peu retirer la moindre utilité de cette variété d'aptitudes que la nature a réparties entre ses pareils.

Parmi les hommes, au contraire, les talents les plus disparates sont utiles les uns aux autres ; les différents produits de leur industrie respective, au moyen de ce penchant universel, à troquer et à commercer se trouvent mis pour ainsi dire en commune ou chaque homme pour aller acheter, suivant ses besoins de l'industrie de l'autre ».

La société pallie en un sens une inaptitude naturelle des hommes à pourvoir à leurs besoins par eux-mêmes. La société comme fin de l'état de nature. »

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