En quel sens la raison peut-elle se mettre au service de la religion ?
Extrait du document
«
Le sentiment est présent dans toutes les sociétés humaines et se manifeste sous des formes très différentes.
Mais il
s'accompagne toujours d'un ensemble de rites et de croyances par lequel un groupe humain se rattache à un ordre
universel et supra-humain.
Selon son étymologie, la religion est un lien ou une mise en relation.
En effet, religare en
latin signifie relier.
La religion relie l'homme à un être transcendant.
L'attitude religieuse par excellence est la foi et
celle-ci est foi en ce qui n'est pas démontrable, mais exige un degré de confiance au moins égal à celui produit par
la démonstration.
De ce point de vue, la raison semble ne pas pouvoir aider la religion, en ce qu'elle est
indémontrable mais aussi parce qu'elle prend naissance sur la faiblesse de la raison.
Mais la foi se veut lucide, pour
qu'il y est foi, ne faut-il pas qu'il y ait des raisons de croire? Dans ce sens, la raison ne peut-elle pas les fournir? De
plus, tout savoir venant de la raison ne repose lui-même sur une sorte de foi?
1.
La foi, provenant du coeur, s'oppose à la raison
Au sens théologique, la foi désigne la confiance absolue qu'on accorde à Dieu même lorsque la raison ne lui donne un
quelconque appui.
D'un point de vue religieux, c'est sur la faiblesse de la raison que se fonde la nécessité de la foi.
La rationalisation des vérités religieuses révélées témoignerait alors d'une attitude non religieuse.
Le dieu de la
religion, comme soulignait Pascal, n'est pas le Dieu abstrait des philosophes, c'est "un dieu sensible au coeur".
Pour
lui, la foi relève de l'ordre de la grâce; le moyen de la croyance est alors le "coeur".
" Voilà ce qu'est la foi, Dieu
sensible au coeur et non à la raison." (Pensées).
Saint Thomas d'Aquin affirme de même que la raison, en tant que
principe de connaissance ne peut atteindre dieu et n'être d'aucun secours à la connaissance divine : "en partant
des réalités sensibles, notre intellect ne peut pas parvenir à la vision de l'essence divine.[...] notre connaissance
naturelle a son origine dans les sens, elle ne peut donc pas s'étendre au-delà du point où le sensible peut la
conduire." (Somme théologique)
La foi est alors une conviction qui engage tout l'individu, une adhésion totale à ce qui reste pour lui un mystère
indéchiffrable.
Kierkegaard montre bien comment la foi suppose une confiance au-delà de ce que la raison peut
calculer.
De plus, les vérités de la raison chasse toutes croyances et donc détruit toute foi.
En effet, l'évidence
mathématique, par exemple, ne demande rien d'autre qu'une intelligence claire et distincte, à la raison.
L'évidence
est sa propre marque et n'est suspendue à aucune à aucune attitude de croyance et ne lui laisse aucune place.
2.
La raison, par sa critique, permet à la religion de se purifier et de s'élever
La critique rationaliste peut cependant permet d'éviter le corruption qui transforme immanquablement la religion en
superstition.
On ne peut en effet, accorder sa confiance sans aucune sorte de rationalité, sans aucune preuve.
Cela
mènerait au dogmatisme et au fanatisme.
Dès lors la raison permet à la religion de se purifier le contenu de la
croyance, à en mesurer les insuffisances et à former de Dieu une idée plus raffinée et plus profonde.
Spinoza dans l'éthique montre comment l'idée de dieu doit être purifiée de
toute projection anthropomorphique.
En effet, dire que Dieu punit ou avantage
des individus, ou comme dans l'antiquité, dire que les dieux peuvent être
jaloux ou aimés, cela revient à leur attribuer des qualités humaines, alors que
la perfection même qui revient au Dieu les place au-dessus de tout sentiment
humain.
De même, la raison peut aider la religion au sujet de l'interprétation des
Ecritures sacrées, ce corps de doctrines révélées qui émanent directement du
Divin.
Ces textes, comme la Bible par exemple, se révèlent très elliptiques et
nécessitent une réflexion quant à leur sens.
On réfléchit par exemple sur la
Bible depuis des siècles.
IL s'agit par la raison d'étudier les formules utilisées,
de mettre en relation les passages, pour éviter les contre-sens et les
mauvaises interprétations dont découlent inévitablement des mauvais
préceptes de vie pour les croyants.
3.
La raison peut ménager une place à la religion et donner des raisons
de croire là où le savoir est impossible
Il est en effet possible de laisser à la religion sa place aux côtés de la raison.
Cela revient à lui attribuer un domaine qui lui soit propre.
Si la raison a affaire
au savoir, elle peut décider ce qu'il faut croire, mais que l'on ne peut pas connaître.
La religion pourra dès lors se
prononcer sur ce qu'il n'est pas possible de connaître, mais qui peut pourtant être pensé.
On peut effectivement penser à une religion rationnelle qui dépendant des possibilités de spéculation de la raison
humaine.
La raison pourrait dès lors reconnaître qu'elle ne peut tout expliquer et circonscrirait un champ inexplicable
par elle.
En effet, le savoir ne répond à aucune question fondamentale de l'existence, la raison peut dès lors
assigner à la religion le rôle de se prononcer là où le savoir ne peut se prononcer.
C'est ce que fait Kant dans La critique de la raison pure, "j'ai du abolir le savoir pour lui substituer la croyance." Il
s'agit de ne pas vouloir connaître ce qui est inconnaissable et de laisser à foi un rôle positif.
Citation : « Je dus donc abolir/mettre de côté le savoir afin d'obtenir une place pour la croyance » / « Ich.
»
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