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En quel sens a-t-on pu dire que la philosophie est un art ?

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« En quel sens a-t-on pu dire que la philosophie est un art ? En revanche, ne peut-on pas dire aussi que l'art contient une philosophie ? INTRODUCTION. Suivant une attitude platonicienne, il est fréquent de répéter : « Impossible qu'en visant le Beau on atteigne ce qui n'est pas le Bien ».

Et de même, il serait tout aussi exact de remplacer la notion de Bien par celle de Vrai ou de dire que la philosophie vise l'art comme la Morale, la Logique et l'Esthétique visent les trois valeurs cardinales de l'axiologie.

C'est ainsi que M.

Souriau développait, en 1952, dans un article sur Art et Philosophie, reprise d'une conférence faite en Sorbonne, le thème des rapports entre l'Art et la spéculation philosophique montrant qu'il y avait nécessairement intersection entre les deux termes.

De fait, l'Art peut être à la fois la méthode, le moyen et la fin de la philosophie, tout comme on peut le considérer d'une façon diamétralement opposée, comme le pôle inverse de la vérité philosophique.

Nous tenterons donc, dans une première perspective, de reprendre le thème d'une conjonction entre Art et Philosophie, quitte à réfuter cette thèse au cours d'une seconde étape, et pour terminer par l'idée d'une corrélation entre la philosophie et l'Art. I.

LA PHILOSOPHIE COMME ANCILLA AESTETICAE 1.

Que la philosophie soit un art, voilà qui n'est pas douteux : il existe un art de philosopher, comme il y a un art de vivre, comme il y a un art de la fugue ou un art rhétorique ou un art poétique...

ou un art de la dissertation. 2.

Mais, alors, n'est-ce point confondre art et technique ? N'est-ce pas jouer sur les mots ? Même dans ces conditions, cependant on peut dire que l'art est la considération centrale de la philosophie, s'il est vrai que l'expérience sensible, fragmentaire et diffuse, ne nous renseigne guère sur la réalité, tandis que la connaissance scientifique, dans sa généralisation desséchante, et sa rationalité abstraite, ne nous permet pas de saisir le réel en tant que tel ; en sorte que seule l'expérience esthétique constituerait le repère central de la philosophie, la connaissance en soi et pour soi d'une réalité universelle et concrète, générale et unique, rationnelle et singulière tout à la fois.

Mais de même, l'art possède une philosophie implicite : l'objet d'art est un sujet de réflexion, de méditation, non point seulement pour le philosophe, mais pour le créateur qui s'interroge sur son oeuvre.

Il suffirait de lire, par exemple, les Entretiens sur l'Art de Rodin, recueillis par Gsell, et publiés aux éditions Bernard Grasset, pour se rendre compte de la façon dont un artiste sans aucune espèce de culture philosophique peut être plus philosophe encore que des métaphysiciens professionnels ! Rodin, en effet, touche immédiatement au coeur de la spéculation philosophique en analysant par exemple l'Homme qui marche, Les Bourgeois de Calais ou l'Éternel Printemps, car il retrouve sous le sensible apparent l'intelligible, la quintessence de la réalité matérielle. 3.

Ainsi, la philosophie en elle-même constitue peut-être le plus grand des arts, s'il est vrai que Pascal ou Lucrèce, Descartes ou Hölderlin, Platon ou Novalis, Ruskin ou Bossuet ont fait de la philosophie d'une manière extraordinairement poétique.

Un philosophe peu suspect d'esthétisme, Montesquieu, ne disait-il pas d'ailleurs : « Il y a quatre poètes : Platon, Malebranche, Shaftesbury, Montaigne » ? La philosophie est donc un art, mais l'art est philosophique dans la mesure où il permet une interprétation de la nature, une connaissance de l'homme et des choses irremplaçables par la connaissance scientifique ou par une interprétation technique. Lorsque Ronsard explique aux bûcherons de la forêt de Gastine ce que sont les chênes qu'ils vont abattre, la connaissance qu'il a des arbres n'est-elle pas plus profonde que celle du botaniste qui pourrait en faire une étude détaillée ? C'est donc qu'il y a interpénétration entre l'art et la philosophie et que si toute philosophie contient un art, tout art comporte une philosophie. II.

LA PHILOSOPHIE COMME ENNEMIE DE L'ART. 1.

L'esthétique a souvent été rejetée hors des branches de la philosophie proprement dite.

Il est constant d'entendre des logiciens, des épistémologistes, des historiens de la philosophie, des moralistes vilipender l'esthétique comme étant une science de l'art, absolument à part, entièrement différente de la philosophia perennis.

Les sociologues de l'école durkheimienne ont énormément insisté sur la futilité de l'art et son manque de sérieux ; l'art serait un jeu trivial, a-social, et plutôt nuisible au monde dans lequel vit le philosophe.

Il peut paraître ridicule qu'un philosophe perde son temps à étudier la comédie, voire la farce, le cinéma ou le dessin animé.

Ainsi la philosophie serait une étude extrêmement sérieuse non seulement dans sa méthode, mais aussi dans son objet même et il pourrait paraître indécent de l'abaisser à l'analyse de problèmes qui restent nettement en deçà de son objet. 2.

La philosophie n'étant point un art, le style du philosophe, sa langue, si poétique qu'elle soit (comme on pourrait la saisir, notamment, chez un Bergson par exemple), ne doivent pas davantage procéder de l'art qui vise à la Beauté mais bien de la logique, visant elle, à la vérité.

Le philosophe ne doit pas écrire joliment, ni agréablement, ni bellement, ni même bien, mais vrai.

« Ce qui a le plus manqué à la philosophie, dit Bergson au début de la Pensée et le Mouvant, c'est la précision.

» De fait, ce dont la philosophie a le plus besoin ce n'est pas d'élégance, c'est de véracité, de rigueur, de netteté, d'exactitude. 3.

Enfin, l'art ne contient nullement une philosophie explicite : à prendre les différentes expressions artistiques dans leurs spécifications les plus élémentaires, on ne voit pas en quoi le burin du graveur, le ciseau du statuaire ou la brosse du peintre ont le moindre rapport avec des concepts philosophiques.

L'art du potier, l'art. »

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