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En l'absence de culture, peut-on encore parler d'humanité ?

Extrait du document

« [Il existe bien une nature humaine.

Le destin d'un nourrisson livré à son sort se distingue de celui de l'animal à peine né. Les enfants sauvages demeurent malgré tout des êtres humains à part entière.] L'homme est génétiquement programmé pour apprendre «comme tout organisme vivant, écrit François Jacob dans La Logique du vivant, l'être humain est génétiquement programmé, mais il est programmé pour apprendre.» Voilà qui caractérise l'espèce humaine et elle seule.

Même si l'homme ne reçoit aucune éducation, il n'en demeure pas moins potentiellement apte à franchir la distance séparant la nature de la culture. Un nourrisson est déjà humain Même si cela semble paradoxal, l'on peut dire que ce qui caractérise l'humanité du nourrisson, c'est sa totale incapacité à se suffire à lui-même.

Le papillon sorti de sa chrysalide est déjà un être autonome.

Le petit d'homme, à la naissance, est totalement démuni.

En l'absence d'éducation, il est voué à un destin le situant au-dessous même de l'existence animale. L'enfant sauvage n'est pas une bête Même si un enfant a été élevé par les loups, qu'il marche comme eux, mange ce qu'ils mangent, il ne perd jamais totalement certains traits spécifiques propres à l'humanité.

Il reste quelque chose d'humain dans son regard, dans sa façon de se mouvoir, de se comporter vis-à-vis des êtres appartenant à la même espèce que lui. [Au sens strict, un homme sans culture n'est ni un être humain, ni un animal, ni une plante.

Soit l'on parle de l'homme et l'on est forcé de se reporter à la culture. Soit l'on parle d'une créature vouée à la déchéance.] Un homme sans culture n'est pas un homme Sans contact avec ses semblables, le nourrisson ne développera de lui-même aucune faculté, qu'il s'agisse des facultés nutritionnelles, motrices, perceptives, affectives ou mentales.

La vie qui l'anime n'aura donc aucun moyen de réaliser ses fins.

De ce point de vue, l'on peut dire que le nourrisson est incomparablement plus démuni qu'un être unicellulaire. Tout en l'homme relève de la culture Hormis certaines causes organiques avérées, même l'arriération mentale a une origine culturelle.

Dans la nature, il n'existe pas d'animaux atteints de folie (la maladie de la «vache folle» est une maladie organique). Les hommes ne dorment pas, ne mangent pas de la même manière.

L'acte sexuel lui-même est étroitement associé à de complexes agencements de règles instituées. Seule la nature est sans culture Ce qui est naturel est ce qui existe indépendamment de l'homme; ce qui ne porte pas son empreinte.

Même un homme «sans culture», vivant seul dans les bois, ne sachant ni lire, ni écrire, échappe à cette définition.

En effet, s'il sait chasser, faire du feu, c'est qu'il a reçu une éducation, aussi fruste soit-elle.. »

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