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Doit-on préférer la beauté du geste créateur de l'artiste à celle del'oeuvre ?

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« Introduction La beauté est un concept qui a été définie de diverses manières, puisqu'elle devait, selon les époques, répondre à des critères précis, à un besoin déterminé de l'esprit.

Dès lors, la beauté n'est pas la même quand elle est conçue au moyens de règles strictement rationnelles, ou quand elle est le produit d'une imagination libre et créatrice. L'artiste devra ainsi rendre compte, selon ses critères d'époque, soit d'œuvres belles relatives à une conception rationaliste et claire, soit d'œuvres géniales, pour lesquelles l'acte créateur est lui-même mystérieux, voire caché à l'artiste.

Mais quand on considère l'art contemporain qui, souvent déstabilisant, et pouvant rendre compte d'œuvres dont la laideur est au premier plan, peut-on penser à une mort du beau, en ceci que tout objet, même le plus quotidien, suffit à produire une œuvre d'art ? I.

Vers un décloisonnement de l'artiste a.

Le Moyen-Âge a cloisonné les artistes dans les arts purement mécaniques, c'est-à-dire en tant qu'ils n'étaient considérés que comme de simples exécutants, comme des producteurs d'œuvres dont la finalité résidait plus dans la glorification divine que dans celle de l'artiste.

Ainsi, c'est au rythme des commandes des prêtres, des princes, etc.

que l'artiste produisait, sans autonomie de création, puisque son rôle consistait à établir tel quel ce qu'on lui imposait.

L'artiste en ce sens était contraint, et non libre par rapport à ces œuvres.

L'art avait ainsi une fonction théologico-politique, et non purement esthétique.

De plus, comme l'enseignait St Augustin dans son De Trinitate, l'homme est créature, et non créateur, ainsi l'homme ne peut créer, et seul Dieu a cette particularité propre. b.

Le classicisme aussi a d'une certaine manière réduit l'artiste à un simple producteur de formes rationnelles.

En effet, lourd d'une tendance cartésienne, le classicisme prône la simplicité et la clarté, la production d'œuvre selon une logique rationnelle seule capable de rendre compte de la rationalité du réel.

Boileau, contre l'obscurité de la tendance baroque, affirmera ceci : « ce qui se conçoit simplement s'énonce clairement ».

L'œuvre doit s'efforcer, pour répondre à l'esprit cartésien de l'homme, de systématiser et de parfaire la nature, condition nécessaire du beau. c.

C'est à la Renaissance que s'affirmera d'abord une subjectivisation de l'art, en ce sens que l'artiste se libérera du joug de la raison logique, et considérera son art plus comme une activité libre que comme un travail contraignant.

C'est cette libéralité de l'art qui va conduire à l'idée de l'art des Beaux-Arts.

Le geste créateur de l'artiste sera pris en considération, l'artiste lui-même sera compris comme participant du divin.

La Renaissance caractérise alors les débuts d'une esthétique au sens où l'œuvre permet d'engendrer en l'homme une activité plus liée à sa sensibilité qu'à sa raison.

Mais la connaissance de règles reste de mise.

En effet, L.

de Vinci soulignera luimême que pour produire une belle œuvre, l'artiste doit connaître les lois de la perspective, ainsi que celles de l'anatomie.

Cette époque marque l'apparition du génie créateur, de l'homme « divin », mais aussi une certaine proximité de l'artiste avec la folie, puisqu'il vit une tension intérieure (homme-Dieu) puissante. II.

la liberté et le mystère de la création a.

Le romantisme allemand a permis de renverser la conception classiciste et rationaliste de l'art.

Comme on l'a vu, le classicisme produit la beauté à partir de règles purement logiques.

Le beau est défini comme étant le parfait. Le romantisme accomplira un geste subversif en rendant grâce à cette faculté reniée par les classiques qu'est l'imagination créatrice.

Cette volonté de mettre l'imagination créatrice au cœur de l'accomplissement de l'œuvre belle est aussi la marque d'un renversement du kantisme.

En effet, avec Kant, l'imagination ne peut être que productrice (invention) ou reproductrice (rappel d'une représentation). L'imagination créatrice révélera donc la possibilité en l'homme de se défaire des purs mécanismes de l'entendement, et de produire à l'infini des formations et déformations de ses représentations.

Baudelaire montrera que l'imagination est « la reine des facultés », qu'elle est « la reine du vrai […] apparentée à l'infini » (Curiosités esthétiques, Salon de 1859). b.

C'est l'intériorité de l'artiste qui forme l'œuvre.

C'est l'intuition pure, et non l'intuition empirique kantienne, qui permet au sujet créateur de se détacher de son moi empirique (le moi qui a pour objet des choses extérieures à lui), et de s'unir par un acte quasi mystique à l'infini.

Novalis présentera bien cette idée que l'esprit fini créateur engendre l'infini à travers son œuvre. La beauté est relative à un sentiment intérieur pur, et non à une appréhension conceptuelle de l'œuvre.

Novalis va rétablir un accès à l'absolu par la poésie, puisque la poésie, en libérant l'esprit des limites de la représentation empirique, incarne l'infini. c.

L'artiste revendique ainsi son statut de producteur d'œuvre par loisir. Et en même temps s'opère une subjectivisation du goût.

C'est le terme « esthétique », dont on attribue l'apparition à Baumgarten (AEsthetica, 1750), qui va désigner le fait que la sensibilité est un mode original de connaissance.

Le paradigme sensualiste du goût va se substituer au paradigme rationaliste du beau.

L'art sera désormais compris en tant que beauté libre.

Vient alors nourrir le beau le thème de la délicatesse (qui diffère de la rudesse de la raison) qui permettra de juger de la beauté des choses.

De fait, il y a toujours un « je ne sais quoi » qui est à l'origine du beau.

Le défaut lui-même a sa part dans la création.

Le cœur est plus à même de juger. »

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