Doit-on faire de la nature l'idéal de l'art ?
Extrait du document
«
Approche:
1.
Envisager les différentes définitions
« Idéal » s'entend en deux sens principaux : ce qui se rapporte à une idée, sans jugement de valeur, mais dans ce cas on préfère l'adjectif « idéel » ; ou ce
qui représente un modèle parfait à imiter, ce qui semble être le sens du terme dans le sujet.
2.
Distinguer sens commun et sens philosophique
'idéal, substantif ou adjectif, est souvent présenté comme inaccessible, synonyme de rêve ou d'utopie.
Mais en philosophie, l'idéal est nécessaire pour
guider la politique ou la morale ; il est ce qui nous permet de juger et d'améliorer la réalité.
L'idéal est proprement humain, car l'homme est projet et progrès.
C 'est le sens, par exemple, de « l'idéal régulateur » chez Kant.
3.
Repérer les questions philosophiques
L'idéal pose le problème de l'attitude à avoir face à la réalité : s'y résigner ou vouloir la changer ? Nécessaire au progrès, l'idéal peut être dangereux s'il
nous éloigne trop de la réalité.
Il pose aussi la question du guide de l'action humaine, du modèle que cette action vise à réaliser ou à imiter.
Cet idéal doit
donner des règles à l'action, celle de l'art ou de la politique.
Mais d'où vient l'idéal ? De la raison, de l'imagination ou du désir ?
4.
Relier à d'autres notions
« Idéal » s'oppose à « réel ».
Il oppose ce qui doit être à ce qui est.
L'idéal impose un devoir ou une exigence de perfection, face à un monde imparfait.
Il
peut aussi engendrer illusions ou utopies.
5.
C oncrétiser par des exemples
Outre l'exemple kantien de « l'idéal régulateur », par lequel la raison guide l'action humaine, l'art peut suivre l'idéal de la nature ou l'idéal de la nouveauté («
Le beau est toujours bizarre », dit Baudelaire), la politique peut suivre l'idéal de la liberté ou de l'égalité, la morale peut suivre l'idéal de la justice ou de
l'amour.
Introduction:
Les relations entre l'art et la nature ont toujours été problématiques.
En effet, ces deux domaines s'appellent et se nécessitent dans le même temps.
La
nature est ce qui est originaire, objectif, extérieur, autonome et indépendant de l'homme.
La nature est donc ce que l'homme peut modifier, mais ne peut pas
créer.
C ontrairement à cela, l'art ne dépend que de l'homme.
L'art est une invention de l'homme, il dépend de l'action de l'homme : il est ce qui est artificiel,
c'est-à-dire crée par l'action humaine.
Il semble donc, à première vue, que tout oppose ces deux domaines l'un étant antérieur à l'homme et l'autre
postérieur.
Cependant, il semble que la nature soit la condition de possibilité de l'art.
L'art a toujours tenté d'imiter la nature ; comme si elle cachait en son
sein un secret qu'il fallait percer.
Mais alors, doit-on faire de la nature l'idéal de l'art ? Mais tout d'abord, qu'est-ce qu'un idéal ? Le terme idéal vient du
terme ‘idée', autrement dit, c'est quelque chose qui n'est ni concret, ni matériel.
L'idéal est le but parfait que l'on cherche à atteindre.
L'on peut donc se
demander si la nature est une perfection que l'homme doit tenter de rendre.
Le but de l'art est-ce de percer le secret de cette nature et donc d'atteindre
cette perfection ou bien est-ce au contraire de se détacher de cette nature afin de produire autre chose ? En effet, pourquoi vouloir produire une réplique de
ce qui est déjà ? Si la nature est l'idéal de l'art, c'est-à-dire sa forme la plus haute, pourquoi chercher à la représenter : la perfection vaut mieux que l'image
de perfection ? Enfin, nous pourrions nous demander : L'art n'a-t-il pas crée son propre domaine de compétence dans lequel il est son propre idéal : l'art
pour l'art ?
I.
La nature, un idéal que l'art ne pourra jamais atteindre.
Platon nous explique que l'art a nécessairement pour idéal la nature, car il ne fait que reproduire, il n'invente pas, ne crée pas.
En effet, si un peintre
représente sur une toile un lit, pourra-t-on dire qu'il crée ? L'auteur répond par la négative en expliquant que le peintre ne crée rien, mais ne fait que
reproduire, que copier la nature.
A insi, le peintre copie (simulacre) le lit qu'a fabriqué le menuisier, c'est-à-dire un lit déjà existant : il ne fait donc que
produire une image de quelque chose qui existe déjà.
Nous pourrions même dire qu'il s'agit là d'une image d'image, car le menuisier, déjà, avait copié le lit
sur le modèle d'un lit idéal crée par Dieu.
A insi il existe l'idée de lit et la représentation qu'en fait le peintre en est fort éloignée.
L'art a donc bien pour idéal
la nature en tant qu'elle est créée par Dieu.
Et de plus, l'art doit avoir pour idéal la nature, en tant que cela est nécessaire, car l'artiste ne crée rien mais
copie les idées déjà existantes et matérialisées sous forme d'objet.
Mais alors, l'art se limite-t-il à la copie et est-il nécessairement soumis au règne de
l'idée ?
II.
L'art tente de sortir de l'emprise de la nature.
Les termes du sujet ‘doit-on', nous invitent à nous interroger sur la notion de devoir.
Est-ce un devoir de faire de la nature l'idéal de l'art ? Hegel répond par
la négative.
En effet, l'auteur montre que la nature ne doit pas être constituée comme idéale de l'art, car l'art doit devenir autonome, sortir de cette
suprématie qui le surplombe : celle de la nature.
L'art doit devenir autonome, et ne pas faire que copier la nature.
Hegel explique que le triomphe que l'on fait
au tableau de Zeuxis, qui a représenté des raisins de manière tellement réelle que les oiseaux ont essayés de picorer la
toile, est une erreur, car la fin suprême de l'art n'est pas cela.
En effet, l'art ne pourra jamais rivaliser avec la nature,
étant donné qu'il n'en sera toujours qu'une copie.
A insi il est paradoxal de prendre pour idéal un but que l'on ne peut
même pas espérer atteindre.
C e qui permet à un idéal de pouvoir perdurer comme idéal, c'est le fait que l'on ne sache pas
si l'on pourra l'atteindre un jour, alors on espère et on se perfectionne pour y arriver.
Ici un tel idéal ne tient pas, car l'art
sait qu'il ne pourra jamais atteindre la nature : leur essence sont différentes.
L'art doit donc développer autre chose et
tendre vers un autre idéal.
Mais lequel ? C omment l'art peut-il rester effectif s'il se sépare de la nature ?
III.
L'art comme juge de l'évolution de la nature.
Il est impossible que l'art se sépare totalement de la nature, et dans le même temps, il est impossible que la nature soit
l'idéale de l'art.
C omment résoudre cette aporie ? C'est Klee qui nous donne la solution.
En effet, l'artiste nous explique
que l'art n'a pas pour idéal la nature, car il la juge et donne un point de vue sur le monde.
La construction artistique ne
tente donc pas d'atteindre la perfection qu'elle voit dans la nature, mais témoigne plutôt de son imperfection.
A insi
lorsqu'un artiste représente des maisons qui penchent, il ne tente pas de rendre la nature telle qu'elle est exactement,
mais bien de témoigner du fait que le monde va mal.
Ainsi, la meilleure preuve de la non-idéalité de la nature, est le fait
que les artistes ne peignent plus dehors, au sein de cette nature, mais exercent leur art dans leur atelier, enfermés,
coupés de la nature.
Il explique que dans ce tableau de la maison qui penche : La Maison bleue, « violence est faite aux
arbres ».
L'on comprend donc que l'art meurtrit la nature, la triture, la dissèque pour la juger, et témoigner de ce qui en
elle et dans son évolution est imparfait.
L'art n'a donc plus la nature pour idéal, mais bien plutôt pour objet : il s'en fait le
juge et l'interprète.
Conclusion :
-
Tout d'abord, il semble que l'art ait nécessairement la nature pour idéal, car l'art est l'imitation de l'idée matérialisée en objet.
Puis nous avons vu que la nature ne peut pas être l'idéal de l'art, puisque l'art sait qu'il ne pourra jamais atteindre la nature dans son essence.
Enfin, la nature ne peut pas être l'idéal de l'art, car celui-ci s'extrait de l'emprise de la nature pour pouvoir mieux la juger..
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