Doit-on aimer la vérité plus que tout ?
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ANALYSE DU SUJET
SENS DU SUJET : Le sujet associe deux notions contradictoires : Amour et Vérité.
Comme la philosophie l'amour de
la vérité tend le désir vers un objet idéal, parfait et éternel.
Pourtant la vérité peut être dangereuse ou malheureuse
au point de ne pas vouloir l'aimer plus que tout et lui préférer l'illusion par exemple.
DÉVELOPPEMENT
INTRODUCTION La vérité devrait être aimée pour elle même, au point que son objet d'amour apparaisse comme
nécessaire.
Or s'il faut aimer la vérité plus que tout, alors son attrait n'est pas nécessaire mais exige une initiation
(la maïeutique de Platon, la méthode de Descartes).
La philosophie contribue à cet amour de la vérité en délivrant
l'esprit des filets du corps, de l'apparence et de l'erreur.
La vérité est donc à la fois ce qu'il faut aimer pour découvrir les essences et, en même temps, ce qui ne cesse de
se dérober au fur et à mesure que nous philosophons.
1) PRÉFÉRER L'ILLUSION RÉCONFORTANTE A LA VERITE DÉRANGEANTE (il ne faut pas aimer la vérité plus
que tout)
Dans son allégorie de la caverne (La République), Platon montre à quel point la vérité peut être douloureuse : le
prisonnier que l'on extrait de la caverne n'en sort pas volontiers, car il s'était habitué au défilé des images
trompeuses qu'il contemplait sur le mur.
Une fois à l'extérieur, le soleil l'éblouit ; et lorsqu'il est ramené vers ses
anciens compagnons, ceux-ci accueillent d'abord son discours avec incrédulité ou moquerie : eux non plus ne
tiennent pas à mettre en cause ce qu'ils admettent.
Il n'en reste pas moins que la vérité est affirmée comme le but de la réflexion : l'atteindre est un véritable devoir,
quels que puissent être les efforts à accomplir pour la découvrir et la diffuser.
C'est qu'elle nous promet des
connaissances en prise sur le monde et que, de la sorte, elle nous garantit des comportements plus efficaces en
même temps que des satisfactions spécifiques pour l'esprit.
On peut toutefois s'interroger sur la capacité qu'aurait la vérité de nous apporter le bien-être.
En fait, sa quête,
souvent longue et difficile en elle-même, implique que l'on soit toujours prêt à renoncer à ce qui était admis ; de ce
point de vue, elle suppose un dynamisme de la pensée, que l'on peut cependant désigner aussi de façon plus
négative comme une instabilité de principe.
Pour l'esprit en quête du vrai, rien n'est à considérer comme
définitivement stable, et l'image que nous avons du monde est sans cesse à reconstruire ou à modifier.
Il n'est pas
étonnant, dans de telles conditions, que la révélation du vrai suscite des résistances, ou même des craintes.
Ainsi,
le passage du géocentrisme à l'héliocentrisme s'est aussi soldé par une mentalité nouvelle, soulignant la façon dont
l'homme était devenu bien peu de chose relativement à la totalité de l'univers.
S'attacher au vrai, c'est donc risquer une permanente inquiétude, la perte de repères traditionnellement admis, la
chute des « voiles » qui enjolivaient le monde.
La vérité désenchante, parce qu'elle s'oppose aux mythes, aux récits
légendaires, aux pseudo-sciences ; elle nous offre du monde une version privée de toute résonance subjective,
avec laquelle nous ne pouvons plus être en sympathie.
2) Que nous apporte l'illusion que la vérité ne nous apporte pas ou mal ?
De son côté, l'illusion peut apparaître comme satisfaisante pour celui qui préfère se dissimuler la réalité de sa
situation — qu'il s'agisse de sa situation personnelle ou de sa situation d'homme en général, comme mortel.
L'illusion
rassure parce que, tant qu'elle dure, elle ne fait que confirmer l'interprétation habituelle du monde.
C'est bien
pourquoi elle constitue, du point de vue de Bachelard, un important obstacle épistémologique.
C'est que l'illusion prend son origine dans un besoin fondamental de quiétude et dans les désirs.
Sa dénonciation
risque en conséquence d'être peu efficace.
Si l'on admet, à la suite de Marx et de Freud, que la croyance religieuse
ne repose sur rien d'autre que sur un désir de compensation face aux misères réelles ou une demande de protection
d'origine infantile, force est de constater que ce repérage de ses sources ne suffit aucunement à la faire disparaître.
L'illusion nous est peut-être d'autant plus « naturelle » qu'elle correspond à notre fonctionnement psychique normal,
c'est-à-dire à la façon dont notre conscience nous trompe sur nos déterminations en censurant nos pulsions et les
représentations de notre inconscient.
Lorsque Freud a entrepris de diffuser ses théories, ce fut en affirmant qu'elles
étaient sans doute ce à quoi l'homme était le moins préparé, ou ce qu'il admettrait le plus difficilement, précisément
parce que les « vérités » qu'il affirmait venaient contredire la confiance traditionnellement accordée à notre
conscience.
Notre existence quotidienne ne peut, par exemple, se dérouler sans trop de heurts qu'à la condition que
nous « oubliions » l'importance de la sexualité.
L'illusion est ainsi quotidiennement vitale, parce qu'elle nous permet
d'avoir des relations normales avec les autres et d'obéir aux principes de notre environnement.
Toutefois, vient toujours un moment où l'illusion est dénoncée comme telle : ce fut le travail de Freud, et c'est, plus
généralement, la tâche de toute démarche philosophique ou scientifique.
Lorsque Marx dénonce les effets de
l'idéologie bourgeoise sur la conscience même de la classe ouvrière, que tente-t-il d'autre que d'ôter à cette
dernière ses illusions ? Vient toujours un moment où « le roi est nu ».
Il semble ainsi que l'auto-aveuglement, malgré
le confort qu'il peut m'apporter, doit avoir une fin ; et il apparaît semblablement, du point de vue collectif, que la
mentalité.
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