Dois-je me préoccuper du bonheur d'autrui ?
Extrait du document
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Analyse du sujet :
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Il est légitime de se demander si le bonheur d'autrui doit avoir quelque importance pour moi, puisque
autrui est un autre que moi, et que son existence n'a pas forcément d'incidence sur la mienne.
Par ailleurs, la société reposant en grande partie sur le principe de la compétition, il semble naturel que,
pour parvenir à son bonheur personnel, il faille écraser ses comparses.
Toutefois, si autrui n'est pas moi-même, il faut reconnaître que je ne suis pas grand-chose sans autrui :
le bonheur individuel compte-t-il vraiment s'il n'est partagé avec personne ?
Ainsi faut-il remarquer qu'autrui nous touche et nous concerne, et quand celui ou celle qu'on aime est
dans la peine, son désarroi nous cause presque autant de douleur.
Il semblerait donc qu'il faille au moins se
soucier du bonheur de ceux qu'on aime.
Cependant, cela n'implique pas forcément qu'il faille se préoccuper du bonheur d'autrui, si par « autrui »
on entend « tous les autres ».
Car se préoccuper du bonheur de ceux qu'on aime, ce n'est que se
préoccuper du bonheur de quelques uns.
Il faut remarquer finalement que cette inclination à se préoccuper du bonheur d'autrui ne semble trouver
de fondement que dans notre sentiment moral, mais celui-ci est-il justifié ?
Problématisation :
Il semble si difficile de parvenir à son propre bonheur que prendre du temps à se soucier de celui d'autrui apparaît
bien souvent comme une complication inutile : « charité bien ordonnée commence par soi-même » a-t-on coutume
de dire.
Cependant, on a du mal à s'imaginer que celui qui vit en égoïste absolu puisse réellement parvenir au
bonheur, comme si tout bonheur personnel passait nécessairement par le bonheur d'autrui.
La question se pose donc
de savoir s'il ne faut voir dans l'altruisme qu'un vœu pieu ou bien si celui-ci possède véritablement un sens.
Proposition de plan :
1.
La vertu apporte le bonheur.
Pour Aristote, le bonheur est la fin suprême, au-delà de laquelle on ne
saurait penser d'autres fins.
Il a donc une valeur de bien en soi.
Mais il
ne réside ni dans la recherche effrénée de plaisirs, ni dans la bonne
fortune (la chance), mais dans l'activité raisonnable et maîtrisée qui
prend comme fin l'accomplissement plénier de soi-même en accord avec
la vertu.
La plupart des hommes ne pouvant mener une vie conforme à
la vertu intellectuelle de la sagesse et atteindre ainsi dans la vie
contemplative le Souverain Bien, doivent agir selon la vertu de prudence
(« phronésis »), en évitant les deux extrêmes de la démesure et de
l'inertie.
Il s'agit donc de discerner dans chaque situation où est le juste
milieu (médiété) de manière à combiner harmonieusement le souhaitable
et le possible.
Le juste milieu doit se rechercher aussi bien pour les états
affectifs ou passions (ainsi le courage est le juste milieu de la témérité
et de la peur) que pour les actions (ainsi la libéralité est le juste milieu
de la prodigalité et de la parcimonie).
Une telle sagesse pratique unit étroitement l'aspiration au bonheur et la
vertu.
Prendre comme fin suprême une amélioration de soi, viser des
actions les meilleures possibles, n'exige pas le renoncement à tous les
plaisirs.
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Dans l'antiquité grecque, la tradition philosophique affirmait généralement qu'il existait un lien
entre le bonheur individuel et la rationalité.
En effet, ce n'est d'après ces philosophes qu'en épanouissant la plus excellente de ses
qualités que l'homme peut parvenir au bonheur.
En l'occurrence, la plus excellente de ses qualités est la raison : « l'intellect est la meilleure
partie de nous-mêmes » écrit ainsi Aristote dans le livre X de l'Ethique à Nicomaque.
Aussi pour
parvenir au bonheur faudrait-il développer cette qualité.
Il se trouve par ailleurs qu'en se conduisant selon sa raison, l'homme serait naturellement
poussé à adopter une vie de vertu, car tout dans la raison nous mène vers les chemins de la
vertu.
Les stoïciens disaient que c'est la tendance naturelle qui « recommande » l'homme à la
moralité.
Selon eux, l'excellence morale est condition nécessaire et suffisante du bonheur.
La vertu
rationnelle est le seul vrai bien, et elle fait le bien de celui qui la pratique.
Pour Aristote, la conduite vertueuse répondant parfaitement aux exigences de l'essence
humaine, celle-ci est ainsi couronnée par le bonheur.
Le bonheur constituant une sorte de
supplément gratuit à la conduite vertueuse, « comme la beauté pour ceux qui sont dans la fleur de
la jeunesse » (Aristote, Ethique à Nicomaque, X, 1174b).
Comme la vertu implique la philia, c'est-à-dire l'amitié comprise comme souci d'autrui, il semble
bien qu'il faille se préoccuper du bonheur d'autrui.
En conséquence, si l'on suit les anciens Grecs, il apparaît qu'il faut se préoccuper du bonheur.
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